L’habitat fortifié du Suc de Lermu à Charmensac (Cantal) : campagne de fouille 2021

Fabien Delrieu (SRA Auvergne-Rhône-Alpes) ; Christine Mennessier-Jouannet (UMR 8546) ; Cécile Moulin (UMR 5138) et Fabrice Muller (Inrap Auvergne-Rhône-Alpes)

Le Suc de Lermu est une petite table basaltique, situé à 1 100 m d’altitude sur la commune de Charmensac dans le Cantal (Fig. 1). 
Il possède une surface de 0,8 hectare et domine le paysage alentour. Il est délimité par une série de falaises au nord, à l’est et à l’ouest et par une fort pendage au sud qui lui permet par ailleurs de se rattacher au plateau voisin du Bru par un modeste isthme large de quelques dizaines de mètres
Fig. 1 : localisation du site du Suc de Lermu. Document F. Delrieu

Le Suc de Lermu est une petite table basaltique, situé à 1 100 m d’altitude sur la commune de Charmensac dans le Cantal (Fig. 1).

Il possède une surface de 0,8 hectare et domine le paysage alentour. Il est délimité par une série de falaises au nord, à l’est et à l’ouest et par une fort pendage au sud qui lui permet par ailleurs de se rattacher au plateau voisin du Bru par un modeste isthme large de quelques dizaines de mètres.

Le site a été mentionné dès les années 1950 et fait, par la suite, l’objet de plusieurs campagnes de sondages entre 1960 et 1966 sous la direction de M. Soubrier. Ces investigations, couplées aux travaux conduits par Alphonse Vinatié sur le site à la fin des années 1960, permettent d’identifier plusieurs occupations se succédant du Bronze final, à l’âge du Fer et à l’Antiquité tardive.

Une campagne de sondages conduite en 2016 confirme ces différentes séquences d’occupation dont la plus précoce remonte au Néolithique moyen II. Par la suite, le site est investi de manière significative au cours du Bronze final III. C’est à cette période que semble avoir été érigé un rempart doté de noyaux vitrifiés. Après un abandon de quatre siècles, le site est finalement occupé au début de La Tène ancienne.

Une importante campagne de fouille conduite en 2021 (Fig. 2) a permis de reprendre cette abondante de documentation et de préciser la nature et la chronologie des occupations se développant sur le site au cours du second âge du Fer.

Le suc de Lermu. Une campagne de sondages conduite en 2016 confirme ces différentes séquences d’occupation dont la plus précoce remonte au Néolithique moyen II. Par la suite, le site est investi de manière significative au cours du Bronze final III. C’est à cette période que semble avoir été érigé un rempart doté de noyaux vitrifiés. Après un abandon de quatre siècles, le site est finalement occupé au début de La Tène ancienne. 
Une importante campagne de fouille conduite en 2021 (Fig. 2) a permis de reprendre cette abondante de documentation et de préciser la nature et la chronologie des occupations se développant sur le site au cours du second âge du Fer.
Fig. 2 : localisation des zones de fouille ouvertes en 2021 au Suc de Lermu. Document F. Delrieu

1 – Le Suc de Lermu. Une genèse au cours de La Tène A

Une occupation du site au cours de La Tène A pouvant perdurer au cours de La Tène B se développe dans l’emprise du site. Elle est caractérisée par la présence d’un niveau d’occupation (US 05,Fig. 3) et d’un sol archéologique déjà identifié en 2016. L’assemblage céramique issu de la fouille de ce niveau permet de l’attribuer à La Tène A au sens large eu égard à son caractère ubiquiste. Cependant la présence de céramiques tournées à pâte claire, peinte ou non, associées ponctuellement à un registre décoratif caractéristique des productions de céramiques grises monochromes méridionales permettent de proposer une datation centrée sur la fin du Ve s. av J.-C. à l’instar des productions gardoises similaires documentées dans les vallées de la Cèze ou de la Tave (Goury 1995). Il faut cependant noter qu’un faisceau d’éléments tendent à démontrer que les productions tournées du Suc de Lermu ne sont pas issues d’importations mais plus certainement d’une production locale imitant des produits méridionaux (Delrieu et al. 2018).

