Vercingétorix, le plus célèbre des Arvernes

Vercingétorix, le plus célèbre des Arvernes : article publié dans « L’Archéologue Archéologie Nouvelle n° 95 avril – mai 2008 » qui nous a aimablement autorisé à le reproduire

Auteur de la notice : Françoise Melmoth

  • I – Que savons-nous de Vercingétorix ?
  • II – Quelles relations Vercingétorix entretint-il avec César avant l’année 52 av. J.-C. ?

I – Que savons-nous de Vercingétorix ?

Vercingétorix, c’est d’abord un nom propre, mentionné chez huit auteurs anciens : César, Tite-Live, Strabon, Plutarque, Florus, Polyen, Dion Cassius et Orose. A part Plutarque (qui l’estropie) et certains manuscrits de Strabon (qui offrent une variante en – rigos), toutes les sources, monnaies comprises, donnent Uercingetorix, « Roi suprême des guerriers », composé du préfixe uer(o), ‘sur-, super-’, de cinget(o)-, ‘guerrier, héros’ et de rix (= riks), ‘roi’, élément le plus fréquent des noms de personnes composés gaulois.

Vercingétorix, place de Jaude à Clermont-Ferrand. Une beaucoup plus grande devait être installée sur le plateau de Gergovie mais le projet a été jugé trop cher.
Vercingétorix, place de Jaude à Clermont-Ferrand. Une beaucoup plus grande devait être installée sur le plateau de Gergovie mais le projet a été jugé trop cher.

Tous les textes évoquent l’ascendance aristocratique de Vercingétorix, issu d’une très grande famille arverne. Son père, Celtill, avait, selon César, exercé un « principat » sur la Gaule et avait été tué par ses compatriotes parce qu’il aspirait à la royauté. Strabon indique que Vercingétorix « provenait » de Gergovie (sa ville natale, la ville dont il était citoyen ?). On ignore sa date de naissance, mais César écrit en 52 av. J.-C. que Vercingétorix est adulescens. Beaucoup ont compris « adolescent » (le mythe en a souvent fait un jeune homme de 17-18 ans), alors que pour les Romains, l’adulescentia est l’âge antérieur à l’exercice des magistratures, lequel est fixé à trente ans. Vingt-sept pièces de monnaie à la légende Vercingétorix nous sont parvenues. Vingt-cinq sont des statères d’or, deux sont en bronze.

On distingue deux « types », d’après la tête qui orne le droit : l’une (série majoritaire) est représentée nue, la seconde porte un casque. Tous les visages sont différents. Si l’on avait voulu représenter un personnage connu, identifiable, correspondant au nom que porte la légende (Vercingetorixs ou Vercingetorixis), un modèle uniforme aurait été imposé. Il ne s’agit donc pas du « portrait » de Vercingétorix, mais probablement du dieu Apollon, issu de l’imitation des statères macédoniens. Le casque est ajouté à la tête d’Apollon, non à celle du chef arverne.
A quoi ressemblait physiquement Vercingétorix ? La représentation « traditionnelle » du héros moustachu, aux cheveux longs flottant sur les épaules, est née sous Napoléon III.

Elle s’appuie sur des textes tels que ceux de Diodore, Strabon et César, qui continuent à véhiculer une image stéréotypée des Gaulois remontant à l’époque des migrations celtiques en Italie. Nous disposons aujourd’hui de sources, totalement inconnues au XIXème siècle, qui montrent une évolution de l’iconographie sur près de cinq siècles. Vers 475-450 av. J.-C., un prince ou un roi celte porte barbe et moustache (statue de Glauberg, près de Stuttgart). Il les conservera pendant environ deux siècles. Puis, il ne portera plus que la moustache (le Gaulois mourant de Pergame, un Galate ou Celte d’Asie Mineure de la seconde moitié du IIIème siècle av. J.-C.).

A partir de la fin du IIème siècle av. J.-C., les deniers gaulois (monnayage d’argent frappé en Gaule) présentent pour la première fois une iconographie réaliste, des personnages soit en pied soit en buste, parfois accompagnés de leur nom (ou du nom du magistrat monétaire, à supposer que ce ne soit pas le même).

Vercingétorix après plusieurs années de captivité, hirsute et maigre...d'après un denier romain avec un profil attribué à Vercingétorix (image texture 2D du visage reconstruit avec l'intelligence artificielle de StyleGAN2 
paramétrée par David ROMEUF.)
Vercingétorix après plusieurs années de captivité, hirsute et maigre…d’après un denier romain avec un profil attribué à Vercingétorix (image texture 2D du visage reconstruit avec l’intelligence artificielle de StyleGAN2
paramétrée par David ROMEUF.)

Sur un denier d’argent éduen, par exemple, on observe qu’il n’y a plus de moustache. En outre, la chevelure est particulièrement soignée. A cela s’ajoute le texte de César, lors de sa première expédition en Bretagne (l’Angleterre) : il écrit que les habitants de l’île « portent les cheveux pendants et se rasent complètement, sauf la tête et la lèvre supérieure ». Autrement dit, ils ne se coiffent pas les cheveux et ils portent la moustache, ce que ne font plus les Gaulois. Vercingétorix était donc probablement glabre et devait porter une chevelure élaborée, avec des boucles et des mèches savamment coiffées. La panoplie militaire de Vercingétorix, telle que la montrent les tableaux et gravures du XIXème siècle, mêle des pièces qui s’échelonnent chronologiquement de l’âge du Bronze au Moyen Age.

On sait aujourd’hui que Romains et Gaulois devaient être armés à peu près de la même manière. Comme tous les aristocrates de son temps, Vercingétorix combattait à cheval (la taille moyenne des chevaux au garrot dépassait rarement 130 à 135 cm), avec une selle (sans étriers) et des éperons. Le harnais des chevaux était très perfectionné et orné. Vercingétorix portait un casque en fer, couvrant la tête, les joues (protège-joues) et la nuque. Notons que ce sont les artisans celtiques qui ont lancé, au Vème siècle av. J.-C., la fabrication de ces casques en fer, qui furent adoptés par nombre de peuples. Il n’était pas torse nu (il s’agit d’un mythe ancien) mais portait la cotte de mailles, elle aussi inventée par les artisans celtiques vers la fin du IVe siècle av. J.-C.

Son bouclier était ovale et plat (environ 1,10 m de haut et 50 à 60 cm de large), avec un umbo, protubérance souvent coiffée d’une coque métallique, prolongée par une arête verticale (spina). La lance et l’épée constituaient l’équipement offensif de base de toutes les armées de l’Antiquité. Contrairement aux Romains, équipés d’un glaive (gladius) de forme acérée, les Celtes avaient inventé une longue épée à tranchants parallèles, qui se logeait dans un fourreau en métal.

II – Quelles relations entretint-il avec César avant l’année 52 av. J.-C. ?

Vercingétorix appelant les Gaulois à la défense d’Alaise, François Ehrmann, 1869, Musée d'Art Roger Quillot, Clermont-Ferrand.
Vercingétorix appelant les Gaulois à la défense d’Alaise, François Ehrmann, 1869, Musée d’Art Roger Quillot, Clermont-Ferrand.

Ici, deux témoignages se rejoignent, celui de Dion Cassius et celui d’Orose, qui s’inspiraient d’autres sources que la Guerre des Gaules de César. Pour eux, Vercingétorix est un traître. Christian Goudineau analyse le refus du pardon de César, tel qu’il est soigneusement expliqué chez Dion Cassius, de la façon suivante : « Vercingétorix avait été non pas dans l’amitié de César, mais en amitié avec César : ils avaient accompli tous les gestes, prononcé les serments, s’étaient mutuellement engagés.

Or, Vercingétorix a fait une « antitaxis », un mot qui relève du langage militaire : on oppose une armée rangée en ordre de bataille. La traduction « rébellion » ne rend pas toute la force de l’expression. De même, le mot « trahison » rend imparfaitement « adikia » : c’est la rupture de la parole donnée, le déni de ce qui est juste et consacré, le plus grave des crimes. » Christian Goudineau écrit par ailleurs : « Orose place dans la bouche de Vercingétorix des paroles épouvantables : il a pris en personne la responsabilité de rompre le traité (celui qui unissait Rome aux Arvernes) et il se reconnaît responsable d’un immense forfait, d’un crime considérable : auctorem magnis sceleris. » Pourquoi Vercingétorix a-t-il causé tant de difficultés à César en 52 ? Parce qu’il a appliqué les principes qu’il avait appris auprès de lui. Donc, selon Christian Goudineau, « Vercingétorix fut aux côtés de César pendant une bonne partie de la guerre des Gaules, peut-être dès le début. A quel titre ? Sans doute en tant que chef du contingent arverne, un corps de cavaliers, que le proconsul avait dû réquisitionner aux termes du traité de 122 ou 121.

On peut même supposer qu’il fit partie des conturbernales, les « compagnons de tente », issus de la noblesse romaine ou gauloise, qui entourent César, discutent avec lui, l’écoutent avec respect. La question évidente : pourquoi César n’en a-t-il pas dit un mot ? Parce que, s’il l’avait fait, il aurait fallu expliquer au Sénat de Rome que ses collaborateurs gaulois les plus proches le trahissaient, l’abandonnaient. »Le nom de Vercingétorix ne reparaît (chez Plutarque et Dion Cassius) qu’à l’occasion du triomphe que l’ancien proconsul, devenu dictateur de Rome, célébra sur la Gaule six ans plus tard, en septembre 46. Le chef arverne y figura. Après quoi, il est exécuté.

Pour en savoir plus : Christian Goudineau, Le dossier Vercingétorix, Actes Sud / Errance, 2001, 346 p., 18 x 24 cm, br., illustré

Les IIIe et IIe s. av. J.-C.en Basse-Auvergne

Les IIIe et IIe s. av. J.-C.en Basse-Auvergne : article publié dans « L’Archéologue Archéologie Nouvelle n° 95 avril – mai 2008 » qui nous a aimablement autorisé à le reproduire.

Auteur de la notice : Y. Deberge, V. Guichard

  • I – Les IIIème et IIème siècles av. J.-C., une phase d’expansion de la ferme indigène en Limagne Clermontoise
  • II – Un resserrement de l’habitat rural au Ier siècle av. J.-C

« Tout le reste de la Gaule produit du blé et en grande quantité, ainsi que du millet, du gland et du bétail de toute espèce, le sol n’y demeurant nulle part inactif, si ce n’est dans les parties où les marécages et les bois ont absolument interdit toute culture »

Strabon, Géographie, livre IV, I2
Les IIIe et IIe s. av. J.-C.en Basse-Auvergne. Carte d’occupation des sols à la période laténienne dans le bassin de Clermont-Ferrand (document : Y. Deberge)
Carte d’occupation des sols à la période laténienne dans le bassin de Clermont-Ferrand (document : Y. Deberge)

Depuis plusieurs décennies, la Limagne clermontoise fait l’objet d’une intense activité de prospection archéologique.

L’objectif est de connaître l’évolution de l’occupation de cet espace naturellement très fertile.

Cumulés aux nombreuses observations de l’archéologie préventive, ces travaux révèlent une extraordinaire concentration de population dans cette plaine humide à la période laténienne.

Les IIIe et IIe s. av. J.-C.en Basse-Auvergne. Entre Varennes et les Monts Dômes, la Limagne clermontoise
Entre Varennes et les Monts Dômes, la Limagne clermontoise

I – Les IIIe et IIe s. av. J.-C.en Basse-Auvergne : une phase d’expansion de la ferme indigène en Limagne Clermontoise

Les IIIe et IIe s. av. J.-C.en Basse-Auvergne.  L’opération d’archéologie préventive A 710, conduite sur un transect de 7 km de long, a été l’occasion d’observer l’évolution des paysages de Limagne au cours de l’Holocène (cliché V. Guichard)
L’opération d’archéologie préventive A 710, conduite sur un transect de 7 km de long, a été l’occasion d’observer l’évolution des paysages de Limagne au cours de l’Holocène (cliché V. Guichard)

Avant cette période, la Limagne connaît une occupation fluctuante avec une première phase de colonisation, au début du premier âge du Fer, suivie d’un net repli de l’habitat sur les zones de piémonts et de hauteurs. Il faut attendre le début du IIIème siècle av. J.-C. Pour que l’habitat se fixe de façon durable en Limagne. Cette implantation se fait d’abord selon un maillage relativement lâche, comme aux époques antérieures. Certaines occupations anciennes sont même « réactivées ». Au siècle suivant, la plaine est alors couverte d’un réseau dense de fermes qui se répartissent, approximativement, tous les kilomètres.

Comme ailleurs en Gaule, ces sites ruraux sont caractérisés par la présence d’un ou plusieurs enclos fossoyés dans lesquels sont les structures domestiques, des bâtiments d’habitation, et celles nécessaires à l’activité agricole, des greniers, des granges, des espaces de parcage… Ces espaces enclos paraissent, à l’image de nos fermes actuelles, correspondre au cœur des exploitations agricoles. Derrière une apparente uniformité, on perçoit en réalité une certaine variabilité dans l’organisation interne de ces établissements.

Les éléments mobiliers découverts peuvent être également très divers, en quantité et qualité, d’un site à l’autre. Ces différences traduisent l’existence d’une hiérarchisation que l’on peine encore à mettre en évidence en l’absence de fouilles systématiques et de grande ampleur. La grande majorité des sites peut être identifiée à des fermes dont la principale, sinon la seule activité est l’agriculture. La taille à associer à chacun de ces domaines est, selon un calcul théorique, comprise entre 100 et 200 hectares. La mise en évidence de nombreuses limites parcellaires, principalement des fossés, montre un découpage poussé de l’espace agricole.

Les IIIe et IIe s. av. J.-C.en Basse-Auvergne. Poteau en bois, daté de la seconde moitié du IIe s. av. J.-C., ayant appartenu à une construction à ossature de bois 
Fouilles A 710. Cliché : V. Guichard
Poteau en bois, daté de la seconde moitié du IIe s. av. J.-C., ayant appartenu à une construction à ossature de bois
Fouilles A 710. Cliché : V. Guichard

L’hypothèse d’une vaste entreprise de drainage de la plaine est envisageable compte tenu du nombre et de l’orientation cohérente de ces structures, principalement des fossés, avec l’axe de drainage naturel de la plaine, globalement ouest-est. Aux IIIème et IIème siècles av. J.-C., la plaine de Limagne est le domaine de la céréaliculture et de l’élevage. C’est un milieu ouvert où la forêt occupe une place très faible.

Les champs se présentent sous la forme d’une mosaïque de parcelles en culture ou en prairie. On y cultive principalement les blés nus et vêtus, l’orge, le millet et les légumineuses (pois, lentille). Le porc est élevé sur le secteur d’habitat, entre autres pour ses qualités d’éboueur, le mouton pour sa viande et ses sous-produits, le bœuf pour sa force de travail.

Signe d’une mobilisation importante de la plaine, les structures parcellaires sont particulièrement nombreuses 
Fouilles A 710. Cliché : V. Guichard
Signe d’une mobilisation importante de la plaine, les structures parcellaires sont particulièrement nombreuses
Fouilles A 710. Cliché : V. Guichard

II – Un resserrement de l’habitat rural au Ier siècle av. J.-C

Restitution de la campagne de la Limagne clermontoise
Restitution de la campagne de la Limagne clermontoise

On observe au Ier siècle av. J.-C., comme ailleurs en Gaule, un déficit documentaire quasi généralisé pour l’ensemble de la plaine de Limagne et ses abords. L’hypothèse de biais méthodologiques conduisant à un tel phénomène peut être écartée. Les travaux d’archéologie conduits ces dernières années sur ce territoire montrent que ce déficit documentaire observé pour le Ier siècle av. J.-C. Renvoie, sans doute possible, à une réalité archéologique et historique. La plaine, si densément occupée au siècle précédent, paraît se vider de plus des deux tiers de ses occupants. Le phénomène, à la fois massif et rapide, est contemporain avec l’abandon de l’agglomération ouverte d’Aulnat. Quelques sites restent occupés au Ier siècle, mais ils relèvent plus de l’exception que de la règle. Les études géomorphologiques conduites dans la Limagne permettent d’écarter l’hypothèse d’une augmentation de la contrainte liée au caractère naturellement humide de la plaine au Ier siècle. Le nombre d’implantations humaines va d’ailleurs sans cesse croissant sur la longue durée, depuis La Tène moyenne jusqu’au Haut-Empire, avant de reculer seulement à partir du Bas-Empire.

La désaffection de la plaine observée pour le Ier siècle av. J.-C. apparaît donc comme un« accident », dans une phase de densification de l’habitat rural qui commence au IIIème siècle av. J.-C. pour ne s’achever qu’au début du Bas-Empire. Ce recul de l’habitat en plaine ne prend pas la forme d’une désertion totale et définitive. Quelques sites demeurent occupés et le seront toujours bien après le changement d’ère.