Leur présence, confirmée en 2021, atteste la conduite d’échanges significatifs entre le sud de l’Auvergne et le Languedoc oriental via le Massif central. Dans la même perspective, cette même campagne de fouille a permis également d’identifier le premier tesson auvergnat de céramique grise monochrome. Il a été mis au jour en position secondaire dans un niveau plus récent. Sa présence n’est pas anodine et confirme l’influence méridionale qui caractérise cette occupation. Cette dernière est attestée par les données carpologiques. La présence de pois et de lentilles, productions thermophiles et xérophiles, plaide en ce sens. Cependant, l’influence languedocienne et plus généralement méridionale de ces assemblages n’est pas exclusive. La présence de deux tessons présentant des décors graphités atteste un ancrage régional fort au niveau de la Haute-Auvergne où ce type de production est bien documenté ainsi que dans tout le centre-ouest de la France actuelle et dans les piémonts occidentaux du Massif central (Charentes, Limousin, Périgord, Lot, Cantal…).

Le suc de Lermu. Une occupation du site au cours de La Tène A pouvant perdurer au cours de La Tène B se développe dans l’emprise du site. Elle est caractérisée par la présence d’un niveau d’occupation (US 05,Fig. 3) et d’un sol archéologique déjà identifié en 2016. L’assemblage céramique issu de la fouille de ce niveau permet de l’attribuer à La Tène A au sens large eu égard à son caractère ubiquiste. Cependant la présence de céramiques tournées à pâte claire, peinte ou non, associées ponctuellement à un registre décoratif caractéristique des productions de céramiques grises monochromes méridionales permettent de proposer une datation centrée sur la fin du Ve s. av J.-C.
Fig. 3 : coupe n°2 obtenue sur la bordure occidentale de la zone de fouille. Document F. Delrieu

Régionalement cette occupation de hauteur est contemporaine de celles identifiées récemment sur les sites du Puy-Saint-Romain dans le Puy-de-Dôme ou de Chastel-Marlhac dans le Cantal (Auxerre-Géron, Couderc et Delrieu 2017). Ce sont pour l’heure les trois seuls sites régionaux occupés de manière évidente pendant cette séquence chronologique. Le Suc de Lermu prend donc place dans un corpus de sites peu étoffé mais dont la présence atteste, aussi bien régionalement qu’au niveau national, l’utilisation des sites de hauteur, fortifiés ou non, pour l’implantation d’habitats supposés permanents.

2 – Le Suc de Lermu. Une occupation à La Tène B2 et C

La principale évolution issue des résultats de fouille conduite en 2021 a été la mise au jour d’une importante et inédite occupation laténienne du site. Cette dernière avait été pressentie en 2016 avec la découverte dans le sondage n°1 d’une fibule de schéma La Tène II.

Le suc de Lermu. Cet horizon chronologique est avant tout caractérisé par la mise en place d’un système défensif (Fig. 4). Ce dernier est fondé directement sur un possible état de fortification ancien du site (US 07). Il se présente sous la forme d’une masse de blocs de basalte liés à la terre (US 08). Surmontée d’une probable palissade en bois (US 10), elle est grossièrement parementée sur sa face extérieure et couverte sur sa face interne par une série de dalles de basalte posées en écaille. Ce système de protection semble devoir permettre d’évacuer rapidement l’eau de pluie de la partie haute du rempart, dans un souci évident de conservation, en direction d’un petit canal aménagé à la base de l’ouvrage défensif, le long de sa limite interne. Son comblement est par ailleurs très hydromorphe (US 04) et a livré un abondant assemblage de mobilier correspondant à des rejets de nature domestique. L’aménagement d’un empierrement de 1 à 1,5 mètre de large longeant la limite interne de ce canal semble pouvoir être associé à une volonté de faciliter la circulation en arrière du rempart (Fig. 5).
Fig. 4 : Vue en plan (1er plan) et en coupe (2d plan) de l’ouvrage défensif laténien. Cliché F. Delrieu

Cet horizon chronologique est avant tout caractérisé par la mise en place d’un système défensif (Fig. 4). Ce dernier est fondé directement sur un possible état de fortification ancien du site (US 07). Il se présente sous la forme d’une masse de blocs de basalte liés à la terre (US 08). Surmontée d’une probable palissade en bois (US 10), elle est grossièrement parementée sur sa face extérieure et couverte sur sa face interne par une série de dalles de basalte posées en écaille. Ce système de protection semble devoir permettre d’évacuer rapidement l’eau de pluie de la partie haute du rempart, dans un souci évident de conservation, en direction d’un petit canal aménagé à la base de l’ouvrage défensif, le long de sa limite interne. Son comblement est par ailleurs très hydromorphe (US 04) et a livré un abondant assemblage de mobilier correspondant à des rejets de nature domestique. L’aménagement d’un empierrement de 1 à 1,5 mètre de large longeant la limite interne de ce canal semble pouvoir être associé à une volonté de faciliter la circulation en arrière du rempart (Fig. 5).