Traces parcellaires et occupation du sol en Limagne clermontoise
Traces parcellaires et occupation du sol en Limagne clermontoise

Le réseau de fossés installé au IIème siècle est également ponctuellement marqué par une certaine forme de pérennisation qui se traduira par une reprise, à la période gallo-romaine, des orientations définies à La Tène lors de l’implantation de nouvelles structures de délimitation et de drainage. Loin de constituer une période d’abandon total, cette phase de recul de la ferme en Limagne a probablement été l’occasion d’une restructuration de la propriété par un phénomène de concentration foncière qui n’a, selon toute vraisemblance, profité qu’aux plus riches. Les dépôts mobiliers découverts dans les tombes du site de Chaniat à Malintrat révèlent ainsi un enrichissement considérable de la classe dirigeante, qui se fait enterrer sur ses terres, à une période pourtant marquée par un resserrement de l’habitat en Limagne.

Ensemble funéraire aristocratique du Ier s. découvert sur le site de Chaniat à Malintrat . Fouilles A 710. Cliché : V. Guichard
Ensemble funéraire aristocratique du Ier s. découvert sur le site de Chaniat à Malintrat . Fouilles A 710. Cliché : V. Guichard

Grâce aux nombreux travaux qui y sont conduits depuis plus de 20 ans, le mode d’occupation de la Limagne clermontoise est aujourd’hui bien perçu. Cet espace agricole, intensément exploité aux IIIème et IIème siècles av. J.-C., paraît être le « grenier à blé » des Arvernes. Reste que la campagne arverne ne se limitait pas, à la période gauloise, à ce seul espace. Notre connaissance des zones de buttes et de montagne, qui représentent pourtant plus de 90 % du territoire arverne, est très largement déficitaire. Ces espaces, aujourd’hui à l’écart des principales zones d’activité économique, font rarement l’objet d’investigations archéologiques. Les travaux préventifs conduits dernièrement dans ces secteurs, dans la zone des Combrailles notamment (opération autoroutière A89), semblent toutefois indiquer que l’occupation y est nettement moins dense qu’en Limagne. Le gros de la population se concentrait, il y a 2 200 ans comme aujourd’hui, dans la zone de plaine, aux abords de l’agglomération d’Aulnat.

Évocation de la Limagne clermontoise à la période gauloise. Illustration : M. Gontier
Évocation de la Limagne clermontoise à la période gauloise. Illustration : M. Gontier
Occupation du IIe s. av. J.-C. (premier plan à gauche) et gallo-romaine (second plan à droite) du site de Chaniat à Malintrat
Fouilles A 710. Cliché : V. Guichard
Occupation du IIe s. av. J.-C. (premier plan à gauche) et gallo-romaine (second plan à droite) du site de Chaniat à Malintrat
Fouilles A 710. Cliché : V. Guichard

Salettes (43) – Le Camp d’Antoune

Type de projet : fouille programmée (« Salettes (43) – Le Camp d’Antoune »)

Conduite du projet : Association pour la Recherche sur l’âge du Fer en Auvergne

Date : 2008

Responsable de l’opération : Marie-Caroline Kurzaj

Notice et documents : Marie-Caroline Kurzaj

I – Salettes (43) – Le Camp d’Antoune. Présentation

Le camp d’Antoune se situe sur la commune de Salettes, dans le sud-est du département de la Haute-Loire.

Salettes (43) – Le Camp d’Antoune. C’est un site de hauteur d’une quinzaine d’hectares, implanté à plus de 1000 m d’altitude et surplombant la vallée de la Loire
Salettes (43) – Le Camp d’Antoune. Le Camp d’Antoune, vue du sud (M.-C. Kurzaj / ARAFA).
Salettes (43) – Le Camp d’Antoune. Occupé dès la fin du IIe et au cours du  Ier s. av. J.-C., il est l’un des habitats principaux des Vellaves, peuple client des Arvernes et frontalier de la province romaine de Transalpine à partir de 118 av. J.-C
Salettes (43) – Le Camp d’Antoune. Localisation générale du Camp d’Antoune (M.-C. Kurzaj / ARAFA).

C’est un site de hauteur d’une quinzaine d’hectares, implanté à plus de 1000 m d’altitude et surplombant la vallée de la Loire.

Occupé dès la fin du IIe et au cours du Ier s. av. J.-C., il est l’un des habitats principaux des Vellaves, peuple client des Arvernes et frontalier de la province romaine de Transalpine à partir de 118 av. J.-C.

Connu depuis la fin du XIXe s., ce site a fait l’objet de plusieurs investigations au cours du XXe s. Elles ont permis de mettre en évidence une occupation de la fin du second âge du Fer. Toutefois ces données étant trop lacunaires, de nouvelles observations ont été réalisées depuis 2007, afin de préciser l’organisation et la chronologie de ce site de hauteur. Le camp d’Antoune est un des rares sites de Haute-Loire à avoir conservé en élévation son système défensif en pierres sèches (blocs de basaltes). Il s’agit d’un rempart discontinu, qui s’interrompt là où les falaises abruptes ne nécessitent pas sa présence.

Salettes (43) – Le Camp d’Antoune. Connu depuis la fin du XIXe s., ce site a fait l’objet de plusieurs investigations au cours du  XXe s. Elles ont permis de mettre en évidence une occupation de la fin du second âge du Fer. Toutefois ces données étant trop lacunaires, de nouvelles observations ont été réalisées depuis 2007, afin de préciser l’organisation et la chronologie de ce site de hauteur. Le camp d’Antoune est un des rares sites de Haute-Loire à avoir conservé en élévation son système défensif en pierres sèches (blocs de basaltes). Il s’agit d’un rempart discontinu, qui s’interrompt là où les falaises abruptes ne nécessitent pas sa présence
Salettes (43) – Le Camp d’Antoune. Les principaux sites de la fin du second âge du Fer du Velay (M.-C. Kurzaj / ARAFA).

I – Salettes (43) – Le Camp d’Antoune. Le rempart

C’est dans le secteur nord que celui-ci est le mieux conservé et son organisation la plus connue. Un petit rempart d’un mètre de haut précède un profond fossé, à partir duquel se développe le rempart monumental présentant encore aujourd’hui, plus de 12 m d’élévation. Ce dernier est organisé en deux tronçons. Le premier est observable sur environ 120 m de long, d’ouest en est. Puis il marque brusquement une courbe en direction du sud-est et s’interrompt.

A environ 8 m au nord-est de celui-ci, un nouveau tronçon débute selon un tracé rectiligne nord/ouest-sud/est, et que l’on peut suivre sur une longueur d’environ 240 m. A l’emplacement de l’interruption du tronçon nord se trouvait une excavation attribuable aux investigations d’A. Boudon-Lashermes dans les années 1950. L’opération de 2008 s’est en partie concentrée à cet endroit.

La rectification de la coupe de cet ancien sondage a permis l’identification du parement de la porte d’accès au site. Il est composé d’un appareillage de prismes basaltiques.

La datation de cette construction monumentale a pu être entrevue grâce à la présence de quelques fragments de céramique datés entre la fin du IIeme et le début du Ier s. av. J.-C. La forme de cette porte, « en chicane », se retrouve sur plusieurs oppida de Gaule indépendante.

C’est dans le secteur nord que celui-ci est le mieux conservé et son organisation la plus connue. Un petit rempart d’un mètre de haut précède un profond fossé, à partir duquel se développe le rempart monumental présentant encore aujourd’hui, plus de 12 m d’élévation. Ce dernier est organisé en deux tronçons. Le premier est observable sur environ 120 m de long, d’ouest en est. Puis il marque brusquement une courbe en direction du sud-est et s’interrompt
Salettes (43) – Le Camp d’Antoune. Secteur nord, organisation du système défensif (M.-C. Kurzaj / ARAFA).
A environ 8 m au nord-est de celui-ci, un nouveau tronçon débute selon un tracé rectiligne nord/ouest-sud/est, et que l’on peut suivre sur une longueur d’environ 240 m. A l’emplacement de l’interruption du tronçon nord se trouvait une excavation attribuable aux investigations d’A. Boudon-Lashermes dans les années 1950. L’opération de 2008 s’est en partie concentrée à cet endroit.
Salettes (43) – Le Camp d’Antoune. Organisation de la fortification du Camp d’Antoune (M.-C. Kurzaj / ARAFA).

I – Occupation à l’intérieur de la fortification

Concernant l’organisation de l’occupation à l’intérieur de la fortification, les données sont encore trop lacunaires pour en dresser les caractéristiques. Aucun autre vestige en élévation n’a encore pu être identifié en raison de la densité de la végétation. Par contre, les éléments découverts dans les autres sondages réalisés en 2008 sur le plateau, ont permis, d’après le mobilier récolté, de confirmer la présence d’une occupation de la fin du second âge du Fer.

Malgré la réalisation de nouvelles investigations, l’occupation du camp d’Antoune reste encore méconnue.

Pourtant sa connaissance tient une place importante dans les problématiques concernant les relations entre le monde méditerranéen et les Arvernes. Sa position géographique lui confère un rôle particulier puisqu’il est implanté à l’interface d’influences du monde méditerranéen et de Gaule indépendante. Ceci est renforcé par le fait qu’il se situe, à partir de la fin du IIeme s. av. J.-C, à la frontière de la province romaine de Transalpine. Implanté à proximité d’un axe de circulation entre les peuples Helvien et Arverne, il a sans doute été un lieu de rupture de charge au sein des réseaux commerciaux de cette période.

La poursuite des investigations de terrain apportera sans doute des éléments de réponse à ces différents questionnements.

La rectification de la coupe de cet ancien sondage a permis l’identification du parement de la porte d’accès au site. Il est composé d’un appareillage de prismes basaltiques
Salettes (43) – Le Camp d’Antoune. Parement de prismes basaltiques de la porte du Camp d’Antoune (M.-C. Kurzaj / ARAFA).

Les Gaulois

Les Gaulois : auteur de la notice : Y. Deberge, 2008

I – Les Gaulois. La société

Elle est essentiellement agricole. Le lin comme le chanvre sont cultivés et servent à la fabrication des tissus. Les myrtilles, le pastel ou l’airelle sont employés pour la teinture, car les Gaulois aiment les couleurs vives. Pour l’alimentation, les cultivateurs produisent du blé amidonnier (riche en amidons), de l’orge, des lentilles et des pois. Ces céréales sont consommées en bouillies et galettes, parfois agrémentées de raisins secs, de dattes ou de noix.


A sa tête, se trouve une aristocratie terrienne. Celle-ci est en relation constante avec l’ensemble du monde celtique qui possède une certaine homogénéité même s’il est composé d’une multitude de tribus indépendantes les unes des autres. Mais au début du Ier siècle avant J.-C., l’intensification des relations commerciales avec le Monde Méditerranéen va favoriser l’émergence d’une nouvelle catégorie sociale. Il va s’ensuivre une relative décadence de cette aristocratie terrienne, au moins sur le plan politique.


Les druides sont des personnages importants de la société celte et paraissent avoir été au cœur de la religion. Chefs religieux, recrutés dans la noblesse, ils règlent les pratiques cultuelles et président aux sacrifices… En outre, ils occupent des fonctions juridiques et sont chargés de l’éducation des jeunes nobles et de la transmission des épopées. Les druides forment un « clan » avec, au sommet, un chef élu.


II – Les Gaulois. La maison

Dans toute l’Europe Continentale, la maison gauloise est de plan rectangulaire ou carré, en torchis, bois et chaume. Autour de l’habitation, des bâtiments spécialisés accueillent les activités agricoles et artisanales qui s’organisent généralement autour d’un puits, d’un grenier et d’un silo.

Les Gaulois. Gandaillat (Document : L. Andrieu)
Gandaillat (Document : L. Andrieu)

A la fin de la période, une structure défensive, constituée d’une levée de terre, est mise en place. On appelle ces sites des oppida : ils peuvent être « de hauteur », protégés par des remparts ; ou « de plaine » comme à Gondole, Etrun ou à Avesnelles (Nord). Les techniques de construction sont identiques à celles des périodes précédentes : des poteaux de bois sont érigés verticalement et calés dans des trous creusés dans le sol. Ils sont reliés entre eux par des poutres et des chevrons.


Cependant, la métallurgie du fer amène une innovation : il s’agit des clous qui donnent une plus grande solidité aux bâtiments. Les parois sont constituées d’un clayonnage de baguettes souples que vient recouvrir le torchis. Les toitures, à 2 ou 4 pans, sont couvertes de paille de roseau. C’est leur forte pente et l’épaisseur du chaume qui garantissent une bonne étanchéité. Les Gaulois utilisent l’herminette, le burin, la lime, le ciseau à bois, la gouge et la hache. Cet outillage en fer permet de multiples assemblages : assemblages en feuillure, à mi-bois et en queue d’aronde.

III – Occupation du sol au IIIe et IIe s. avant J.-C. en Basse-Auvergne

Jusqu’à récemment, nous ne disposions en Basse-Auvergne que de peu de données pour caractériser la trame d’occupation laténienne. Les quelques opérations de fouille entreprises dans la périphérie clermontoise conduisaient à proposer un modèle faisant intervenir des communautés humaines de petite taille de type hameau, régulièrement réparties et qui se seraient partagé la mise en valeur agricole de cette zone très fertile qu’est la plaine de Grande Limagne.

Les Gaulois. La ferme du Patûral (Document : L. Andrieu)
La ferme du Patûral (Document : L. Andrieu)

L’existence d’un peuplement rural dense mais éclaté expliquait, selon ce modèle, l’absence d’établissements ruraux plus modestes de type « ferme » (mode de mise en valeur agricole très largement répandu en Gaule (voir le n° XX de la revue l’archéologue) et à l’opposé celle d’une agglomération importante.

La multiplication des opérations de fouilles préventives dans ce secteur et sur ses marges permet de nuancer considérablement les connaissances sur le sujet et entraîne une remise en cause partielle du modèle proposé précédemment. En Auvergne, comme ailleurs en Gaule, l’établissement rural de “base” correspond à un site dont la caractéristique principale est d’être ceint d’un enclos fossoyé de petite dimension (souvent moins de 5 000 m²) au sein duquel sont regroupés les vestiges relevant de la sphère domestique ou agricole (fosses, puits, greniers, bâtiments d’habitation). Les objets découverts sur ces sites sont souvent peu nombreux (de 100 à 300 récipients céramiques, une dizaine d’éléments de parure, quelques fusaïoles et meules à grain) et témoignent de la présence sur les lieux d’une communauté humaine de type familial.


Les activités sont principalement la production agricole (culture maraîchère, céréaliculture et élevage) et la transformation de ses produits (mouture des céréales, filage et plus rarement tissage des fibres textiles…). Les différences de statut entre ces établissements agricoles se signalent par la qualité et surtout la quantité de mobilier de provenance indigène (vaisselle céramique, accessoires de cuisson, armement) et surtout par le nombre d’éléments de prestige tels que les objets de parure, la vaisselle d’importation méditerranéenne et les amphores vinaires italiques.


Certains sites livrent des quantités de mobiliers (plusieurs milliers de récipients céramiques, plusieurs centaines d’objets de parure…) qui sont peu compatibles avec l’identification à une simple ferme (voir l’encart sur le site du « Pâtural »). Même s’ils semblent toujours largement tournés vers l’agriculture, ils témoignent de l’existence en leur sein d’activités artisanales développées (manufacture d’objets en fer ou en verre, tabletterie…) et d’une implication forte dans les échanges à plus ou moins longue distance (monnaies, vaisselle d’importation, matière brute – fer et verre – importée).


Une estimation de population faite pour le « Pâtural » nous conduit à restituer une population d’environ 150 personnes (une quinzaine de familles ?) ce qui fait de ce site, à la fin du IIème siècle av. J.-C., un véritable hameau villageois.


Le complexe « d’Aulnat / La Grande Borne » en périphérie est de Clermont-Ferrand, témoigne d’un mode d’occupation du sol que l’on ne retrouve nulle part ailleurs en Limagne. Sur une bande de terrain large de 500 m sur 2 km de longueur sont concentrés, de façon plus ou moins dense selon les secteurs, des vestiges mobiliers et immobiliers renvoyant aux domaines domestique, artisanal, funéraire et religieux. Il ne semble pas, en l’état actuel des connaissances, exister de spécialisation des espaces et l’on retrouve intimement mêlés des vestiges appartenant aux sphères profanes et religieuses.


Seul le site du “Brézet” situé à l’extrémité est de ce vaste complexe paraît témoigner d’une utilisation plus spécifiquement religieuse. Cette description d’une vaste agglomération où sont regroupés les vestiges d’activités qui généralement s’excluent (notamment les zones funéraires et domestiques) correspond assez bien au terme de Némessos (littéralement le « bois sacré ») utilisé par les Arvernes pour désigner leur capitale (Strabon, Géographie, livre IV).

Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi

Type de projet : fouille programmée (« Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi »)

Conduite du projet : Association pour la Recherche sur l’âge du Fer en Auvergne

Date : 2003-2009

Responsable : David Lallemand

Notices et documents : David Lallemand

I – Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi. Présentation

Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi . L’oppidum est situé à près de 1,5 km au nord-ouest du bourg de Hérisson. (Nord-ouest du département de l’Allier).
À la fin de la période gauloise, la forteresse appartient aux Bituriges Cubi
Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi. Vue générale de l’oppidum (D. Lallemand / ARAFA).

L’oppidum de Cordes-Chateloi est situé à près de 1,5 km au nord-ouest du bourg de Hérisson. (Nord-ouest du département de l’Allier).