Le suc de Lermu. Cet horizon chronologique est avant tout caractérisé par la mise en place d’un système défensif (Fig. 4). Ce dernier est fondé directement sur un possible état de fortification ancien du site (US 07). Il se présente sous la forme d’une masse de blocs de basalte liés à la terre (US 08). Surmontée d’une probable palissade en bois (US 10), elle est grossièrement parementée sur sa face extérieure et couverte sur sa face interne par une série de dalles de basalte posées en écaille. Ce système de protection semble devoir permettre d’évacuer rapidement l’eau de pluie de la partie haute du rempart, dans un souci évident de conservation, en direction d’un petit canal aménagé à la base de l’ouvrage défensif, le long de sa limite interne. Son comblement est par ailleurs très hydromorphe (US 04) et a livré un abondant assemblage de mobilier correspondant à des rejets de nature domestique. L’aménagement d’un empierrement de 1 à 1,5 mètre de large longeant la limite interne de ce canal semble pouvoir être associé à une volonté de faciliter la circulation en arrière du rempart (Fig. 5).
Fig. 5 : relevé en plan du sol n°2 (La Tène B2-C). Document F. Delrieu

Cet empierrement est constitué de blocs de basalte posés à plat scellant directement le niveau de La Tène A (US 05). Cet ouvrage défensif et les éléments qui lui sont associés (canal et voie empierrée) sont parties intégrantes de l’US 12 attribuée à La Tène B2 et C qui correspond au niveau d’occupation. Outre l’abondant assemblage céramique, caractéristique de cette séquence mis au jour notamment dans le comblement du canal (US 04) les bornes chronologiques de cette occupation sont constituées par la découverte de deux fibules mises au jour dans le même niveau (US 04). La plus ancienne a été découverte en 2021 et peut-être attribuée à La Tène B2. La plus récente, découverte en 2016 (Delrieu et al. 2018) est datée de La Tène C. En l’état actuel de la documentation concernant cette occupation, ces deux bornes marquent les deux terminus de cette occupation, probablement longue, qui couvre à l’évidence une bonne partie du IIIe s. av. J.-C. et probablement la première moitié du IId. L’ensemble du mobilier céramique associé prend place dans l’intervalle chronologique ainsi défini. Au sein de cette occupation, les données stratigraphiques établissent que l’aménagement du rempart, et probablement de ses structures associées (canal et voie empierrée) marque la genèse de cette occupation, probablement au cours de La Tène B.

En arrière de l’ouvrage défensif précédemment décrit, un possible bâtiment à abside a été identifié (Fig. 5). Sa fondation semble associée à l’US 12. Il n’a pas été fouillé en intégralité mais les éléments de mobilier associés au niveau superficiel de son sol interne semblent permettre d’attribuer cet état récent de son fonctionnement à La Tène B2 et C. De nombreux éléments constitutifs d’une sole perforée associée à un possible four de type Sévrier ont été mis au jour de manière éparse en périphérie et à l’aplomb de ce bâtiment.

Les éléments de culture matérielle identifiés pour cette occupation confirment le développement d’une importante activité domestique sur le site au cours de cette séquence chronologique. La présence d’un catillus (Fig. 6) dans le comblement du canal bordant le rempart (US 04) est inédite en Haute-Auvergne pour cette séquence chronologique où l’usage des meules rotatives n’était pas encore attesté. L’assemblage céramique constitue dorénavant un lot de référence à l’échelle départementale. Le Suc de Lermu correspond en effet au premier site d’habitat de La Tène B et C documenté dans le département du Cantal. Cet ensemble céramique, à l’instar de celui attribuable à La Tène A, est marqué par une forte proximité avec le Languedoc oriental confirmant le tropisme méridional caractérisant cette région durant une bonne partie du second âge du Fer.