À la fin de la période gauloise, la forteresse appartient aux Bituriges Cubi dont la capitale, Avaricum (Bourges), est distante de 67 km. Cette place centrale est implantée sur une importante voie reliant la capitale des Arvernes à celles des Bituriges.

Le site de la ville gauloise fait l’objet d’un important programme de recherche archéologique depuis 2001, projet soutenu par l’État (DRAC/SRA), le Conseil régional d’Auvergne-Rhône-Alpes, le Conseil Départemental de l’Allier, la Communauté de communes du Pays de Tronçais et la Municipalité de Hérisson.

La forteresse gauloise, d’une superficie de 75 ha, occupe un promontoire qui surplombe la pittoresque vallée de l’Aumance, à 25 km au nord-est de Montluçon. Ses puissantes fortifications sont encore visibles sous la forme d’une imposante levée de terre longue de 800 m.

Le programme de recherche en cours constitue la première étude méthodique de cet important site du Ier s. av. J.-C. implanté sur la bordure sud-est du territoire des Bituriges Cubi.

II – Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi. Le plateau de « Babylone »

Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi. Après un nettoyage soigné de la surface décapée, l’intervention a consisté au dégagement de vestiges archéologiques enfouis sous un amoncellement de grosses pierres. Sous ce puissant éboulis  ont été mis au jour les restes d’un mur construit avec des blocs taillés et un dallage monumental.
Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi. Le mur monumental (D. Lallemand / ARAFA).

La fouille conduite à partir de 2003 est localisée sur le revers d’un petit promontoire naturel qui, depuis sa position, domine tout l’intérieur du site fortifié. Le talus massif gaulois, dans lequel est implantée la fouille, vient s’appuyer sur la partie orientale de ce plateau. Cette fouille a porté en priorité sur les vestiges monumentaux découverts dans le revers du plateau.

Après un nettoyage soigné de la surface décapée, l’intervention a consisté au dégagement de vestiges archéologiques enfouis sous un amoncellement de grosses pierres. Sous ce puissant éboulis (à gauche sur la photo), ont été mis au jour les restes d’un mur construit avec des blocs taillés et un dallage monumental.

L’étape suivante a consisté à dégager l’ensemble des pierres taillées qui semblaient correspondre au parement effondré du mur monumental. Ce travail achevé, nous avons pu confirmer que ceux reposant sur la voirie sous-jacente, étaient tous taillés et appartenaient bien au parement monumental effondré.

Les blocs du mur sont empilés sans ciment comme nous pouvons le voir sur le cliché. La règle du couvre-joint n’est pas non plus appliquée pour ce mur. À l’issue de cette étape de la fouille, sont apparus l’intégralité des vestiges : mur monumental et voie dallée.

III – Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi. Le mur monumental

Très original dans sa conception, cet ouvrage épouse une pente très accentuée : la déclivité s’étalonne à près de 14,8 % ! Ce mur n’est pas seulement formé d’un parement, Il compte également, dans sa structure, un agglomérat de pierres informes situé en arrière des blocs taillés. Nous avons dégagé le sommet de cet empierrement sur environ 8 m pour connaître ses dimensions et pour comprendre sa structure.

Il mesure près de 2 m de large et se prolonge le long des alignements de blocs monumentaux. Son rôle semble donc lié à la stabilité de l’ouvrage final : épauler et amortir les poussées du parement La quantité de pierres utilisée pour cet empierrement est énorme, ce qui souligne encore l’intérêt apporté à cette construction. Nous estimons à plus de 15 m³ le volume de pierres rapportées pour le transect étudié !

Là encore, la fouille a montré l’utilisation de blocs dépassant le quintal !

Depuis les pavés situés dans la partie centrale de la fouille et jusqu’à ceux en limite de la fouille, le dénivelé ouest-est relevé atteint presque 0,50 m sur les 5,60 m de voirie, soit une pente de 8 %.

Il existe également une déclivité nord-sud pour ce dallage, dont le dénivelé oscille entre 0,05 et 0,12 m (soit une pente moyenne d’environ 2 %).

Remarques sur la technique de construction

Concernant le mur, la pente sévère observée et la technique de construction employée expliquent très naturellement son basculement vers le sud-est, en fait, vers l’intérieur de l’ouvrage monumental. Les blocs de la seconde assise ont glissé et ont basculé vers l’intérieur du site sous le poids des matériaux accumulés en arrière des vestiges, le tout dans le respect des lois de l’apesanteur.

À vrai dire, il semble que l’on doive la sauvegarde en élévation de ce mur au poids des blocs monumentaux, à l’orientation transversale des vestiges par rapport au talus massif, enfin à la faible accumulation des matériaux recouvrant ces vestiges. Signalons d’ailleurs que seules deux assises sont conservées en élévation. Il faut avouer que les plans de cet ouvrage sont en complète contradiction avec les règles de principe de la construction gallo-romaine : construction dans la pente, asymétrie des assises, absence de couvre-joints, telles sont quelques-unes des anomalies relevées’ Cependant, il faut admettre que cette construction a été planifiée, calculée et réfléchie. Nul doute que des plans ont été suivis pour son édification. L’existence du glacis taillé dans le substrat suggère aussi que la construction de l’ouvrage monumental a nécessité des aménagements préliminaires : terrassement, nivellement. En outre, La voirie dallée a été installée dans une tranchée de fondation, laquelle est nettement visible à la hauteur du glacis taillé dans le substratum.

IV – Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi. La voie dallée

La bordure sud du dallage a été découverte dès la phase de décapage, provoquant de grandes émotions. Ne subsiste que la partie nord de cette voirie (notamment les pierres bordières jouxtant un glacis taillé dans le substrat).

La partie méridionale de la voie a disparu, arrachée sans doute pour la réutilisation des dalles à d’autres fins.

Nous estimons que cette voie devait dépasser 5 m de largeur d’après nos premiers travaux !

Les dalles du summum dorsum reposent apparemment sur un cailloutis, qui pourrait être le rudus ou ruderatio des voies romaines. Cette construction sophistiquée et réfléchie complète l’ouvrage monumental. Toutes ces remarques démontrent donc que les techniques de construction employées, si elles ne sont pas parfaites, s’inspirent indubitablement de modèles exotiques, vraisemblablement méridionaux.

La bordure sud du dallage a été découverte dès la phase de décapage. Ne subsiste que la partie nord de cette voirie (notamment les pierres bordières jouxtant un glacis taillé dans le substrat).
La partie méridionale de la voie a disparu, arrachée sans doute pour la réutilisation des dalles à d’autres fins.
Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi. Mur et voie dallée (D. Lallemand / ARAFA).

V – Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi. Un murus gallicus sous les vestiges monumentaux

Nous avons observé que le mur monumental avait tronqué les vestiges d’un état antérieur. Une partie même de l’éboulis intra-muros masquait une partie de ces vestiges. Une limite transversale stricte est alors apparue, formant l’assise d’un petit parement de blocs calibrés. Le nettoyage attentif nous a cependant apporté des données pour interpréter ces vestiges.

Nous pouvons envisager que ces vestiges ont été délaissés, abandonnés, puis très vite recouverts et oubliés, au point qu’ils nous sont parvenus dans un état de conservation exceptionnel. L’éboulement de la porte et l’édification du talus massif en sont peut-être éventuellement des causes. Ajoutons qu’il est probable que la porte n’ait pas fonctionné après sa phase monumentale.

Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi. Angle du bastion construit avec la technique gauloise du murus gallicus (à l’image de la description donnée par J. César en 52av. J.-C.) Il n’existe pas en Europe de mur gaulois conservé de cette manière (ici, 2 m de hauteur)
Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi. Angle du bastion construit avec la technique gauloise du murus gallicus (à l’image de la description donnée par J. César en 52av. J.-C.) Il n’existe pas en Europe de mur gaulois conservé de cette manière (ici, 2 m de hauteur) ; L’éventualité d’un classement au titre des Monuments Historiques est envisagée, d’autant que ce monument semble bien être contemporain de la Guerre des Gaules (58 / 52 av. J.-C.) (D. Lallemand / ARAFA).

D’emblée, il faut écarter l’idée d’une construction de type murus gallicus pour cet ouvrage. Nous n’avons observé ni poutrage interne ni alvéoles ménagées dans le parement, aucune fiche en fer et de fait, rien n’indiquant que ce mur soit un murus gallicus.

La technique de construction employée reste très originale, et l’on ne peut s’empêcher de la comparer avec celle décrite par César. Si les bois longitudinaux et transversaux sont inexistants en apparence – tout comme les fiches en fer d’ailleurs –, il convient de signaler que le parement de pierres sèches et l’agrégat sont quant à eux bel et bien présents.
Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi. Détail de la construction, les trous correspondent aux emplacements des poutres de bois aujourd’hui disparues (D. Lallemand / ARAFA).

La technique de construction employée reste très originale, et l’on ne peut s’empêcher de la comparer avec celle décrite par César. Si les bois longitudinaux et transversaux sont inexistants en apparence – tout comme les fiches en fer d’ailleurs –, il convient de signaler que le parement de pierres sèches et l’agrégat sont quant à eux bel et bien présents. Cette dualité (agrégat-parement) est effectivement l’une des composantes du murus gallicus.

Les vestiges d’Hérisson restent toutefois hors normes : la largeur de l’agrégat atteint 2 m, alors qu’elle mesure moins d’un mètre dans le classique murus gallicus ; quant-au parement constitué de blocs taillés monumentaux, les références en Europe tempérée celtique sont quasiment inexistantes. En effet, les parements des murus gallicus sont le plus souvent construits avec de petits moellons informes (Bibracte, etc.).

La découverte de fragments de fiches en fer, la mise en évidence de vides entre certains blocs, des traces de poutrages et de traces ligneuses nous ont conduit à soupçonner l’existence d’un mur gaulois de type « murus gallicus ». Ce type d’ouvrage est décrit par César lors du siège de l’oppidum d’Avaricum par les légions romaines en 52 av. J.-C.

Après un nettoyage soigné de la surface décapée, l’intervention a consisté au dégagement de vestiges archéologiques enfouis sous un amoncellement de grosses pierres. Sous ce puissant éboulis (à gauche), ont été mis au jour les restes d’un mur construit avec des blocs taillés et un dallage monumental.

VI – Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi. Synthèse par campagne

Campagne 2005

Campagne 2006

Campagne 2007

Campagne 2008

Campagne 2009

La campagne 2009 « Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi.  » a permis de préciser la topographie du site et des fortifications grâce à la mise en œuvre d’une technique de prospection innovante par balayage laser aéroporté (technique Lidar), tandis que la prospection géophysique extensive a permis de mettre en évidence les traces de constructions très denses sur plus de 3 ha (réseau de voies dallées, îlots d’habitations, sanctuaire). Le volet le plus important de la recherche a néanmoins consisté à entreprendre la fouille intégrale de la principale porte de cette vaste fortification.

Soixante étudiants de différentes universités ont été accueillis sur les fouilles cet été. Après trois campagnes de travail méticuleux qui ont mobilisé chaque année plusieurs dizaines d’étudiants, et le déplacement de centaines de m³ de matériaux, la porte d’entrée de la ville révèle enfin sa physionomie, mais aussi toute son histoire.

Ces résultats parachèvent un programme d’étude débuté en 2001, avec des sondages (2002) et des fouilles de grande ampleur poursuivies ces dernières années (2003, 2005, 2007-2009), ceci grâce au soutien financier de l’État, du Conseil régional d’Auvergne, du Conseil général de l’Allier et de la commune d’Hérisson. Les découvertes sont à la hauteur des dimensions de la forteresse et de sa réputation grandissante chez les spécialistes. Cette porte donnant accès à la ville – passage obligé des chariots, marchands, cavaliers et autres troupes militaires – dispose d’une architecture très originale, à mille lieues de celle que les Romains ont apportée d’Italie il y a 2 000 ans et dont nous suivons encore les règles.

Les remparts gaulois mis au jour à Hérisson associent en effet plusieurs matériaux différents. L’ossature de ces remparts consiste en un assemblage de grandes pièces de bois horizontales entrecroisées (aujourd’hui disparues) assemblées par de grands clous en fer.

La façade des murs est habillée de grands blocs de grès soigneusement taillés, au sein desquels des vides signalent l’extrémité des « tirants » de bois. Cette architecture typique des oppida gaulois avait surpris César lui-même, qui s’était attardé à la décrire sous le nom de murus gallicus, en ajoutant même une appréciation d’ordre esthétique : ce genre de rempart, « n’est pas désagréable à l’œil ».
Les découvertes de Hérisson nous révèlent cette architecture qui avait impressionné le général romain. À l’échelle européenne, les vestiges de cette qualité sur des oppida, avec l’emploi de pierres soigneusement taillées, se comptent sur les doigts d’une main ; mais tous sont d’une conservation bien en deçà de Hérisson.

En 2009 a plus précisément été mis au jour un bastion de 4,5 m de largeur de façade pour 8 m de longueur, entièrement construit avec cette technique purement gauloise. Cet ouvrage limite au sud le large couloir d’accès à la porte. Préservé jusqu’à 2 m de hauteur ce qui constitue un fait unique en Europe, son intérêt réside dans son degré de préservation et la qualité de son bâti. Il associe plusieurs techniques de construction et des dispositifs qui n’ont encore jamais été observés sur d’autres fortifications celtiques. L’utilisation de blocs taillés dans le grès rouge local rehausse le caractère ostentatoire du monument.

Il y a de fortes chances que l’incendie qui a ravagé cette porte monumentale soit lié à l’un des épisodes célèbres contés dans les Commentaires sur la Guerre des Gaules de Jules César.
Hérisson (03) – Oppidum de Cordes-Chateloi. Traces d’incendie (D. Lallemand / ARAFA).

Le couloir d’entrée, large de 7 m, a encore conservé la surface de roulement d’origine, marquée des profondes ornières laissées par le passage répété des chariots. En outre, l’entrée porte les stigmates d’un incendie, sous forme de vestiges de bois carbonisés et de traces de feu sur le sol et les pierres. Les dizaines de clous et diverses traces retrouvées au cours des fouilles appartiennent sans doute aux ventaux de la porte massive qui fermait le couloir. Les empreintes de grands poteaux de bois conservées dans le sol suggèrent également l’existence d’une construction surélevée – un grand porche – qui permettait le contrôle de la circulation.

Il y a de fortes chances que l’incendie qui a ravagé cette porte monumentale soit lié à l’un des épisodes célèbres contés dans les Commentaires sur la Guerre des Gaules de Jules César. Le général romain écrit que vingt villes du peuple gaulois des Bituriges sont incendiées au printemps 52 sur les ordres de Vercingétorix, afin de priver les légions de ravitaillement, alors qu’elles se dirigent vers Avaricum (Bourges). Parmi les vingt villes bituriges à témoigner de ce sacrifice, l’oppidum de Hérisson serait le premier à être reconnu par l’archéologie.

Rares sont les sites qui ont livré des vestiges en rapport direct avec les événements militaires de la guerre des Gaules. On peut seulement citer Gergovia à La Roche Blanche près de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), Alésia à Alise-Sainte-Reine (Côte-d’Or) et Uxellodunum au Puy-d’Issolud (Lot). Hérisson pourrait bien rejoindre cette liste remarquable de sites historiques reconnus d’intérêt national (deux sont classés Monuments Historiques).

Les Paysages

Les Paysages au second âge du Fer : article publié dans « L’Archéologue Archéologie Nouvelle n° 95 avril – mai 2008″ qui nous a aimablement autorisé à le reproduire

Auteurs : Christelle Ballut et Manon Cabanis

  • I – L’attractivité de la Limagne
  • II – Le paysage agricole au second âge du Fer
  • III – Une région sensible aux modifications environnementales

La Limagne clermontoise est le cœur du territoire arverne. La fertilité des sols, la clémence du climat, la voie de circulation naturelle qu’est la vallée de l’Allier et le contact avec les hauts plateaux du Massif central expliquent en grande partie son attractivité. Déjà à l’âge du Fer, sa prospérité repose en partie sur sa richesse agricole.

Les Paysages. Au premier plan la plaine humide, puis Clermont et en arrière plan le plateau des Dômes
Au premier plan la plaine humide, puis Clermont et en arrière plan le plateau des Dômes

Cependant, dès le milieu du second âge du Fer (IIIe-IIe siècles av. J.-C.), l’intensité de l’exploitation des sols a des conséquences sur l’environnement dans cette région sensible aux actions humaines sur les paysages et aux oscillations climatiques.

I – Les Paysages. L’attractivité de la Limagne

C’est dans ce bassin marno-calcaire bordé de hauts plateaux cristallins et volcaniques que les Arvernes ont établi leurs capitales. Il constitue un secteur très attractif à plusieurs égards. La Limagne est couverte de sols bruns à noirs, argilo-limoneux à limono-argileux, riches en éléments minéraux, de meilleure qualité que ceux développés sur les plateaux bordiers. Abrité des influences océaniques par l’orientation méridienne des reliefs occidentaux, ce secteur possède aussi un climat à tendance semi-continentale relativement clément, moins humide et plus doux que celui des massifs environnants. Enfin, la Limagne est parcourue par la vallée de l’Allier qui pénètre le Massif central selon une direction globalement méridienne et qui constitue un axe de communication majeur en assurant un passage entre la France méridionale et la France centrale. Les vallées des affluents de la rivière assurent également à l’échelle régionale le lien entre les hauts plateaux et le bassin intra montagnard.

Les Paysages.

En son sein, la Limagne clermontoise associe deux types de terroirs : la Limagne des Buttes et celle des marais.

  • Le “Pays des Buttes” est formé de reliefs isolés de taille variable, dont les altitudes dépassent fréquemment 500 mètres. Les plus hauts de ces reliefs correspondent à des buttes volcaniques à l’allure tabulaire et aux pentes raides (pouvant atteindre plus de 20 %). Ils ont souvent été choisis pour l’établissement des oppida arvernes (Corent, Gergovie).

  • A l’inverse, la Limagne des marais se caractérise par l’absence de reliefs marqués et par des pentes très faibles, souvent inférieures à 0,1 %. La fertilité des sols, appelés« terres noires », est ici encore plus grande. A noter que les terres de Limagne sont déjà louées pour leur richesse dans les écrits de la fin de l’Antiquité (Sidoine Apollinaire, Grégoire de Tours).

II – Les Paysages. Le paysage agricole au second âge du Fer

D’après les études polliniques (Gachon 1963 ; Prat 2006), les bois en Limagne sont déjà très minoritaires au second âge du Fer. Les surfaces en herbe sont plus étendues dans les fonds de vallée et dans les marais. Les surfaces cultivées s’étendent sur les pentes des collines et buttes de la région et progressent dans la plaine humide grâce à la mise en place de systèmes de drainage.

Les Paysages. Millet des oiseaux (Setaria italica)
Millet des oiseaux (Setaria italica)

Les études de restes de graines et de fruits (études carpologiques), qui se systématisent dans le cadre de l’archéologie préventive INRAP depuis quelques années, autorisent aujourd’hui une ébauche de ces agro-systèmes. Les 12 études carpologiques réalisées à ce jour (Cabanis, thèse en cours de rédaction) sur les opérations INRAP nous dévoilent des champs d’orge vêtue (Hordeum vulgare), de blés vêtus type amidonnier (Triticum dicoccum) et d’engrain (Triticum monococcum). Ces espèces dominent le paysage gaulois de plaine comme dans le reste de la Gaule (Matterne et al. comm. orale AFEAF 2007). Les cultures de froment ou blé nu (Triticum aestivum durum), d’épeautre (Triticum spelta) et d’avoine (Avena sp.) sont également visibles. Mais la Limagne présente aussi des particularités, comme l’abondance et la diversité des millets cultivés dans le secteur de l’ancien lac de Sarliève. Les légumineuses, cultivées le plus souvent en alternance avec les céréales, sont majoritairement la lentille (Lens culinaris) et la vesce (Vicia sativa). Le pois (Pisum sativum), la fève (Vicia faba) et l’ers (Vicia ervilia) ne sont présents qu’en faible quantité. Sur le site de Cournon-Les plaines, nous remarquons l’abondance significative de restes de gaude (Reseda luteola), plante de la famille des Résédacées (Resedaceae), riche en lutéoline, dont on obtient une teinture jaune. Parmi les plantes potentiellement cultivées, cueillies ou récoltées dans un but artisanal ou médicinal, citons l’existence de graines de verveine officinale (Verbena officinalis), de noisettes (Corylus avellana), de pépins de pomme/poire(Malus/Pyrus), de sureau hièble (Sambucus ebulus) et de noyaux de prunellier (Prunus sp.).

Les Paysages. Blé nu ou froment (Triticum aestivum spp.)
Blé nu ou froment (Triticum aestivum spp.)
Orge vêtue (Hordeum vulgare)
Orge vêtue (Hordeum vulgare)
Observation des sédiments sous microscope (sables, bois et fibres végétales)
Observation des sédiments sous microscope (sables, bois et fibres végétales)

Cet ensemble de sites gaulois comporte à des pourcentages divers des plantes rudérales, de friches et décombres et nitrophiles, favorables à l’enrichissement azoté du sol, probablement par des fumures. Les sites de Gandaillat II et de Sarliève-La Grande Halle sont les plus riches en nombre d’espèces et en abondance.

III – Une région sensible aux modifications environnementales

Reconstitution 3D du paysage du bassin versant de Montchâtre sur le plateau des Dômes à la fin de l’âge du Fer
Reconstitution 3D du paysage du bassin versant de Montchâtre sur le plateau des Dômes à la fin de l’âge du Fer

Reconstitution 3D du paysage du bassin versant de Montchâtre sur le plateau des Dômes à la fin de l’âge du Fer

Depuis le Néolithique, la mise en valeur agricole de la plaine a déjà causé localement, à proximité des sites archéologiques, des accélérations de l’érosion des sols. Les volumes mobilisés et les processus sont cependant discrets et n’influent que très peu sur l’évolution environnementale. L’occupation des zones humides est restée marginale, peut-être momentanée ou saisonnière. Seules les bordures de marais ont été prisées et intégrées aux territoires, car les milieux humides attirent pour leurs ressources (coupe de végétaux, chasse, pêche).

Depuis le milieu du second âge du Fer (IIIe-IIe s. av. J.-C.), la pression anthropique sur les sols s’accroît en lien avec des densités de population plus importantes, l’extension des défrichements et peut-être une progression de la céréaliculture aux dépens des herbages. L’érosion des sols concerne alors presque tous les versants et se réalise sous l’effet de processus plus agressifs (ruissellement concentré). Depuis la même époque, sous la pression d’un peuplement croissant, les Gaulois intègrent aussi les marais aux territoires agricoles grâce à la mise en place de systèmes de drainage. Ainsi, les Arvernes se libèrent des contraintes associées à ce milieu pour y installer l’habitat et y étendre le système agropastoral. Cette occupation des marais dure au moins jusqu’à la fin de l’époque romaine, à la faveur également d’une oscillation sèche du climat et du colmatage par colluvionnement des bordures des bassins humides.

Mais, à la fin de l’Antiquité, les systèmes hydrologiques commencent à souffrir de l’accélération de l’érosion remarquée depuis la fin de l’âge du Fer. Lors de périodes de précipitations prolongées ou lors d’orages importants, les quantités de matière qui arrivent dans le lit des cours d’eau modifient leur comportement : les crues deviennent de plus en plus fréquentes et dévastatrices, en noyant les vallées de Limagne et en particulier les terres de marais. Les nombreuses tentatives de drainage historiques n’arriveront pas à évincer durablement l’excès d’eau jusqu’aux années 1960.

Les recherches paléoenvironnementales visant à restituer les paysages gaulois associent des géomorphologues et des paléobotanistes qui décryptent les archives sédimentaires. Les études botaniques ont montré la richesse agricole et la diversité des productions limagnaises. Les études géomorphologiques ont montré que la mise en valeur qui s’intensifie après les IIIe-IIe s. av. J.-C. se corrèle avec une érosion accrue des sols de la Limagne des Buttes, la mise en place des premiers systèmes de drainage en plaine humide et l’impulsion de changements environnementaux qui ont caractérisé toute la période historique.

Le territoire arverne : laboratoire de recherche pour la restitution des paysages anciens
Depuis quelques années, les chercheurs du laboratoire GEOLAB (UMR 6042 du CNRS) travaillent sur la reconstruction des paysages passés. Des méthodes exploratoires sont testées pour spatialiser les données paléoenvironnementales tirées des archives sédimentaires. La matérialisation des résultats par le biais d’images virtuelles en 3D constitue l’aboutissement de ces démarches.

Le site d’Aulnat

Le site d’Aulnat : article publié dans « L’Archéologue Archéologie Nouvelle n° 95 avril – mai 2008″ qui nous a aimablement autorisé à le reproduire

Auteurs : Yann Deberge, Christine Vermeulen, John Collis

  • I – Introduction
  • II – Histoire des Recherches
  • III – Une agglomération idéalement située
  • IV – Une forme originale d’organisation
  • V – Artistes et artisans
  • VI – Des contacts étroits avec le monde méditerranéen
  • VII – Pratiques funéraires et religieuses

I – Introduction

Aulnat : Photographie panoramique avec points de découvertes (Y. Deberge, ARAFA)
Photographie panoramique avec points de découvertes (Y. Deberge, ARAFA)
Aulnat : Le site d’Aulnat en bordure de la Grande Limagne d’Auvergne (carto Y. Deberge, ARAFA)
Le site d’Aulnat en bordure de la Grande Limagne d’Auvergne (carto Y. Deberge, ARAFA)

Aulnat, La Grande Borne, Gandaillat, Le Brezet, Pontcharaud, Base Aérienne, L’Agriculture, Pierre Boulanger… autant de dénominations pour un seul et même site. Cet inventaire à la Prévert, établi à partir des toponymes et noms de rue associés à chacune des découvertes faites en périphérie est de l’agglomération clermontoise témoigne, à lui seul, de l’étendue de cette implantation humaine du second âge du Fer. Ce vaste site, qui se développe sur 150 hectares à quelques kilomètres de l’actuelle ville de Clermont-Ferrand, est surtout connu sous les noms d’Aulnat ou de La Grande Borne. Il correspond à la plus ancienne grande agglomération connue sur le territoire arverne.

II – Aulnat : histoire des Recherches

Le site d’Aulnat a été pour la première fois repéré lors des travaux d’aménagement de la base aérienne entre 1939 et 1941. Réalisées dans des conditions extrêmement difficiles, souvent après l’intervention des engins de terrassement, les observations conduites par J.-J. Hatt et G. Fournier révèlent la présence d’une occupation datée de La Tène moyenne et finale sur une étendue d’approximativement 35 ha. Les conditions d’intervention (observations aléatoires soumises à la localisation des terrassements, peu de mobilier étudié, documentation de qualité médiocre, etc.) limitent largement la compréhension des vestiges découverts alors.

Aulnat : Cartographie des différentes zones d’investigation (Y. Deberge, ARAFA)
Cartographie des différentes zones d’investigation (Y. Deberge, ARAFA)

On doit à R. Périchon et J. Collis la première exploration méthodique d’un secteur de ce vaste ensemble. Au lieu-dit de La Grande Borne, les deux chercheurs vont mener, pendant seize années consécutives, une fouille stratigraphique, probablement la première réalisée en Auvergne. La surface explorée est faible, un peu moins de 900 m². Les informations collectées sont toutefois de grande qualité et le mobilier est présent en masse. Plus de 100 000 fragments d’objets (faune, céramique, amphore…)seront extraits des 93 structures fouillées. 34 monnaies et environ 400 petits éléments mobiliers (armement, parure et divers outillages) complètent ce corpus, dont la richesse surprend encore. Les données collectées, pour certaines encore inédites, permettent de préciser la chronologie de l’occupation du site et d’apporter des réponses sur sa fonction.

Les vestiges immobiliers (fosses, puits, fossés, chemin, sépultures) et mobiliers renvoient à des domaines très divers. Ce secteur apparaît comme étant une zone d’occupation domestique (rejets détritiques et structures domestiques), où la pratique artisanale est développée (métallurgie du fer, des métaux précieux et alliages cuivreux, tabletterie…), mais qui livre également des vestiges funéraires nombreux (14 sépultures). Quant à la datation du site, elle couvre les IIIe et IIe s. av. J.-C. dans leur intégralité, proposition qui reste toujours valide aujourd’hui. Bien que très riche d’informations, cette fouille de dimension réduite n’apporte que peu d’indications sur la forme et l’organisation de cet habitat.

Aulnat : Mobilier découvert lors des travaux conduits sur la base aérienne (tiré de Hatt 1942)
Mobilier découvert lors des travaux conduits sur la base aérienne (tiré de Hatt 1942)

Ce n’est qu’avec le développement de l’archéologie préventive que l’étendue du site a pu être réellement perçue. Depuis la fin des années 1980, la multiplication des observations faites dans ce secteur particulièrement dynamique de la périphérie clermontoise révèle un patrimoine archéologique exceptionnel. Aujourd’hui, plus de trente points de découvertes ont recensés sur cet espace de 750 m sur 2 000 m. Plusieurs fouilles en aire ouverte, dont deux interventions d’environ un hectare (fouilles du Brezet et de Gandaillat, dirigées respectivement par G. Vernet et C. Vermeulen), permettent de percevoir l’organisation des vestiges.

Aulnat : Premières années de fouille sur le site de La Grande Borne (fouille Périchon 1968 ; cliché G. Fournier)
Premières années de fouille sur le site de La Grande Borne (fouille Périchon 1968 ; cliché G. Fournier)
Aulnat : Photographie de la fouille de La Grande Borne en 1974
Photographie de la fouille de La Grande Borne en 1974

III – Aulnat: une agglomération idéalement située

Aulnat : Le menhir de La Grande Borne à proximité de la fouille de La Grande Borne (J. Dunkley)
Le menhir de La Grande Borne à proximité de la fouille de La Grande Borne (J. Dunkley)

Le site d’Aulnat se développe sur environ 150 ha, à la jonction de deux zones topographiquement déprimées : Le Grand Marais, au nord, et le bassin de Sarliève, au sud. Ces deux espaces correspondent, à La Tène moyenne et finale, à deux zones agricoles particulièrement actives. L’Allier, probablement largement utilisé dans le cadre des échanges commerciaux, n’est situé qu’à quelques kilomètres à l’ouest. Le site apparaît dès lors comme le principal lieu de concentration de la production agricole issue de ces deux secteurs et en retour un centre de redistribution de produits manufacturés locaux ou importés. La zone investie est traversée par plusieurs ruisseaux, la Tiretaine et l’Artière, qui serpentent ensuite dans la plaine en direction de l’Allier. Les coteaux qui bordent le site au sud ont été évités et aucune trace de fortification n’a, à ce jour, été repérée. C’est donc sur un espace de plaine non fortifié, à peine dégagé de l’humidité ambiante par une position topographique très légèrement dominante, que se développe cette agglomération. Des vestiges plus anciens sont connus sur le secteur. Ils paraissent, tels le menhir de La Grande Borne ou la nécropole néolithique de Pontcharaud, avoir influé sur l’implantation de l’occupation laténienne. Qu’ils aient été encore visibles dans le paysage ou présents dans la mémoire collective, ces espaces ont été respectés et sont dépourvus de vestiges laténiens. La fouille conduite dans le secteur du Brezet (dir. G. Vernet, INRAP) en fournit un exemple marquant. Les structures laténiennes, pourtant nombreuses, disparaissent à l’emplacement d’un espace à vocation funéraire chalcolithique. Le même phénomène a été perçu sur le secteur de Pontcharaud où vestiges néolithiques et laténiens s’excluent. Enfin, le menhir de La Grande Borne, bien que situé à moins de 50 m d’une zone à occupation dense, n’a pas été affecté à la période laténienne.

IV – Aulnat : une forme originale d’organisation

Ce site ne constitue donc pas un ensemble homogène en termes de densité d’occupation. Des zones sont libres de tout vestige alors que d’autres paraissent très densément occupées. La documentation actuelle ne permet pas de localiser précisément ces zones à plus ou moins forte densité de vestiges. Le passage d’un secteur « vierge » à un espace fortement mobilisé peut se faire en quelques mètres. Certains secteurs, comme la zone du Brezet, La Grande Borne, Gandaillat et le site de La Rue Reclus livrent les densités les plus élevées (mais ce sont aussi les seules zones où des fouilles importantes ont été menées).

L’image qui peut être restituée est donc celle d’une occupation relativement lâche, avec des secteurs quasiment vides et au contraire d’autres densément investis, répartie de façon continue sur un vaste espace. Sur chacun des secteurs fouillés on retrouve les mêmes associations de vestiges immobiliers (des fosses, des puits, des caves, des bâtiments, des sépultures) et mobiliers (céramique, faune, importation, outillage divers et parure). Elles témoignent d’un mode d’occupation unique d’un point à l’autre du site qui s’apparente à celui connu sur les habitats groupés. La comparaison avec les fermes connues dans la plaine voisine (voir l’exemple du Pâtural) témoigne de différences notables. Ici, peu ou pas de fossés, pas d’enclos, mais des structures de délimitation d’un tout autre genre : des voies (dont certaines sont empierrées), des palissades de poteaux plantés et des limites révélées « en négatif » par des alignements de structures domestiques ou funéraires (fosses, caves, sépultures, puits…). Les vestiges sont de six à dix fois plus nombreux, à surface égale, que sur les établissements ruraux, témoignant ainsi d’une mobilisation plus forte de l’espace. L’occupation d’Aulnat se rapproche de celle mise en évidence pour d’autres agglomérations ouvertes de Gaule centrale telles que Feurs, Roanne ou Levroux. La densité moyenne en vestiges y est cependant deux fois plus élevée que sur le site arverne, mais pour une superficie de 5 à 6 fois moindre. Sur le secteur de Gandaillat, le seul à avoir été dégagé sur une superficie importante, on perçoit les signes d’une structuration forte de l’espace.