Le suc de Lermu. Les éléments de culture matérielle identifiés pour cette occupation confirment le développement d’une importante activité domestique sur le site au cours de cette séquence chronologique. La présence d’un catillus (Fig. 6) dans le comblement du canal bordant le rempart (US 04) est inédite en Haute-Auvergne pour cette séquence chronologique où l’usage des meules rotatives n’était pas encore attesté. L’assemblage céramique constitue dorénavant un lot de référence à l’échelle départementale. Le Suc de Lermu correspond en effet au premier site d’habitat de La Tène B et C documenté dans le département du Cantal. Cet ensemble céramique, à l’instar de celui attribuable à La Tène A, est marqué par une forte proximité avec le Languedoc oriental confirmant le tropisme méridional caractérisant cette région durant une bonne partie du second âge du Fer
Fig. 6 : Vue du catillus mis au jour dans le comblement du fossé associé au rempart laténien. Cliché F. Delrieu

3 – Le Suc de Lermu. Une fréquentation du site au cours de l’Antiquité tardive

Par la suite, le site semble abandonné pendant plus de 500 ans avant qu’une nouvelle occupation ne se développe sur place au cours des Ve et/ou VIe s. Elle se caractérise par la présence d’un niveau d’occupation (US 03) associé à un sol archéologique (sol n°1). Aucune structure n’a été identifiée pour cet horizon chronologique. L’occupation qui s’y développe au cours de l’Antiquité tardive semble donc relativement lâche et n’a pas réellement correspondu à un réaménagement profond et durable du site, du moins dans le secteur fouillé. Il est probable que l’habitat en lui-même se localise à proximité immédiate de la zone de fouille. Comme sur d’autres sites de hauteur contemporains fortifiés au cours de la protohistoire, le rempart ancien est délaissé. L’espace situé en arrière de cet ouvrage défensif probablement ruiné est alors dédié au rejet des reliefs de l’occupation domestique qui se développe probablement au centre du plateau. Cette hypothèse semble correspondre aux données observées au cours des fouilles conduites en 2021. Il faudrait par la suite mener des campagnes de sondages sur les secteurs internes localisés au centre de la table basaltique pour mettre au jour d’éventuels traces immobilières de cet habitat.

Cette séquence avait déjà été identifiée précédemment (Fournier 1962) grâce à la découverte de tessons de DSP et de fragments de verre lors des interventions précédentes. On notera également, que, comme pour les occupations laténiennes, le site semble bien inscrit dans les réseaux d’échanges entre le centre et le sud de la Gaule comme le prouve la présente significative de DSP.

Enfin le site est abandonné définitivement à la fin de cette occupation des Ve et VIe s. Le petit plateau de Lermu retrouve alors certainement sa vocation agricole. L’ensemble de la séquence stratigraphique est alors recouvert par un important apport de colluvions (US 02) issu de l’érosion de la partie centrale du site qui s’accumule en arrière des vestiges des aménagements défensifs protohistoriques.

Si le premier âge du Fer et le début de La Tène ancienne correspondent à des périodes particulièrement bien documentées en Haute-Auvergne, notamment grâce aux données funéraires issues de la fouille des très nombreux tumulus connus dans cette région, le second âge du Fer, à l’inverse, connaît une importante lacune documentaire. En effet, seuls quelques dizaines de sites ou d’indices de sites sont connues pour cette période dans le département du Cantal. La Tène B et C correspondent probablement aux séquences les moins bien documentées du second âge du Fer en Haute-Auvergne. En effet, seule la découverte ancienne d’un fourreau à bouterolle ajourée de type Hatvan-Boldog attribuable à La Tène B2, sur la commune de Laveissenet peut être associée à cette période. Ce manque béant tranche nettement avec l’abondance des données pour cette période qui ont été collectées plus au nord, dans le bassin clermontois. La mise au jour de cette occupation laténienne dans l’emprise du Suc de Lermu correspond donc à une réelle opportunité de documenter en détail un contexte domestique jusqu’à présent inédit en Haute-Auvergne.


Bibliographie

Auxerre-Géron, Couderc et Delrieu 2017 : Auxerre-Géron F.-A., Couderc F. et Delrieu F. – Les habitats de hauteur occupés à La Tène A en Auvergne : bilan et données nouvelles, Bulletin de l’Association Française pour l’étude de l’âge du Fer, Paris, 35, p. 17‑22.

Delrieu et al. 2018 : Delrieu F., Auxerre-Géron F.-A., Chabert S. et Moulin C. – Les occupations protohistoriques du Suc de Lermu à Charmensac : état des lieux et données nouvelles, Revue de la Haute-Auvergne, 80, p. 157‑216.

Fournier 1962 : Fournier G. – Le peuplement rural en Basse Auvergne durant le Haut Moyen Âge, Paris, 678 p.

Goury 1995 : Goury D. – Les vases pseudo-ioniens des vallées de la Cèze et de la Tave (Gard), In : Sur les pas des Grecs en Occident, Hommages à André Nickels, textes réunis et édités par P. Arcelin, M. Bats, D. Garcia, G. Marchand et M. Schwaller, ADAM-Errance, Lattes/Paris, 1995, p. 309-324. (Études massaliètes 5).