Aulnat : Voie empierrée avec traces d’ornières, secteur de Gandaillat (C. Vermeulen, INRAP)
Voie empierrée avec traces d’ornières, secteur de Gandaillat (C. Vermeulen, INRAP)

L’espace est divisé en îlots de forme géométrique bordés, à l’ouest et au sud, par des zones à destination plus spécifiquement funéraire (où inhumations et incinérations se côtoient) et des espaces publics (voie et places empierrées). Les structures présentes renvoient principalement aux domaines domestique et artisanal : bâtiments d’habitation et constructions annexes, caves et celliers, puits, forge ou four… Comme sur le secteur de La Grande Borne, des sépultures sont présentes au sein de ces espaces habités. Plusieurs d’entre elles sont localisées à la limite entre deux îlots, peut-être le long d’un axe de circulation secondaire non perceptible à la fouille. D’autres sont groupées par deux ou trois en un point précis, témoignant de l’existence d’une signalisation au sol des sépultures et surtout d’une volonté de regroupement des défunts.

Les constructions, faites d’une ossature en bois, sont modestes et adoptent un plan classique à une nef que l’on retrouve dans toute la Gaule. L’une d’elles est toutefois caractérisée par la présence d’un solin en pierres, mode de construction qui évoque plutôt des pratiques méridionales. Ce matériau est également abondamment utilisé pour bâtir le cuvelage (rond ou carré)de la partie sommitale des puits, très nombreux sur le site.

Aulnat : Plans comparés des secteurs de La Grande Borne, Gandaillat et Rue Reclus (C. Vermeulen, Y. Deberge ; INRAP/ARAFA)

Plans comparés des secteurs de La Grande Borne, Gandaillat et Rue Reclus (C. Vermeulen, Y. Deberge ; INRAP/ARAFA)
Aulnat : Fonctionnalisation des espaces sur le secteur de Gandaillat (C. Vermeulen, Y. Deberge ; INRAP/ARAFA)
Fonctionnalisation des espaces sur le secteur de Gandaillat (C. Vermeulen, Y. Deberge ; INRAP/ARAFA)

V – Aulnat : artistes et artisans

L’une des principales fonctions des grandes agglomérations de la fin de l’âge du Fer est la production artisanale. Il est, par conséquent, normal d’y trouver des vestiges artisanaux nombreux et diversifiés.

Le site d’Aulnat ne fait pas exception. Les activités métallurgiques (fer et métaux non ferreux), le travail sur os (confection d’anneaux et de dés) et des matières organiques fossilisées (lignite/sapropélite)sont attestés par un nombre élevé d’éléments mobiliers (des déchets, des ratés de fabrication, des outils) et quelques vestiges immobiliers (deux forges). Ces derniers permettent de localiser de façon certaine deux ateliers de forge, l’un sur le secteur de Gandaillat et l’autre, 200 m au sud-ouest, à La Grande Borne. Ce dernier secteur a également accueilli un atelier de bronzier et de tabletterie. Il ne semble pas qu’il existe, comme c’est le cas par exemple à Bibracte, des quartiers spécifiquement destinés aux activités artisanales. Certaines productions, telles les céramiques peintes décorées, témoignent d’un grand savoir faire. Le site d’Aulnat est connu pour avoir livré un corpus de vases à décoration peinte unique en Gaule. Un nouvel ensemble de vases peints a été découvert lors de la fouille du site de Gandaillat. Le thème privilégié reste la figuration stylisée d’animaux, cerfs ou chevaux. L’analyse stylistique de ce nouveau mobilier permet d’identifier des productions retrouvées en différents points du site comme appartenant à un même atelier. Certaines d’entre elle sont indubitablement été réalisées par un seul et même artisan.

Un secteur d’habitat du site de Gandaillat : bâtiment à solin de pierres, four à double alandier et structures domestiques
(C. Vermeulen, INRAP)
Un secteur d’habitat du site de Gandaillat : bâtiment à solin de pierres, four à double alandier et structures domestiques
(C. Vermeulen, INRAP)
Puits à cuvelage en pierre, secteur de Gandaillat (C. Vermeulen, INRAP)
Puits à cuvelage en pierre, secteur de Gandaillat (C. Vermeulen, INRAP)

VI – Des contacts étroits avec le monde méditerranéen

Céramiques importées habituellement rares en Gaule interne (attestés à Gandaillat)
Céramiques importées habituellement rares en Gaule interne (attestés à Gandaillat)

Comme les autres peuples de Gaule centrale, les Arvernes commercent très tôt avec le monde méditerranéen. Sur le secteur de La Grande Borne, les témoignages de ce négoce à longue distance sont précoces (dès le début du IIIe s. av. J.-C.). Il s’agit de céramiques à vernis noir italique (cratère) et de récipients à pâte claire en provenance de Marseille (coupe ansée). Ils montrent une ouverture précoce sur le monde méditerranéen que peut expliquer la géographie du territoire arverne, largement tourné vers le sud. Au IIe s., le répertoire des céramiques importées se diversifie. A côté des campaniennes A importées d’Italie et des pâtes claires du Midi (essentiellement des cruches), on trouve quelques récipients en provenance de la côte catalane (pichets). Ces importations comptent fréquemment pour 1 à 2 % du vaisselier domestique sur le site d’Aulnat. Outre les classiques assiettes (formes Lamb.27 et 36), les coupes ansées (Lamb.42 et 68) et les bols.(Lamb. 27, 28, 31 et 33) en campanienne, on trouve sur le site des éléments nettement moins fréquents en Gaule interne : des lampes à huile, des plats à poisson Lamb. 23 ou encore un cratère originaire de Calès (forme Morel 4753). Ce faciès des importations montre une ouverture marquée sur le monde méditerranéen avec, notamment, l’adoption d’usages allogènes, ce qui constitue un fait relativement rare en Gaule centrale à date aussi haute.

Ce mobilier, en particulier les lampes à huile et plats à poisson, peuvent également témoigner d’une présence allochtone, de marchands grecs par exemple, sur le site. Les influences méditerranéennes pèsent également sur le vaisselier indigène. Progressivement, les potiers arvernes se mettent à reproduire la forme des récipients italiques. A la fin du IIe s. av. J.-C., un tiers de la vaisselle de table utilisée à Aulnat n’est pas d’inspiration indigène. Cent ans avant la conquête romaine, une certaine forme d’acculturation se développe en territoire arverne. A partir du milieu du IIe s. av. J.-C., les échanges avec l’Italie prennent des allures de commerce de masse. On estime, à partir des données collectées sur les différents secteurs de fouille, à environ 40 000 le nombre d’amphores vinaires consommées sur le site d’Aulnat, en l’espace d’une quarantaine d’années. Le site d’Aulnat joue alors le rôle de plaque tournante régionale dans les circuits de redistribution de ces produits.

VII – Pratiques funéraires et religieuses

Comme nous l’avons déjà évoqué, les vestiges funéraires sont nombreux sur le site. L’examen du mobilier montre qu’ils sont strictement contemporains des autres vestiges.

A la différence de ce qu’on observe sur les autres agglomérations protohistoriques de Gaule interne, il ne semble pas exister de grande nécropole constituée pour ce site. Les zones à destination funéraire se superposent à la trame d’occupation domestique et artisanale.

Comme sur les sites ruraux voisins, la séparation entre espace dédié aux vivants et espace réservé aux morts n’est pas nette et il est fréquent qu’une sépulture soit implantée à proximité immédiate d’une structure domestique. On observe néanmoins quelques regroupements ponctuels. C’est notamment vrai pour les dépôts de crémation de Gandaillat, qui paraissent strictement limités dans l’espace.

D’autres vestiges présents sur le site confinent aux domaines domestique et funéraire, voire religieux. Des fragments de corps, parfois en connexion, peuvent ainsi être retrouvés dans le comblement de structures domestiques. Restes de sépultures bouleversées par des recreusements plus récents ou dernières étapes de processus complexes de traitement des défunts, il est difficile de trancher.

Tombe du guerrier de Gandaillat
Tombe du guerrier de Gandaillat
Tombe du guerrier de Gandaillat, milieu du IIe s. av. J.-C. 
(C. Vermeulen, Y. Deberge ; INRAP/ARAFA)
Tombe du guerrier de Gandaillat, milieu du IIe s. av. J.-C.
(C. Vermeulen, Y. Deberge ; INRAP/ARAFA)
Tombe du guerrier de Gandaillat, milieu du IIe s. av. J.-C. (C. Vermeulen, INRAP)
Tombe du guerrier de Gandaillat, milieu du IIe s. av. J.-C. (C. Vermeulen, INRAP)

C’est également le cas pour ce qui est de la découverte, relativement fréquente, de crânes isolés dans le comblement de structures domestiques.

Dépôt céramique au fond d’un puits, secteur de Gandaillat (C. Vermeulen, INRAP)
Dépôt céramique au fond d’un puits, secteur de Gandaillat (C. Vermeulen, INRAP)

Même si la preuve n’est pas apportée, on ne peut exclure l’hypothèse de pratiques en relation avec ce « culte » des têtes coupées mentionné par les auteurs antiques et ponctuellement attesté par l’archéologie. « Aux ennemis tombés, ils coupent la tête et l’attachent au cou de leurs chevaux… ils les embaument avec de l’huile de cèdre et les conservent soigneusement dans une caisse. » (Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, V29). Enfin, les fouilles du Brezet et de Gandaillat fournissent plusieurs exemples de dépôts qui ne peuvent être interprétés sous un angle purement fonctionnel. Certains rejets en puits comptent parfois des objets complets, faiblement usés, dont on explique mal la présence en contexte détritique. A l’inverse, d’autres peuvent porter les stigmates de mutilations volontaires (traces de coups, perforations, bris in situ…) avant dépôt.

Ensemble de céramiques provenant d’un puits, secteur de Gandaillat (Y. Deberge, ARAFA/INRAP)
Ensemble de céramiques provenant d’un puits, secteur de Gandaillat (Y. Deberge, ARAFA/INRAP)

Ces traitements particuliers témoignent de l’exercice de pratiques religieuses au sein même de zones d’habitat que l’on perçoit encore très mal. A la fois habitat, zone artisanale, espace funéraire et lieu de pratiques religieuses, le site d’Aulnat ne se conforme pas au modèle de l’habitat groupé protohistorique attesté ailleurs. Il n’en constitue pas moins la première agglomération des Arvernes. Sa position centrale, dans une zone agricole à très forte densité d’occupation, permet, sans trop de doutes, de l’identifier au chef-lieu de ce peuple au cours des IIIe et IIe s. av. J.-C.

La localisation des oppida de Corent, Gondole et Gergovie montre que le centre d’exercice du pouvoir ne se déplacera finalement que très peu au siècle suivant. La fondation d’Augustonemetum, cent ans plus tard et quelques kilomètres plus à l’ouest, ramène la capitale de cité dans la plaine.

Bègues (03) – Oppidum de Bègues

Type de projet : fouille programmée (« Bègues (03) – Oppidum de Bègues »)

Conduite du projet : Association pour la Recherche sur l’âge du Fer en Auvergne

Date : 2010-2011

Responsable : Patrick Pion

Notice et documents : Patrick Pion

I – Présentation

Le site des Charmes (commune de Bègues, arrondissement de Gannat, Allier) est un éperon barré implanté à l’extrémité d’un promontoire rocheux constitué par un affleurement cristallophyllien de gneiss à mica du socle antécambrien
Bègues (03) – Oppidum de Bègues. Localisation de l’Oppidum de Bègues (P. Pion / ARAFA).

Le site des Charmes (commune de Bègues, arrondissement de Gannat, Allier) est un éperon barré implanté à l’extrémité d’un promontoire rocheux constitué par un affleurement cristallophyllien de gneiss à mica du socle antécambrien.

Ce promontoire, qui culmine à 426 m NGF, présente un sommet tabulaire formant une plate-forme rectangulaire légèrement inclinée vers le nord, d’une superficie d’environ 6 ha.

Il est ceint sur ses côtés nord-est et nord-ouest par un méandre de la Sioule qu’il surplombe par des pentes raides d’environ 130 m, sur son côté sud-ouest par la vallée encaissée d’un petit affluent. Un large ensellement relie son côté sud-est au plateau calcaire oligocène en bordure duquel est établi le village actuel (456 m NGF), qui se superpose à un oppidum laténien et à une agglomération secondaire gallo-romain.

II – Bègues (03) – Oppidum de Bègues. Résultats préliminaires

Relevé micro-topographique

La campagne 2010 « Bègues (03) – Oppidum de Bègues » a été consacrée intégralement au relevé micro-topographique de la plate-forme supérieure de l’éperon.

Micro-topographie de la plate-forme et localisation des fouilles et sondages
Bègues (03) – Oppidum de Bègues. Micro-topographie de la plate-forme et localisation des fouilles et sondages (P. Pion / ARAFA).

Ce travail poursuivait deux objectifs :

  • disposer d’un document planimétrique fiable qui permette de localiser précisément les découvertes anciennes et les travaux plus récents (document réclamé par la CIRA, et dont l’absence à ce jour était provisoirement palliée par la carte IGN 1/25 000 et le cadastre, totalement insuffisants à cet égard)
  • obtenir une vision cohérente de l’organisation générale du site en analysant le modelé détaillé de la plate-forme.

Le travail de relevé, que l’on ne pouvait réaliser par la technique Lidar en raison du couvert végétal, a été effectué manuellement au sol. Il a consisté à prendre les coordonnées de plusieurs milliers points répartis sur l’ensemble des 4,8 ha de la plate-forme. Ces mesures, pour lesquelles nous avons recourus aux services de la société Véodis (université de Clermont-Ferrand), ont été réalisées en 4 campagnes dont la dernière en décembre 2010.

Résultat

L’analyse préliminaire du rendu – un modèle numérique de terrain ou MNT – révèle l’existence de nombreux reliefs artificiels géométriquement organisés qui quadrillent la plate-forme. Leur étude détaillée est en cours, mais on peut d’ores et déjà assurer qu’ils sont antérieurs au cadastre napoléonien, car la mémoire n’en est que partiellement conservée dans la structure parcellaire de ce dernier.

Ces reliefs témoignent de l’aménagement ancien de l’ensemble de la surface de l’éperon en deux grands ensembles :

  • une partie haute (« acropole ») à l’ouest, constituée de 2 éminences accolées de plan rectangulaire (« plate-formes ») installées sur le point culminant (426 m), entourées de terrasses nivelées
  • une partie basse, de pente faible orientée à l’est, sur un replat de laquelle est installé l’enclos hallstattien sondé en 2008-2009 ; cette partie basse comporte notamment un vaste espace trapézoïdal ouvert à l’est, faisant figure d’ « avant-cour », bordé au sud par les puissants pierriers dans lesquels Guillon a détecté le rempart.
En brun, les plates-formes et terrasses de la partie haute du site ; en jaune et vert, l’ « avant-cour » et le replat de l’enclos ; en bleu, l’amorce des pentes
Bègues (03) – Oppidum de Bègues. En brun, les plates-formes et terrasses de la partie haute du site ; en jaune et vert, l’ « avant-cour » et le replat de l’enclos ; en bleu, l’amorce des pentes (P. Pion / ARAFA).

Le tracé supposé du rempart n’est détectable qu’au sud de la plate-forme, où le barrage de l’éperon est matérialisé sur environ 200 m par une rupture de pente abrupte, semble-t-il artificiellement retaillée dans le substrat (fig. 3). À l’est, cette arête vient mourir quelques mètres au-dessus du chemin ancien conduisant au gué de la Sioule, suggérant un retour de la fortification vers le nord où elle pourrait prendre appui sur l’affleurement naturel apparaissant en contrebas de l’enclos, ainsi qu’il a été pressenti lors de l’examen des clichés aériens anciens de l’IGN. Elle contrôlerait ainsi le passage obligé de ce chemin longeant le ravin ouest, au point où la bande disponible est la plus étroite.

À l’ouest, l’arête marquant l’emplacement du rempart est adoucie et moins nettement marquée, le secteur ayant eu probablement à souffrir de l’élargissement du chemin d’accès aux parcelles cultivées. Au centre, seul endroit où les vestiges du rempart semblent conservés, les deux puissants éboulis où furent implantées les fouilles Guillon et le segment de parement A étudié en 2009 forment une puissante masse trapézoïdale en retrait, qui suggère l’existence de bastions encadrant une entrée aménagée, voire précédant une seconde ligne intérieure de fortification. Cette hypothèse devra évidemment être vérifiée en fouille, mais il est clair que le segment de rempart observé en coupe par Guillon n’est pas dans l’alignement général de la rupture de pente artificielle marquant l’emplacement du rempart de barrage.

Le rempart de barrage et le contrôle du chemin ancien menant du plateau au gué de la Sioule (« voie romaine »)
Bègues (03) – Oppidum de Bègues. Le rempart de barrage et le contrôle du chemin ancien menant du plateau au gué de la Sioule (« voie romaine ») (P. Pion / ARAFA).

Ces relevés n’ont en revanche pas permis de détecter clairement le tracé du rempart de contour qui devait enclore le site, côté Sioule notamment où, dominant la plaine, il est impensable qu’il n’ait pas existé et donné toute sa visibilité au site. Quelques reliefs dans l’angle Nord-Ouest de la plate-forme, en deçà du chemin et dans un secteur qui livre en prospection du mobilier hallstattien, pourraient en constituer un témoin. Il est vraisemblable qu’il a été oblitéré par le chemin de contour, ses matériaux ayant été basculés anciennement dans la pente, comme il est fréquent sur des sites de même nature. Ou qu’il fût implanté en léger contrebas de la plate-forme. Seul un relevé micro-topographique des pentes couplé à une prospection électromagnétique et à des sondages est susceptible d’en révéler la trace, comme celle – pressentie – d’aménagements annexes.