Chroniques ARAFA n°3. 2024

Sommaire

1-Le Suc de Lermu à Charmensac (15), bilan de la campagne de fouilles conduite en 2023. Fabien Delrieu

2-L’occupation laténienne d’Orcet (63), Les Courtiaux. Rémi Collas

3-Petits objets issus du recyclage de vases en céramique en Auvergne à La Tène Moyenne et Finale. Christine Mennessier-Jouannet

4-Parures annulaires protohistoriques en schiste bitumineux de l’Allier, reprise des données et nouvelles perspectives. Alexandre Michel

5-Nouvelles recherches sur l’occupation laténienne et augustéenne du « Quartier des Artisans » à Gergovie (La Roche Blanche – Puy-de-Dôme) Bilan des opérations des années 2022 et 2023. Yann Deberge et Marion Dacko

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Les Chroniques de l’Arafa, n°3 nous apportent un lot nouveau de notices consacré aux recherches actuellement en cours sur la Protohistoire récente de l’Auvergne. Cinq notices sont au rendez-vous avec deux nouveaux contributeurs. Croyez bien que nous nous attacherons à poursuivre dans ce sens.

Cependant, l’ampleur prise par certaines notices incite à revenir sur la définition de notre contribution à la diffusion de la recherche. Que doit être un document annuel tel que le nôtre, Les Chroniques de l’Arafa ? À mon avis, c’est une diffusion rapide de l’existence d’une fouille ou d’une étude et de leurs premiers résultats. C’est un porter à connaissance mis à la disposition des archéologues de la région Auvergne, mais aussi de nos collègues à plus large échelle.

Mais il ne s’agit pas d’une nouvelle ligne éditoriale qui viendrait se surajouter à bien d’autres, pourvues de conseil scientifique et de comité de lecture. Certes, la présidence de l’association en validant les textes accrédite aussi leur contenu, mais cela n’a aucune commune mesure avec le support scientifique des revues régionales, nationales et autres. Ainsi Les Chroniques de l’Arafa cherche plutôt une voie étroite associant exposé des faits et esprit de synthèse. Pour les Chroniques à venir, nous inciterons les auteurs à condenser leur propos et à le rendre proche et accessible à un large public, bénévole ou amateur autant qu’étudiant ou archéologue.

Cette année 2023 a connu le dépôt d’un nouveau projet de recherche : l’étude des parures annulaires en schiste bitumineux. Elle s’attache à la recherche des filons dans le département de l’Allier, de leur exploitation et de la diffusion des produits fabriqués dans le domaine celtique de l’âge du Bronze à la fin de La Tène.

Le site fortifié du Suc de Lermu à Charmensac dans le Cantal permet, après quatre années de fouille, d’offrir un panorama d’ensemble de son occupation depuis le Néolithique moyen jusqu’au début du IIe siècle avant notre ère.

En Basse Auvergne, le site des Courtiaux à Orcet dans le Puy-de-Dôme offre un bel exemple d’occupation « rurale » de faible extension, mais ouverte vers des cultures lointaines notamment méditerranéennes. Ce site exploitait la bordure sud du bassin de Sarliève durant le Ve siècle avant notre ère.

Une notice expose le cas particulier « des rondelles » : petits objets circulaires retaillés dans la panse des vases. Au moins certains d’entre eux accompagnent des moments privilégiés de la vie sociale des communautés du IIIe au Ier siècle avant notre ère.

La reprise d’un programme de fouille sur « le quartier des artisans » de l’oppidum de Gergovie fait le point sur l’état des fouilles anciennes de ce secteur (depuis 1861 à 1947) et celui des archives qui en sont issues. Elle permet aussi de diagnostiquer le degré de conservation de sols ou niveaux en place et de paramétrer les fouilles à reprendre.


Christine Mennessier-Jouannet, Présidente de l’Arafa

Chroniques ARAFA n°1. 2022

Sommaire

Introduction. Christine Mennessier-Jouannet

Campagne de prospection thématique 2021 : les dolmens de la Planèze de Saint-Flour (bilan de l’opération et perspectives). Florent Chateauneuf

La nécropole de la Pénide à Espalem (43) et le tumulus 21. Anne Duny

L’habitat fortifié du Suc de Lermu à Charmensac (Cantal) : campagne de fouille 2021. Fabien Delrieu, Christine Mennessier-Jouannet, Cécile Moulin, Fabrice Muller