III – Bègues (03) – Oppidum de Bègues. Perspectives

Le programme prévu pour « Oppidum de Bègues » 2011 est la poursuite et si possible (selon moyens financiers) l’achèvement du relevé pour avoir une idée claire des aménagements dans l’environnement de la plate-forme (pentes et ensellement joignant l’éperon à l’oppidum laténien sous le village), ainsi que des tests de prospection géophysique en divers points du site. Ces études achevées, on devrait être à même de lancer en 2012 le programme de fouilles proprement dit.

L’alimentation carnée

L’alimentation carnée : article publié dans « L’Archéologue Archéologie Nouvelle n° 95 avril – mai 2008 » qui nous a aimablement autorisé à le reproduire

Auteur : Sylvain Foucras, avec les études de : J. Richardson, ARAFA (Le Pâtural) ; V. Forest, (Gandaillat) ; P. Caillat, (Gandaillat et Pulvérière) ; I. Rodet Belarbi, (Gerzat)

  • I – Les espèces animales consommées
  • II – Traces de consommations

« Leur nourriture consiste en un peu de pain et beaucoup de viande bouillie ou rôtie sur des charbons de bois ou des broches. Ils mangent proprement mais avec un appétit de lion, soulevant de leurs deux mains des membres entiers dans lesquels ils mordent […] »

Posidonios d’Apamée, Athénée IV, 36

Au regard du nombre considérable d’ossements animaux prélevés au sein des habitats arvernes, on peut effectivement donner raison au témoignage de Posidonios d’Apamée : la viande parait bien constituer le plat central de l’alimentation des gaulois.

Ce sont les structures détritiques où ont été amassées les poubelles de repas qui nous livrent la majorité de ces vestiges alimentaires. Ossements souvent mal préservés, fragmentés, ce mobilier constitue pourtant une source de données indispensable à la compréhension des habitudes alimentaires de l’âge du Fer.

I – Les espèces animales consommées

Le choix des espèces consommées varie selon les modes de vies : ferme isolée, habitats groupés ou oppidum, dans la plaine ou sur les reliefs, la part des animaux change.

La maîtrise des techniques agricoles et particulièrement de l’élevage abolit les activités de chasse à des fins alimentaires et les espèces sauvages n’apparaissent plus dans les assiettes qu’à titre exceptionnel. Le gibier n’est généralement présent qu’à travers quelques vestiges sur les habitats et rien n’indique le plus souvent qu’il s’agit de viandes consommées.

Les activités de chasse devenant l’apanage des élites guerrières, la faune sauvage apparaît plus fréquemment sur les habitats au statut plus élevé. Ainsi, les quelques restes d’animaux sauvages que livre l’établissement agricole du Pâtural voient les cervidés dominer le l’échantillon. Sur les exploitations voisines, au statut plus modeste, la faune sauvage est anecdotique. Exit donc l’image du gaulois chasseur et avec elle le sanglier rôti, animal par ailleurs absent des habitats arvernes.

Ce sont donc les espèces domestiques qui prévalent à la table des Gaulois en général, et des Arvernes en particulier, et principalement les trois espèces domestiques que sont le porc, le mouton et le bœuf.

L'alimentation carnée. Crane de porc (S. Foucras)
Crane de porc (S. Foucras)
L'alimentation carnée. Concentration d’ossements issus de la consommation dans le sanctuaire de Corent (S. Foucras)
Concentration d’ossements issus de la consommation dans le sanctuaire de Corent (S. Foucras)
L'alimentation carnée. Scapula (omoplate) de bœuf perforée par un croc de boucher lors de sa suspension (S. Foucras)
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Porcins, ovins et bovins sont présents dans la totalité des dépotoirs arvernes mais en quantités variables. L’habitat groupé d’Aulnat, qui pourrait s’apparenter à une agglomération, voit le porc favorisé alors que plus loin en Limagne les fermes privilégient davantage le bœuf, peut-être plus facile à élever sur une zone à tendance marécageuse peu favorable à l’élevage ovin. C’est le cas au Pâtural comme sur la ferme voisine au lieu-dit Rochefort. En y regardant de plus près, il ne s’agirait que d’une partie du cheptel, abattu jeune pour une viande plus tendre, alors qu’une autre partie atteignait un âge plus avancé, caractéristique des bêtes de sommes. Bien que rarement l’espèce la mieux représentée sur les habitats, les moutons apparaissent comme étant la seconde espèce consommée. L’âge de mise à mort souvent avancé nous indique que cet animal était davantage élevé pour ses apports en laine ou en lait par exemple, donc de son vivant, plutôt que pour sa chaire, qui ne constitue plus qu’un complément alimentaire. D’autres animaux comme le cheval et le chien sont à mentionner comme faisant partie du menu mais de manière plus anecdotique. C’est aussi le cas de la volaille dont la fragilité des restes explique sans doute la faible représentation de la basse coure sur les habitats, de même aussi que les poissons, très rares parmi les vestiges animaux et dont la consommation ne semble pas avoir été particulièrement développée chez les Arvernes jusqu’à l’époque romaine.

L'alimentation carnée. Scapula (omoplate) de bœuf perforée par un croc de boucher lors de sa suspension (S. Foucras)
Scapula (omoplate) de bœuf perforée par un croc de boucher lors de sa suspension (S. Foucras)
L'alimentation carnée. Sépulture 5889 de Chaniat-Malintrat (S. Foucras)
Sépulture 5889 de Chaniat-Malintrat (S. Foucras)

Dans la sphère funéraire, la coexistence de pratiques mettant en jeu l’inhumation ou l’incinération ne semble pas avoir d’effet sur le choix des dépôts alimentaires carnés, et c’est le porc qui est favorisé. Les exemples, bien qu’assez peu nombreux en Auvergne, semblent conformes aux pratiques constatées chez les peuples voisins : un jambon dans une sépulture de Gandaillat a été déposé sur les genoux du défunt ; des quartiers de viandes dans le cénotaphe de Chaniat-Malintrat, disposés de sorte à « reconstituer » l’animal, ou encore des vestiges carbonisés, mêlés à ceux des individus incinérés de Pulvériere. La richesse du mobilier découvert dans ces sépultures témoigne généralement d’un statut élevé des défunts : pièces d’armement, parures, les dépôts alimentaires semblent le plus souvent faire partie d’un ensemble d’éléments réservés à une certaine frange de la population dont les attributs guerriers sont manifestes dans la plupart des cas.

L'alimentation carnée. Sépulture 5889 de Chaniat-Malintrat (S. Foucras)
Sépulture 5889 de Chaniat-Malintrat (S. Foucras)

Les autres espèces animales généralement présentes sont les mêmes que dans la cellule domestique. Parfois, des dépôts témoignent de rituels pratiqués, comme cette chèvre complète à Gandaillat qui semble avoir été égorgée et possiblement éventrée (étude V. Forest), mais cela reste très exceptionnel.

L'alimentation carnée. Ossements d’ animaux découverts dans le fond d’un pot à cuire (S. Foucras)
Ossements d’ animaux découverts dans le fond d’un pot à cuire (S. Foucras)

Les activités religieuses font également l’objet de pratiques de consommations. On le voit sur le sanctuaire de Corent, où elles font l’objet de grands banquets qui mettent en jeu des quantités considérables de nourritures, si l’on s’en réfère aux dizaines de milliers de vestiges animaux présents. Mis à part des pratiques précises qui semblent relever directement du rituel proprement dit, les espèces animales consommées sont les mêmes que celles des repas profanes. Le porc est là encore majoritaire, suivi des caprinés et du bœuf. Aux abords directs de ce sanctuaire, la zone d’habitat de l’oppidum livre très majoritairement des ossements bovins, rejetés pour l’essentiel des activités de boucheries ; le bœuf qui prédomine sur l’ensemble des oppida du bassin Clermontois mais aussi dans l’Allier, à Cusset ou Hérisson, semble alors l’animal privilégié sur les oppida.

II – L’alimentation carnée. Traces de consommations

L'alimentation carnée. Ossements dispersés sur un niveau de sol oppidum de Corent (S. Foucras)
Ossements dispersés sur un niveau de sol oppidum de Corent (S. Foucras)

Il n’est pas évident de mettre en lumière des activités de consommation. C’est souvent la présence d’ossements issus des parties du squelette les mieux pourvues en viande, comme les membres, l’échine ou la poitrine, qui suggèrent la présence de pièces bouchères. L’étude des traces laissées sur les ossements nous montrent les coups portés par les couteaux ou hachoirs des bouchers : os désarticulés, fendus ou découpés, les impacts laissent entrevoir des techniques précises mises en œuvre tout au long de l’âge du Fer qui n’évolueront qu’à la période romaine. Du consommateur on ne décèle que de fines traces parfois incisées sur la surface de l’os qui laissent entrevoir l’utilisation de petits couteaux.

Demeurent les traces de la cuisson des viandes. Les stigmates d’un passage à la flamme se généralisent mais la part des viandes bouillies voire mangées crues reste difficile à déterminer et c’est le mode de préparation culinaire ou encore de conservation des aliments qui reste posé…

L’évolution des cultures au cours des cinq derniers siècles avant la conquête romaine

L’évolution des cultures : cet article a été publié en 2015 par M. Cabanis, Y. Deberge, L. Bouby, M. Hajnalovà, P. Marinval, C. Mennesssier-Jouannet, C. Vermeulen et G. Vernet dans Archaeological and Anthropological Science

  • I – Résumé
  • II – Introduction
  • III – Matériaux et méthodes
  • IV – Résultats
  • V – Discussion
    • Plantes héritées des périodes précédentes et nouvelles cultures
    • Vers une spécialisation des cultures à partir du IIe siècle avant JC: la transformation du système agricole
  • VI – Conclusion
  • VII – Bibliographie

I – L’évolution des cultures. Résumé

L'évolution des cultures. Localisation des sites dans le bassin de Clermont-Ferrand
Localisation des sites dans le bassin de Clermont-Ferrand (numéros de sites : voir aussi Tableau 1)

Depuis plusieurs décennies, un nombre croissant de sites protohistoriques d’Auvergne (Massif Central, France) – fouillés pour la plupart grâce à l’archéologie préventive – font l’objet de collecte d’analyses archéobotaniques. Cette étude présente les résultats archéobotaniques de dix sites de La Tène datant des cinq derniers siècles avant la conquête romaine. En plus de fournir un inventaire des taxons, cet article concerne les cultures et les méthodes de culture des cultures. Ces résultats sont interprétés dans un contexte plus large, traitant des pratiques culturales, des cultures arables, du stockage et de la consommation. Les sites sont situés dans la plaine de la Limagne dans un rayon de 50 km autour de la ville de Clermont-Ferrand. Au total, 23 579 vestiges carpologiques ont été identifiés à partir de 163 échantillons de sédiments totalisant un volume de 1 096 l.

Comparable à d’autres sites en Gaule, le spectre des céréales et des légumineuses est restreint. L’épeautre (Triticum spelta), le petit épeautre (Triticum monococcum) et le millet sétaire (Setaria italica) disparaissent ou deviennent rares. Un meilleur contrôle des techniques agricoles et des rendements accrus est supposé au cours des cinq siècles de l’époque de La Tène. La culture mixte est ainsi remplacée par le semis de monocultures. Au début de cette période, les systèmes agricoles sont dominés par une polyculture de céréales et de légumineuses. Ils se spécialisent au cours des deux derniers siècles avant la conquête romaine ; la diversité des céréales et des légumineuses est diminuée.

II – L’évolution des cultures. Introduction

Au cours de la dernière décennie, l’archéobotanique est devenue de plus en plus courante dans l’archéologie préventive française. Cet article synthétise les données de plus de 163 échantillons archéobotaniques, provenant de dix sites situés dans un rayon de 50 km autour de Clermont-Ferrand, Puy-de-Dôme. Les sites archéologiques sont tous situés dans la Grande Limagne, plaine sculptée par l’Allier. C’est une région attractive pour l’occupation humaine depuis le Néolithique, grâce aux sols noirs très fertiles sur calcaire oligocène (Ballut et Guichard 2005). Les zones humides sont toujours présentes en raison d’un mauvais drainage. La région du Puy-de-Dôme est une zone de forts contrastes climatiques, allant des conditions océaniques aux conditions continentales, englobant montagnes et plaines. La végétation potentielle de la plaine de la Limagne appartient à l’étage végétal sub-méditerranéen, dominé par la présence de chênes pubescents à des altitudes allant de 300 à 500 m (Antonetti et al.2006).

La plaine de la Limagne est très étudiée par l’archéologie préventive déclenchée par l’urbanisme de Clermont-Ferrand et la construction de routes. L’histoire de l’occupation humaine en Grande Limagne à l’époque de La Tène est bien connue (Collis et al.1997 ; Collis et al.1997 2000 ; Deberge et al.2007a ; Deberge et al.2007b ; Deberge et al.2007c ; Mennessier-Jouanet et Deberge 2007 ; Mennessier-Jouannet 2013). Aux Ve et IVe s. avant J.-C., des établissements dispersés étaient situés dans un paysage ouvert déjà déboisé. Au cours des troisième et deuxième siècle avant J.-C., l’activité humaine est devenue plus intense. Ceci est indiqué par un système de terrain bien délimité et un vaste système de drainage en fossés. Cela résulte de l’augmentation de la densité de population et de l’augmentation de la complexité socio-économique. Les fermes et les zones urbaines se sont mieux intégrées, entraînant le développement de grands sites défendus de l’âge du Fer, oppida, à la fin du IIe s. avant J.-C.. Par exemple, le site de Pâtural était une seule ferme (Deberge et al.2007c), tandis que le site de Gandaillat était un établissement ouvert proto-urbanisé relativement important (Deberge et al.2007a). Gondole est le seul oppidum à partir de laquelle des données archéobotaniques ont été incluses dans notre étude (Deberge et al. 2009)

Les informations archéologiques recueillies sur les sites de peuplement en Auvergne, y compris les fermes, la ville et un oppidum, suggère un passage d’une économie d’autosuffisance ou de subsistance

Une économie dite industrielle à la fin de l’âge du Fer (Collis et al. 1997 ; Collis et al. 1997 2000 ; Mennessier-Jouannet 2013). C’est ce que montre par exemple l’organisation systématique du paysage agricole avec un système de champs couvrant la plaine de la Grande Limagne, établi approximativement à partir du IIIe s. avant J.-C.

à partir de (Collis et al. 1997 ; Collis et al. 2000 ; Guichard et al. 2007). L’objectif de la présente étude est d’évaluer si cette évolution générale de l’économie se reflète également dans le spectre des plantes cultivées et dans les pratiques agricoles, comme le laisse percevoir l’analyse des données archéobotaniques. Les changements dans les pratiques culturales au cours des cinq derniers siècles avant la conquête romaine peuvent être détectés par une approche diachronique.

L'évolution des cultures. Liste des 30 événements chronologiques avec leurs informations pertinentes
Liste des 30 événements chronologiques avec leurs informations pertinentes

III – L’évolution des cultures. Matériaux et méthodes

Dix sites sont considérés dans notre étude. On distingue trois types de sites (n° dans la première colonne du Tableau 1). La plupart des sites sont interprétés comme des fermes uniques, comme Pâtural [n° 1, 3, 9, 15 et 19], A710 [n°. 2], la Mothe [n° 4], Sarliève [n° 5, 10, 21, 26], La Montille [n° 6, 8], Le Marais [n° 25] et Les Foisses [n° 13]. Deux agglomérations ou villes sont identifiées : Gandaillat [n° 12, 16, 17, 20, 23 et 24] et Av. de Lattre [n° 11, 14, 18, 22 et 30]. Seulement un oppidum a été étudié : Gondole [n° 27, 28 et 29].

L'évolution des cultures. Sériation chronologique : liste des 30 occurrences chronologiques prises en considération
Sériation chronologique : liste des 30 occurrences chronologiques prises en considération

Au total, 161 échantillons ont été collectés dans divers contextes, notamment des puits, des fosses, des fossés, des fours et des céramiques (78 éléments). La plupart (141) des échantillons proviennent de contextes secs, où les graines sont principalement conservées par carbonisation. Trois puits (20 échantillons) des sites de Sarliève-Grande Halle et de Gondole (IIe-Ier s. av. J.-C.) ont livré des macrorestes gorgés d’eau (Tableau 1 ; n° 24, 27 et 28).

Au total, 929 l de sédiments ont été tamisés à l’aide de tamis de laboratoire à mailles de 2 et 0,5 mm. Les sédiments des sédiments anoxiques, humides ont été tamisés à l’eau et les sédiments des contextes secs ont été flottés (Tableau 1). Après flottation, les échantillons de contextes secs ont été séchés à l’air libre. Tous les macrorestes ont été triés et examinés à l’aide d’un stéréomicroscope avec un grossissement de ×10–63. Des macrofossiles végétaux ont été identifiés par M. Cabanis, L. Bouby et M. Hajnalovà par comparaison avec du matériel de référence moderne et à l’aide de la littérature d’identification pertinente (Beijerinck1947 ; Cappers et al.2006 ; Montégut1984 ; entre autres). Par exemple, deux moitiés étaient considérées comme une seule graine. La quantité moyenne de restes végétaux n’atteint que 50 pièces par litre tamisé. Au total, nous avons identifié 20 806 restes végétaux.