Chronologie du mobilier archéologique du second âge du Fer en Auvergne. Volume 2 : La Tène ancienne en Basse Auvergne. Christine Mennessier-Jouannet, Jean-Claude Lefèvre

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Chroniques ARAFA n°2. 2023

Sommaire

1- Recherche d’archives paléoenvironnementales à proximité de sites protohistoriques (Nord du Cantal). André-Marie Dendievel

2 – La question des exploitations minières protohistoriques dans le Cantal : tour d’horizon du potentiel en minerais et des données archéologiques disponibles. Florie-Anne Auxerre-Géron

3 – L’occupation du sol dans le massif du Cézallier à l’âge du Bronze et au 1er âge du Fer. Fabien Delrieu

4 – Le « Tumulus » de Celles (Cantal). Monument funéraire ou plate-forme de crémation ? Lionel Izac-Imbert

5 – Un accessoire de cuisine en céramique : les plaques de cuisson. Christine Mennessier-Jouannet

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Les Chroniques n°2 poursuivent leur objectif : vous apporter un condensé des résultats acquis dans divers domaines des recherches effectuées par les membres de l’association. A ce titre, elles sont révélatrices des centres d’intérêt actuels concentrés pour la plupart vers la Haute Auvergne. En effet, après une longue période où la problématique des sites agglomérés, puis des oppida et de leur environnement territorial a enrichi nos connaissances sur l’organisation politique, administrative et économique du territoire arverne centré sur la Basse Auvergne, nous voilà portés vers la Haute Auvergne.

Cantal et Haute-Loire ont longtemps été les méconnus de la recherche protohistorique. Nous ne pouvons que nous réjouir de ce changement de tendance qui apporte déjà des résultats insoupçonnés sur la question des identités culturelles et de leurs différentes modalités entre Haute et Basse Auvergne. Il vous en sera fait écho prochainement.

Vous trouverez, dans ces Chroniques n°2, un aspect primordial de nos recherches : André-Marie Dendievel nous propose la restitution des paysages et de l’environnement dans lequel les sites se sont implantés, et qu’ils ont transformés par le fait même. Dans une optique peu différente, Florie-Anne Auxerre-Géron fournit un aperçu à double focale : les potentiels minéralogiques du Cantal et de l’Est du Limousin tels qu’ils nous sont connus actuellement et les traces ou indices même ténus de leur exploitation durant l’âge du Fer. Fabien Delrieu, cette année, ses pieds dans les pas d’Alphonse Vinatié, restitue la longue trace des monuments funéraires protohistoriques encore visibles dans le paysage du nord du Cantal, le long de la vallée de la Sianne. Lionel Izac se joint à nous pour rappeler une fouille menée il y a plus de dix ans sur le site nommé « tumulus » de Celles. Nous verrons comment l’identification de sa fonction reste encore problématique.

Pour garder un contact avec la Basse Auvergne, Christine Mennessier-Jouannet a extrait parmi le mobilier archéologique présent sur tous les sites actuellement connus du second âge du Fer, un accessoire de cuisine jusqu’ici peu documenté : les plaques de cuisson. Derrière un aspect modeste, elles restent l’objet de discussion sur le détail de leur morphologie et sur leur mode d’utilisation. Une chose est certaine, elles sont un guide précieux d’un point de vue chronologique.

Christine Mennessier-Jouannet

Présidente de l’ARAFA

Archéologie de l’âge du Fer en Auvergne

L’ ARAFA (Association pour la Recherche sur l’Age du Fer en Auvergne) effectue, depuis 1990, des Recherches archéologiques (prospections, fouilles et publications), en concertation avec le Service régional de l’Archéologie.

La base archéologique de L’ ARAFA est la maison Domat à Mirefleurs, bâtisse du XVᵉ siècle que les habitants du village appellent encore la « maison des Anglais ». En référence à l’accueil d’étudiants anglophone sous la houlette de John Collis (université de Sheffield) entre 1975 et 1994.

La maison a appartenu à la famille Domat, dont le membre le plus connu, le juriste Jean-Baptiste Domat, codifia le droit français au XVIIᵉ siècle. Il fut l’ami intime de Blaise Pascal, à qui l’on doit l’invention de la machine à calculer. Nous nous plaisons à penser que nous continuons ainsi une longue tradition de calcul.

Cette bâtisse est mise gracieusement à disposition de l’ARAFA par son propriétaire, Henri Desfeuilles.

La base archéologique de L' ARAFA est la maison Domat à Mirefleurs, bâtisse du XVᵉ siècle que les habitants du village appellent encore la « maison des Anglais ». En référence à l’accueil d’étudiants anglophone sous la houlette de John Collis (université de Sheffield) entre 1975 et 1994.
La maison a appartenu à la famille Domat, dont le membre le plus connu, le juriste Jean-Baptiste Domat, codifia le droit français au XVIIᵉ siècle.
La maison Domat et ses occupants

Archéologie de l’âge du Fer en Auvergne : Objectifs de l’ARAFA

Les étudiants chercheurs que nous accompagnons dans leur démarche scientifique trouvent intérêt à utiliser la documentation et les moyens informatiques que leur procure cette base. Chaque été de nombreux jeunes et personnes de tous âges participent aux campagnes de fouilles sur plusieurs chantiers répartis dans la région.

Ces opérations sont financées par l’État et les collectivités territoriales (Conseils régionaux, Conseils départementaux, Communautés…)

Il convient de souligner ici le rôle fédérateur de L’ ARAFA en Auvergne, dont la dynamique s’est enrichie ces dernières années avec l’arrivée de nouveaux chercheurs d’horizons divers (Université, CNRS, Culture, etc.), s’impliquant scientifiquement dans de nouveaux programmes de recherche avec un renouvellement des problématiques dans différents domaines (funéraire, cultuel, céramique, numismatique, transformation de matière première).


Archéologie de l’âge du Fer en Auvergne : Histoire de l’ARAFA

Notre équipe s’est implantée en Auvergne en 1973, réanimant une longue tradition de collaboration franco-britannique dont l’origine remonte aux années 1930 (Comité Pro-Gergovia).

Faisant suite aux opérations de fouille programmée effectuées sur le « site de La Grande Borne« , l’ARAFA cumul 30 années de recherche sur l’âge du Fer en Auvergne, et plus particulièrement sur le Second âge du Fer.


Années 1960

En 1966, sur les conseils d’Hugues Vertet, Robert Périchon ouvre le chantier du « site d’Aulnat » qu’il fouille jusqu’en 1982, en mettant en évidence des niveaux structurés (empierrement, fosses, sépultures) associés à un mobilier abondant et varié daté entre le Ileme et le ler siècle av. J.-C.


Années 1970

À partir de 1973 et jusqu’en 1981, John Collis s’associe à l’étude de ce site, en ouvrant un deuxième chantier situé à quelques dizaines de mètres au sud du chantier « Périchon ». Il fouille un chemin flanqué de fossés latéraux et des fosses s’échelonnant entre entre le Ileme et le ler siècle av. J.-C.


Années 1980

L' ARAFA : en 1966, sur les conseils d’Hugues Vertet, Robert Périchon ouvre le chantier du « site d’Aulnat » qu’il fouille jusqu’en 1982, en mettant en évidence des niveaux structurés associés à un mobilier abondant et varié daté entre le Ileme et le ler siècle av. J.-C. À partir de 1973 et jusqu’en 1981, John Collis s’associe à l’étude de ce site, en ouvrant un deuxième chantier situé à quelques dizaines de mètres au sud du chantier « Périchon ».
R. Périchon et J. Collis (cliché : J. Humble)

À partir de 1980, Nigel Mills organise des campagnes de prospection au sol effectuées de façon systématique sur la base d’un zonage kilométrique. Ces opérations ont couvert le sud de la Grande Limagne ainsi que la région des buttes (Authezat, Plauzat, Saint-Sandoux).

En 1984, le travail fut axé sur le fuseau d’étude de l’autoroute A71. La découverte du site de « Pâtural » a permis d’orienter la problématique de l’équipe vers l’étude d’un site d’habitat de plaine occupé pendant la même période que « La Grande Borne ».

En 1988, l’équipe bénéficia du soutien du CNRS dans le cadre d’une ATP consacrée à l’étude de « l’occupation des Limagnes d’Auvergne durant l’âge du Fer ». Trois secteurs ont été sélectionnés :

  • Le bassin de Clermont-Ferrand et le sud de la Grande Limagne (V. Guichard).
  • le bassin de la Morge, au nord de la Grande Limagne par (Ch. Jouannet).
  • La Limagne d’Issoire par (C. Watson).

Cette étude fut continuée de 1990 à 1994, par un ensemble de prospections-inventaire dans le cadre d’un Projet Collectif de Recherche soutenu par le ministère de la Culture : « le peuplement des Limagnes d’Auvergne à l’âge du Fer ».