Notre objectif ici est de synthétiser l’information à l’aide d’analyses quantitatives des données. Nous avons décidé de concentrer nos analyses sur les informations provenant des restes végétaux carbonisés, les plus abondants. Les matériaux gorgés d’eau sont considérés séparément, à titre d’information complémentaire.

Les assemblages carbonisés que nous avons étudiés contiennent généralement des densités faibles à moyennes de restes végétaux fortement mélangés. Ils doivent être considérés comme des thanatocoénoses (Willerding 1971 ; Jacomet 2013). Aucune concentration de cultures ou d’assemblages fermés n’a été rencontrée dans les sites. Notre matière carbonisée n’étant composée que de thanatocoénoses (c’est-à-dire des déchets), nous avons décidé de le considérer comme un ensemble de données unique. Nous n’avons pas comparé les échantillons directement. Afin d’avoir des unités quantitativement plus significatives, nous avons comparé les occurrences chronologiques d’occupation.

Beaucoup de nos sites ont été occupés durant plusieurs phases chrono-culturelles de La Tène A à la fin de La Tène D. Au total, nous avons identifié 27 occurrences chronologiques de sites uniques en ne considérant que les restes végétaux carbonisés (Tableau 1). Une occurrence chronologique correspond à l’occupation d’un site pendant une période d’environ 50 à 100 ans. L’occurrence chronologique est alors l’unité sur laquelle la plupart des analyses statistiques ont été effectuées. Lorsque l’on considère les restes végétaux gorgés d’eau, seules trois occurrences chronologiques peuvent être identifiées.

Un inconvénient important de cette approche est que le nombre d’échantillons disponibles par occurrence chronologique varie dans une certaine mesure (de 1 à 24 échantillons en fait ; 1). Cela pourrait bien sûr altérer la comparabilité des résultats. Nous devrons garder ce fait à l’esprit lors de l’interprétation des résultats.

Cependant, des études antérieures ont prouvé l’efficacité des comparaisons statistiques de données archéobotaniques d’un grand nombre de sites pour mettre en évidence des tendances spatio-temporelles, même lorsqu’il existe une forte hétérogénéité concernant les stratégies et les méthodes d’échantillonnage entre les sites, et même lorsque les données ne sont enregistrées que sous forme de présence/absence de taxons (Colledge et al. 2005). Dans le cas présent, l’hétérogénéité n’est pas si forte ; nous ne comparons que les données des matériaux carbonisés, des assemblages ouverts et des échantillons tamisés finement.

Toutes les analyses statistiques ont été réalisées avec XLSTAT-Pro™ Ajout de statistiques Microsoft Excel et PAST™ (Hammer et al. 2001). L’abondance des restes végétaux est évaluée à l’aide d’un indice semi-quantitatif. L’indice d’abondance se classe de 1 à 4 selon le pourcentage de taxons pour chaque occurrence chronologique : 1=(0-10 %) ; 2=(10–35 %) ; 3=(35–60 %) ; 4=(60–100 %). Les indices sont cumulés pour évaluer l’importance globale des taxons (Bouby 2000 ; Cabanis et al. 2010). Cette méthode a l’avantage de combiner à la fois la diversité taxonomique et l’abondance dans un même échantillon, ce qui permet de prendre en compte des taxons peu communs.

Les plantes sauvages sont classées selon leurs propriétés écologiques actuelles (Fournier 1990 ; Guinochet et Vilmorin R de 1973-1984 ; Jauzein 1995). Ils sont organisés en classes phytosociologiques, méthode couramment utilisée en paléobotanique et en paléoécologie (compilation de la littérature dans Jones 1991). Les mauvaises herbes au sens moderne comprennent les mauvaises herbes des cultures d’hiver (Secalinetea) et les mauvaises herbes des cultures d’été (Chénopodète).

Les autres plantes sauvages appartiennent aux terrains vagues, prairies, zones humides, lisières, communautés rocheuses et forestières. Bien sûr, nous sommes conscients que la composition des communautés végétales peut avoir changé avec le temps, surtout lorsque l’on considère les communautés synanthropiques (par exemple Behre et Jacomet 1991). Bon nombre des taxons inclus ici dans les communautés végétales autres que les communautés de mauvaises herbes peuvent très bien avoir poussé comme des mauvaises herbes pendant l’âge du Fer. Ici, l’utilisation de classes phytosociologiques a pour but de résumer et de décrire nos données, pas de reconstituer directement la végétation locale autour des sites.

L'évolution des cultures. Comparaison de l'abondance (indice cumulé) pour les céréales (une) et les légumineuses (b) La Tène précoce à tardive pour 27 occurrences chronologiques avec des assemblages carbonisés dans le bassin de Clermont-Ferrand
Comparaison de l’abondance (indice cumulé) pour les céréales (une) et les légumineuses (b) La Tène précoce à tardive pour 27 occurrences chronologiques avec des assemblages carbonisés dans le bassin de Clermont-Ferrand

Nous avons utilisé l’analyse des correspondances (AC) sur les données brutes des restes carbonisés pour résumer les variations des communautés végétales sauvages. L’analyse des correspondances est plus pratique que la plupart des autres méthodes d’ordination, car elle ordonne automatiquement à la fois les échantillons et les taxons. La procédure d’ordination AC est conçue pour calculer un ensemble de variables théoriques (synthétiques) (axe) le long desquelles les taxons et les échantillons sont notés et rangés en fonction de similitudes de composition (échantillons) ou de cooccurrence (taxons).

L'évolution des cultures. Diagramme d'analyse factorielle des correspondances (axes F1 et F2) des phases de la période de La Tène et des variables de groupe écologique du bassin de Clermont-Ferrand pour les taxons sauvages identifiés à partir de restes carbonisés
Diagramme d’analyse factorielle des correspondances (axes F1 et F2) des phases de la période de La Tène et des variables de groupe écologique du bassin de Clermont-Ferrand pour les taxons sauvages identifiés à partir de restes carbonisés
L'évolution des cultures.

Liste des plantes sauvages du bassin de Clermont-Ferrand, époque La Tène, classées en classes phytosociologiques

L’analyse des correspondances est réalisée sur 86 espèces, 27 occurrences chronologiques. Comme d’habitude, seules les informations obtenues à partir de l’analyse des restes végétaux carbonisés sont prises en compte.

L’évolution de la diversité des cultures au cours de la période de La Tène est estimée à l’aide de deux indices. La première représentation est un schéma de broche (PAST™ logiciel) indiquant la diversité des taxons au fil du temps. Les occurrences chronologiques sont inscrites en lignes et les taxons en colonnes. Le deuxième graphique est une diversité courbe montrant l’émergence et l’extinction des taxons à l’époque de La Tène (PAST™ Logiciel). Cette représentation présente une richesse spécifique (nombre d’espèces) selon les occurrences chronologiques. Ces indices sont calculés séparément pour les céréales et les légumineuses. Dans cet article, la nomenclature des plantes suit la Flora Europaea (Tutin et al. 1964–80).

IV – Résultats

Les taxons identifiés comprennent 11 céréales, 7 légumineuses et 11 espèces fruitières éventuellement cultivées/récoltées (tableau 2).

Céréales : comme nous pouvons voir sur la Fig. 3a au début de La Tène (La Tène A et B), Hordeum vulgare (orge) est la céréale la plus courante, suivie par Triticum aestivum/turgidum (blé nu tétra – ou hexaploïde). Cependant, une gamme de céréales cultivées est également observée, notamment Triticum dicoccum (emmer), Triticum monococcum (petit épeautre), Triticum spelta (orthographié), Avena sp. (avoine), Panicum miliaceum, Setaria italica (genêt et millets de sétaire), Hordeum vulgare var. nudum (orge nue) et Secale céréales (seigle).

Au milieu de La Tène (La Tène C), H. vulgaire reste la céréale la plus répandue, suivie de près par T. dicoccum et Avena sp. Par feu La Tène (La Tène D), H. vulgaire est la principale céréale. T. spelta, T. monococcum, S. cereale, H. vulgarevar. nudum ne sont plus identifiés. S. italica, P. miliaceum, Avena et T. aestivum/ turgidum sont toujours présents. T. dicoccum est maintenant d’une importance mineure.

L'évolution des cultures. Observation graphique des céréales pendant la période de La Tène : diagramme des broches avec le logiciel PAST
Observation graphique des céréales pendant la période de La Tène : diagramme des broches avec le logiciel PAST

Les légumineuses : l’assemblage des légumineuses cultivées du début de La Tène est diversifié. Lens culinaris est d’une importance primordiale, suivi par Pisum sativum et Vicia sativa. Les autres légumineuses cultivées comprennent Vicia faba, Vicia ervilia, Lathyrus odoratus et Lathyrus cicera/sativus. P. sativum, V. sont toujours importantes dans les sites de La Tène C. Par feu La Tène, V. sativa, L. culinaris, V. ervilia et P. sativum sont toujours présents.

Fruits, plantes oléagineuses/textiles et herbes (tableau 2) : seuls quatre taxons sont présents au début de La Tène : Corylus avellana, Sambucus ebulus, Vitis sp. etPetroselinum crispum. Au milieu de La Tène Sambucus nigra/racemosa, Prunus spinosa, Brassica rapa et Brassica noir et Cornus sp. sont présents. La Tène tardive montre la diversité avec Arbutus unedo, Rubus fructicosus, Prunus spinosa et Prunus avium, Rubus idaeus, Fragaria vesca et Anethum graveolens étant identifié. Ces derniers sont surtout présents sur le site de Gandaillat puits 900 [no. 24, Tableau 1]. Cette diversité de fruits dépend de leur conservation gorgée d’eau.

Mauvaises herbes et plantes sauvages : huit communautés écologiques sont prises en compte (Tableau 3). Les adventices des cultures d’hiver et d’été constituent les principales communautés végétales (La Tène B et C/D). Le tracé des deux premiers axes du CA montre que les communautés de lieux rocheux, friches et forêts sont liées à La Tène A. Les plantes de prairies/prairies sont bien représentées au cours de La Tène B. Les zones humides et la flore de lisière sont relativement importantes et diversifiées pendant La Tène D.

L'évolution des cultures. Courbe de diversité avec origine et extinction des céréales pendant la période de La Tène (logiciel PAST)
Courbe de diversité avec origine et extinction des céréales pendant la période de La Tène (logiciel PAST)
L'évolution des cultures. Graphic observation of pulses (spindle diagram) and b diversity curve with origination and extinction of taxa during La Tène period (PAST™ software)
Graphic observation of pulses (spindle diagram) and b diversity curve with origination and extinction of taxa during La Tène period (PAST™ software)

L’effet Guttman (Guttman 1953) visible sur le tracé des deux premiers axes du CA souligne la répartition chronologique des phases. Herbes d’hiver/automne, les prairies sont liées aux premières périodes protohistoriques jusqu’à La Tène C [n° 1 à 8, Tableau 1], tandis que les adventices des cultures d’été sont plus étroitement associées à La Tène C, D et La Tène tardive [n° 9 à 25, Tableau 1].

L'évolution des cultures. Results during La Tène period sites in Clermont-Ferrand basin; crops and food plants
Results during La Tène period sites in Clermont-Ferrand basin; crops and food plants
L'évolution des cultures. Results during La Tène period sites in Clermont-Ferrand basin, ecological groups in diversity and abundance
Results during La Tène period sites in Clermont-Ferrand basin, ecological groups in diversity and abundance

V – Discussion

Plantes héritées des périodes précédentes et nouvelles cultures

Au début de la période de La Tène, la gamme des plantes récoltées se diversifie. Les céréales, H. vulgare, H. vulgare var. nudum, T. dicoccum, T. monococcum, T. aestivum/turgidum., P. miliaceum, S. italica et les légumineuses, L. culinaris, V. sativa, P. sativum, V. faba, V. ervilia et Lathyrus cicerea/sativus identifiés en Auvergne sont largement comparables aux autres régions de France (Bouby 2014 ; Matterne 2001) et de l’Europe durant le deuxième âge du Fer (Van der Veen 1992 ; Van der Veen 2007 ; Henriksen et Robinson 1996 ; Stika 1999 ; Alonso 2008 ; Bakels 2009 Kreuz et Schäfer 2008 ; Jacomet et al. 2009 ; Grabowski 2011). Toutes les plantes oléagineuses, herbes, arbres fruitiers et noix pourraient avoir été cultivés ou collectés localement, sauf A. unedo (arbousier) originaire du bassin méditerranéen.

S. céréale est peu identifié dans les sites de la Tène ancienne et moyenne en Auvergne. Aucun assemblage proche n’a été trouvé jusqu’à présent et les quantités de restes de seigle sont trop faibles pour suggérer que la plante aurait pu être cultivée. Concernant notre région d’étude, l’hypothèse d’une culture précoce du seigle à l’époque néolithique (Marinval 2009) n’est pas confirmée et doit être rejetée. En Gaule, l’exploitation du seigle commence véritablement à l’époque romaine (Matterne 2001 ; Zech-Matterne et al. 2009). La culture de Avena sativa est attestée dans certaines régions de la Gaule à l’âge du Fer (Marinval 1988 ; Zech-Matterne et al. 2009 ; Ruas et al. 2012). En Gaule occidentale, il est suggéré par l’augmentation des pourcentages de Avena sp. (Ruas et al. 2012). Cependant, dans le bassin de Clermont-Ferrand, nous n’avons pas de preuve à ce jour que l’avoine était autre chose qu’une mauvaise herbe à l’âge du Fer.

Vers une spécialisation des cultures à partir du IIe siècle avant JC: la transformation du système agricole

Les courbes de diversité et les diagrammes des fuseaux illustrent que moins de céréales et les légumineuses sont utilisés à travers la période de La Tène. Au cours de La Tène A à C1, un assemblage diversifié de cultures est observé, qui est réduit à la fin de La Tène (IIe au Ier siècle avant JC).T. spelta, T. monococcum, S. italica et P. miliaceum disparaissent ou se raréfient dans le bassin de Clermont-Ferrand, selon des schémas observés ailleurs en Gaule.

Le même phénomène est observé pour les impulsions, telles que Vicia faba, Lathyrus cicera/sativus, qui disparaissent vers la fin de la période de La Tène. Dans la lignée des observations faites ailleurs en Gaule (Matterne 2001 ; Zech-Matterne et al. 2009), les agglomérations se développent dans le bassin de Clermont-Ferrand vers la fin de l’époque gauloise au détriment des réseaux agricoles qui caractérisent l’époque de La Tène (Collis et al. 1997 ; Deberge et al.2007c).

A l’époque de La Tène, la maîtrise des techniques agricoles (Collis et al.1997 ; Collis et al.1997 2000) et des rendements accrus auraient permis aux agriculteurs de passer de la polyculture à une gamme plus spécialisée de plantes cultivées. Cette tendance, déjà observée par Zech-Materne et al. (2009) dans l’inventaire réalisé sur les habitats ruraux en France, semble se confirmer dans le bassin de Clermont-Ferrand.

Au début de la période de La Tène, les systèmes agricoles étaient dominés par une combinaison de céréales et de légumineuses puis au cours des deux derniers siècles avant la conquête, le système agricole s’est spécialisé. Données palynologiques de Saint-Beauzire (Prat 2006 ; Prat et Mennessier-Jouannet 2007) étayent cette interprétation en impliquant l’ouverture progressive du paysage et les débuts d’une exploitation intensive de la plaine avec la culture des céréales et le pâturage des prairies pérennes ou permanentes au début de la période de La Tène. A la fin de La Tène, les prairies/pâturages de la plaine étaient très bien implantés. En effet, les types de pollen communs aux prairies/pâturages humides prédominent dans les spectres polliniques (Prat 2006 ; Prat et Mennessier-Jouannet 2007), pointant vers les zones pâturées principalement sur les peuplements humides.

L’analyse archéobotanique de la ferme Pâtural [n° 1, 3, 9, 15 et 19] – en utilisant deux modèles : ethnographique (Hillman1981, 1984 ; Jones1984 ; Van der Veen1992) et archéologique (Jones 1985) – suggère qu’un site de production, avec une agriculture extensive, basée sur la culture d’une gamme de cultures a été établi dès la moyenne La Tène (Hajnalovà 2007).