L' ARAFA : en 1966, sur les conseils d’Hugues Vertet, Robert Périchon ouvre le chantier du « site d’Aulnat » qu’il fouille jusqu’en 1982, en mettant en évidence des niveaux structurés associés à un mobilier abondant et varié daté entre le Ileme et le ler siècle av. J.-C. À partir de 1973 et jusqu’en 1981, John Collis s’associe à l’étude de ce site, en ouvrant un deuxième chantier situé à quelques dizaines de mètres au sud du chantier « Périchon ».
Aulnat, La Grande Borne, chantier 4. 1975. (cliché : J. Collis)

Années 1990

De 1991 à 1992, plusieurs fouilles programmées étaient menées par L’ ARAFA sur différents secteurs de la Basse-Auvergne :

  • « Artonne » sur un site (captage de source) occupé depuis La Tène ancienne jusqu’à La Tène Dl (Ch. Jouannet),
  • « Corent » en 1991 et 1992 à l’emplacement présumé d’un sanctuaire (V. Guichard),
  • « La Roche Blanche » et « Orcet » en 1995 et 1996,
  • le site des « Cotes de Clermont », sur les emplacements présumés des ouvrages militaires liés aux campagnes de César (V. Guichard),
  • « Clermont-Ferrand » sur le site de « Pâtural » fouillé de 1986 à 1995, et où alternèrent opérations d’archéologie programmée (J. Collis et J. Dunkley), et d’archéologie préventive (M. Richardson).

A cela, il faut ajouter de nombreuses autres interventions (prospections et sondages).

Archéologie de l’âge du Fer en Auvergne : fouilles récentes

Ces dernières années des opérations programmées ont eu lieu :

  • sur le plateau de Gergovie (63). Étude des fortifications (T. Pertlwieser) ;
  • sur le plateau de Gergovie (63). Étude du sanctuaire gallo-romain (M. Garcia) ;
  • sur le plateau de Corent (63). Étude du sanctuaire (M. Poux) ;
  • à Hérisson (03). Oppidum de Cordes-Chateloi (D. Lallemand) ;
  • au Cendre (63) : Oppidum de Gondole (Y. Deberge) ;
  • à Salettes (43). Camp d’Antoune (M.-C Kurzaj) ;
  • à Monestier (03). Site de Chantelle-la-Vieille (J. Besson) ;
  • à Budelières (23). Site de Sainte-Radegonde (M. Pasquel) ;
  • à Bègues (03), sur l’oppidum (P. Pion) ;
  • à Charmensac (15). Suc de Lermu (F. Delrieu) ;
  • à Espalem (43). Nécropole de la Pénide (A. Duny) ;
  • à Saint-flour (15). Dolmens de la planèze (F. Chateauneuf)

La carte archéologique

En 30 ans la carte archéologique de l’âge du Fer en Auvergne a considérablement évolué, modifiant notre vision de l’occupation du territoire. Sur l’ensemble de la région Auvergne, plus de 600 sites sont recensés.

Pendant les 30 dernières années, le nombre des sites a globalement été multiplié par 5. Mais c’est surtout pendant les quinze dernières années écoulées que le rythme des découvertes et la qualité des informations ont augmenté de façon sensible.

La centaine de sites qui a alors enrichi la Carte Archéologique provient de diagnostics sur de vastes espaces et d’opérations de fouilles préventives d’envergure. Mais aussi de la systématisation des prospections au sol.


Cette évolution est naturellement liée à la création d’aménagements structurants notamment dans des secteurs clefs comme l’Allier ou celui du bassin de Clermont. Mais aussi à une meilleure gestion du territoire par un Service régional de l’archéologie alors renforcé (gestion du préventif et établissement de la Carte archéologique), ainsi qu’au développement de l’archéologie préventive.

Auteurs : J. Collis, V. Guichard et al.

Pour en savoir plus

Ezio Ardvini et Yves Morvan, “Pascal à Mirefleurs ? Les dessins de la maison de Domat”Courrier du Centre International Blaise-Pascal [Online], 6 | 1984

John Collis : La mémoire des lieux: hommage à Robert Périchon (1928-1999)

Notice Salettes (43) – Le Camp d’Antoune

Notice Monestier (03) – Chantelle-la-Vieille

Notice Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi

Notice Budelières (23) – Site de Sainte-Radégonde

Notice Les dolmens de la Planèze de Saint-Flour (15)

Espalem (43) – La nécropole de la Pénide

Notice Charmensac (15) – Le Suc de Lermu

Notice Bègues (03) – Oppidum de Bègues

Notice Corent (63) – Oppidum de Corent

Notice Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole

Notice La Roche-Blanche (63) – Oppidum de Gergovie