La situation est probablement inverse pour les fruits (tableau 2). Des taxons tels que P. avium, Rubus idaeus, R. fructicosus ouFragaria vesca sont préservés par l’engorgement (tableaux 1 et 2 ; non. 24). Les restes de fruits sont carbonisés (tableau 1 et 2). Cet arbousier est originaire de la région méditerranéenne. Ce fruit est à peine attesté par l’archéobotanique au cours de l’âge du bronze final dans le sud de la France (Bouby 2014). Il aurait pu être importé en Auvergne des régions méridionales à la fin du IIe s. av.2006 ; Haselgrove 2006 ; Reddé et al. 2011) et le Massif-Central s’illustre par le volume et l’ampleur des importations, notamment de vin et de céramique (Deberge et al. 2007a)

Dans le centre et le centre-est de la Gaule (Wiethold 2000 ; Cabanis 2004 ; Cabanis 2007 ; Cabanis 2010 ; Vallat et Cabanis 2009 ; Vallat et Cabanis 2011), ce mode de consommation alimentaire est évident dès la fin de l’âge du Fer et s’intensifie à l’époque romaine, c’est peut-être la même tendance dans le Massif-Central. L’agriculture et l’alimentation humaine sont fortement influencées par la « romanisation » rapide de la Gaule, avec la viticulture, l’horticulture et la culture locale de fruits méditerranéens, introduisant de nouvelles plantes en Gaule (Wiethold 2000 ; Zech-Matterne 2010; Bouby 2014 ; Jacomet et Vandorpe 2011).

VI – Conclusion

A l’époque de La Tène, de nombreuses céréales étaient cultivées dans le bassin de Clermont-Ferrand dont H. vulgare, H. vulgare var. nudum, T. dicoccum, T. monococcum, T. spelta, T. aestivum/turgidum., P. miliaceum et S. italica. S. céréaleet Avena sp. sont tous deux présents mais représentent très probablement des adventices dans les champs cultivés. Les légumineuses étaient également importantes, y compris L. culinaris, V. sativa, P. sativum, V. faba, V. ervilia et L. cicerea/sativus. De plus, les plantes oléagineuses et les herbes, telles que B. nigra, B. rapa, P. crispum et A. graveolens, ont été identifiés. La diversité des céréales et des légumes secs diminue à partir du IIe s. avant J.-C.

Nous émettons l’hypothèse que cette spécialisation est liée au changement d’échelle des grandes cultures. Les deux derniers siècles avant J.-C. assiste à une spécialisation des productions végétales et à une généralisation des outils en fer (Collis et al. 1997 ; Deberge et al.2007c), ce qui reflétait probablement une demande croissante de produits végétaux afin de nourrir une population croissante vivant dans oppida et agglomérations. En Gaule celtique, des processus d’urbanisation et de centralisation ont également été observés dans les résultats archéobotaniques avec une augmentation des céréales (Zech-Materne et al. 2009). À la fin de la période de La Tène, l’augmentation de la consommation de fruits pourrait être un signe précoce de contact avec la culture romaine (Wiethold 2000 ; Zech-Matterne 2010; Bouby 2014 ; Jacomet et Vandorpe 2011). Des investigations interdisciplinaires sont nécessaires à l’échelle européenne pour mieux interpréter l’évolution des cultures au deuxième âge du Fer et le processus de romanisation.

Remerciements Nous tenons à remercier tous les archéologues et archéobotanistes qui ont travaillé dans ces établissements. Merci à Soultana Maria Valamoti pour ses remarques très constructives. Merci à P. Ledger, J. Dunkley et M. Aldon pour leur aide avec la langue. Merci aux relecteurs en particulier J. Wiethold.

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Des menhirs installés à l’âge du Fer ?

Des menhirs à l’âge du Fer : Article publié dans les résumés des communication à la journée régionale de l’archéologie du 25/03/2011 par DRAC Auvergne.

Conduite du projet : DRAC Auvergne

Auteur de la notice : Frédéric SURMELY, Patrick BOUDON

Des sondages effectués au pied de différents menhirs communs de longue date apportent des résultats surprenant. Ainsi le menhir de Beaulieu, encore appelé La Grande Borne (commune de Clermont-Ferrand), qui a donné son nom au principal site auvergnat des IIIe et IIe siècles avant J.-C., pourrait bien avoir été érigé (ou du moins déplacé) à l’époque gauloise.”

Ces monuments sont traditionnellement considérés comme ayant été érigés au cours du Néolithique, en complément des dolmens. Peu de travaux ont pourtant été consacrés à ces monolithes dressés, en Auvergne comme ailleurs en France, en dehors du cas très particulier des alignements. Nous avons choisi de nous y intéresser dans le cadre d’une réflexion plus large sur les rapports des populations préhistoriques avec les terroirs du Massif Central.

La réalisation d’un inventaire détaillé des monolithes du département du Puy-de-Dôme, a permis de constater tant leur nombre que leur diversité morphologique. L’étude a également fait apparaître la difficulté de distinguer les pierres levées anciennes des monolithes dressés récemment comme support de croix, bornes de territoires… À l’évidence, seuls des sondages peuvent permettre de déterminer l’âge de ces pierres levées, mais aussi leur fonction. Par ailleurs, le constat de l’état de conservation des monuments est assez alarmant : la majorité des pierres levées ont été transportées, déplacées, voire mutilées .

Des menhirs à l'âge du Fer. Le menhir de Beaulieu à l'achèvement des sondages
le menhir de Beaulieu à l’achèvement des sondages

Les résultats sont surprenants :
– Le « menhir » d’Aubière a été érigé à l’époque gallo-romaine (étude de la céramique P. Vallat).
– Le « menhir » de Beaulieu (Clermont-Ferrand) est datable de la période gauloise (étude de la céramique Y. Deberge). Les opérations ont permis également de révéler les dimensions réelles des monolithes, nettement plus grandes qu’on ne le croyait initialement.
– Un troisième sondage sur les abords du menhir renversé du puy de la Poix (Clermont-Ferrand) n’a pas livré d’informations déterminantes concernant le monument. Dans tous les cas, les sondages élargis n’ont pas montré la présence d’autres monuments voisins, ce qui confirme bien le caractère isolé de ces « menhirs ».

La monnaie des Arvernes

La monnaie des Arvernes : article publié dans « L’Archéologue Archéologie Nouvelle n° 95 avril – mai 2008 » qui nous a aimablement autorisé à le reproduire

Auteur de la notice : Katherine Gruel et Fernand Malacher

  • I – Les émissions en or
  • II – Les émissions en bronze
  • III – Les émissions en argent
  • IV – La circulation monétaire en Auvergne
  • V – Témoignage de la frappe monétaire chez les Arvernes

L’Auvergne présente pour la numismatique gauloise des spécificités qui permettent une réflexion approfondie sur l’usage et les échanges monétaires. Plus de quatre mille monnaies gauloises ont été recensées en Auvergne.

Elles se concentrent dans les plaines et les vallées fluviales. Cette concentration monétaire est très nette dans toute la vallée de l’Allier, en particulier dans la plaine de Clermont-Ferrand et sur les grands oppida arvernes. L’oppidum de Corent (63) tient une place spécifique avec plus de 2000 pièces.

La reprise des fouilles sur les oppida de Gondole au Cendre (63), Gergovie à La Roche-Blanche (63) et Cordes à Hérisson (03) enrichit nos connaissances sur ces sites. Les autres fortes concentrations monétaires correspondent pour la plupart à des trésors ou à des découvertes multiples sur une même commune.

La monnaie des Arvernes. Quart de statère en or, Aulnat (Cliché : F. Malacher)
Quart de statère en or, Aulnat (Cliché : F. Malacher)

I – La monnaie des Arvernes. Les émissions en or

Les monnaies les plus anciennes à circuler sont des imitations du statère de Philippe de Macédoine, d’un poids proche du prototype (plus de 8 g d’or). Les graveurs reproduisent avec une telle précision les monnaies grecques qu’on peut définir l’atelier d’où provenait la monnaie copiée. On a rarement des contextes précis et bien datés pour ces statères trouvés isolés ou en trésors (St-Gérand-de-Vaux). Seul un quart de statère à la branche d’Aulne provient de la fouille d’Aulnat. Cependant, on peut penser que leur apparition en Gaule est au plus tard contemporaine de la circulation des dernières émissions grecques au nom du conquérant macédonien, c’est-à-dire de la fin du IIIème s. av. J.-C. Elles marquent l’introduction en Gaule de l’usage monétaire. Les volumes émis restent faibles, les émissions occasionnelles dans plusieurs régions de la Gaule et les émetteurs inconnus. Les imitations fidèles des statères de Philippe de Macédoine, assez nombreuses en Auvergne, ont donc été écartées des émissions attribuées aux Arvernes car leur poids, leur module, leur chronologie haute et leur circulation, dépassant largement la région, en font un phénomène monétaire à part, lié à une contrefaçon de monnaies grecques, visiblement copiées fidèlement dans une partie de la Gaule, plutôt qu’un vrai monnayage gaulois.

La monnaie des Arvernes.
La monnaie des Arvernes.

Cependant, cette tradition de la frappe de statères d’or de haut titre se poursuit en Auvergne jusqu’à la conquête romaine : ils sont parvenus jusqu’à nous sous la forme de trésors (Lapte, Pionsat, Chevenet, Orcines…), dont la date d’enfouissement reste difficile à préciser. Un certain nombre de ces monnaies sont émises par la cité arverne. On peut, dans l’état actuel de nos connaissances, retenir cette attribution pour des séries monétaires qui se répartissent sur tout le territoire et pour celles qui portent des noms de chefs arvernes attestés par les textes comme Vercingétorix. C’est pourquoi, dans la circulation des statères d’or, on distingue les séries correspondant aux références La Tour 3679 à 3778 (BNF) comme arvernes des autres séries pour lesquelles l’émetteur est incertain ou différent, c’est-à-dire ici essentiellement biturige. L’or de plus en plus allié, souvent même fourré de bronze ou remplacé par du laiton, continue à être frappé jusqu’à la conquête romaine.

La monnaie des Arvernes. Potin au long cou (Cliché : F. Malacher)
Potin au long cou (Cliché : F. Malacher)
La monnaie des Arvernes. David Romeuf a représenté Vercingétorix d'après le denier ROMAIN frappé en 48 BC par Lucius Hostilius Saserna. 
Il montre Vercingétorix après plusieurs années de captivité, hirsute, maigre.
David Romeuf a représenté Vercingétorix d’après le denier ROMAIN frappé en 48 BC par Lucius Hostilius Saserna.
Il montre Vercingétorix après plusieurs années de captivité, hirsute, maigre.

II – La monnaie des Arvernes. Les émissions en bronze

Dès La Tène C2, vers le milieu du IIème siècle av. J.-C. ou un peu avant, commencent à circuler sur les habitats des potins généralement du type dit « au long cou », présents aussi dans la basse vallée du Rhône, ou des potins originaires de la région de Levroux. Le bronze frappé apparaît dès La Tène D1, vers la fin du IIème siècle av. J.-C., sous forme de petites monnaies à la circulation très limitée comme les petits bronzes« au renard » et « au cheval-cheval » du sanctuaire de Corent. Les bronzes aux noms des chefs arvernes se généralisent ensuite sur tout le territoire au Ier siècle av. J.-C. Ils ont, fait exceptionnel en Gaule, une iconographie et une légende identiques aux deniers arvernes d’argent frappés à la même période.

III – La monnaie des Arvernes. Les émissions en argent

Les Arvernes ont tout d’abord frappé des petites oboles qui semblent circuler parallèlement aux potins dès le IIème siècle av. J.-C. Ils frappent aussi des séries monétaires au cheval libre sans légende, qui sont pour la plupart représentées dans le trésor de La Chapelle-Laurent. La date des premières émissions d’argent reste imprécise, on la situe à La Tène D1 sans contexte clair pour confirmer cette proposition ; elles sont présentes à Aulnat et dès l’état II de Corent.

En revanche, la circulation, au Ier siècle av. J.-C., des deniers d’argent et des bronzes portant des noms de chefs, commence à être mieux connue grâce aux fouilles récentes. Les premiers à apparaître sont ceux à légende EPOS (LT 3952), MOTVIDIACA (LT 3994), puis les ADCANAVNOS(LT 3868) et, durant la guerre des Gaules, les monnaies d’Epadnactos au cavalier, CICEDV. BRI/EPAD (LT 3899). Ce chef arverne, conforté par César, après la conquête, frappe alors une nouvelle émission très romanisée, les EPAD au guerrier.

La circulation après la conquête des VERCA (LT3943) confirme cette poursuite des frappes arvernes après la fin de la guerre des Gaules. La monétarisation importante de l’économie arverne au Ier siècle av. notre ère se caractérise donc par des émissions nombreuses associant l’or, l’argent et le bronze. Ceci en fait un cas particulier en Gaule et révèle le dynamisme économique de la cité arverne.

Epad. monaie arverne et le denier romain dont elle dérive (Cliché : F. Malacher)
Epad. monaie arverne et le denier romain dont elle dérive (Cliché : F. Malacher)

IV – La circulation monétaire en Auvergne

Le nombre de potins en circulation reste bien inférieur à celui observé dans la zone voisine du Centre-Est. Les potins à la Grosse tête, présents de la Bourgogne à la Suisse, se comptent d’ailleurs ici sur les doigts. Le potin au long cou, ici dominant, semble assez vite supplanté par les bronzes. A La Tène D2, la circulation simultanée de plusieurs alliages monétaires, en or, en argent et en bronze, l’existence même de textes antiques parlant des Arvernes, la présence de monnaies aux noms des chefs arvernes mentionnés dans la Guerre des Gaules, permettent de poser des hypothèses sur l’organisation des monnayages, sur certaines limites territoriales et sur les relations économiques des Arvernes avec leurs principaux voisins.

On constate une forte présence de l’or et du bronze. Les répartitions des découvertes monétaires montrent la frontière entre Bituriges et Arvernes, malgré une pénétration importante des monnaies bituriges dans la vallée de l’Allier jusqu’à Corent. Les faciès de Hérisson et Néris-les-Bains, très différents de ceux des oppida arvernes, reflètent leur appartenance à la sphère biturige. Le contraste avec les deniers du Centre-Est, quasi inexistants dans la région, est d’autant plus pertinent qu’il correspond à la même absence de monnaies arvernes chez les Eduens avant la conquête romaine. Seules cinq communes ont fourni quelques deniers du Centre-Est. Il semble qu’il faille donc interpréter cette présence des monnaies bituriges comme un témoignage des liens économiques et monétaires entre les deux cités, à mettre en relation avec la voie fluviale et commerciale, Allier-Loire.

V – Témoignage de la frappe monétaire chez les Arvernes

Les outils de frappe restent exceptionnels. Leur mode de fabrication est mal connu car jusqu’à présent on envisageait une gravure directe, en creux et en négatif, à la gouge et avec des poinçons de détail. La découverte récente de plusieurs objets qu’on identifie comme des matrices de coins ouvre des hypothèses sur les modalités de fabrication.

Deux coins de revers et un coin de droit, en base cuivre, provenant tous de l’oppidum de Corent, sont actuellement connus. Ils sont de forme tronconique en base cuivre. A la base, la surface est gravée en négatif.

Le premier, découvert en 1844, se trouve dans les collections du musée de St-Germain-en-Laye (MAN12273). Il correspond au revers des monnaies d’argent à l’épée du type BN4102, dont un exemplaire est conservé à la BNF, trois au MAN dont un provenant d’Alésia et deux du trésor de Tendre dans l’Indre. En raison de l’iconographie du droit, ces monnaies sont souvent attribuées aux Bituriges

Matrice monétaire de Corent de type BN3868
Matrice monétaire de Corent de type BN3868

Le second, trouvé en 1886, n’est connu que par un dessin de Péghoud dans la Revue Archéologique. Il correspond à un revers des monnaies en bronze de typeBN3868.

Le troisième provient des fouilles 2007 dirigées par M. Poux au puy de Corent. Bien que mal conservé, il semble qu’il s’agisse d’un droit empreint sur les bronzes à légende ADCANAVNOS (BN 3868). Un coin de droit base cuivre sur laquelle la légende VERCA en négatif était parfaitement lisible serait conservé dans une collection privée, sans provenance connue. Enfin, le fragment d’une matrice cylindrique a été découvert en prospection sur le plateau de Corent. Il porte à sa base le dessin en relief de la partie supérieure d’une esse couchée au-dessus d’un cheval à droite, ceci correspond au revers du type BN3868. Elle aurait servi à empreindre un coin en négatif nécessaire à la frappe des monnaies. Un atelier monétaire ne nécessite pas de grosses installations, cependant le contexte du coin trouvé en fouille montre un lien avec un atelier de bronzier.

Pour en savoir plus : À propos de la circulation monétaire en Gaule chevelue aux IIe et Ier siècles av. J.-C

Les pratiques funéraires

Les pratiques funéraires : article publié dans « L’Archéologue Archéologie Nouvelle n° 95 avril – mai 2008 » qui nous a aimablement autorisé à le reproduire

Auteur de la notice : F. Blaizot, Y. Deberge, F. Delrieu, P.-Y. Milcent, L. Orengo, P. Pion

  • I – Nécropoles tumulaires de Haute Auvergne et tombes en fosse de Limagne au premier âge du Fer
  • II – Champ Lamet (Pont-du-Château), une nécropole adventice du début de La Tène (Ve-IVe s. av. J.-C.)
  • III – Les cimetières à guerriers de la fin de La Tène ancienne (seconde moitié du IVe-début IIIe s. av. J.-C.)
  • IV – L’inhumation et la crémation au IIe s. av. J.-C.
  • V – Les tombes aristocratiques du Ier s. av. J.-C.
  • VI – Bibliographie

Jusqu’à récemment, la documentation concernant l’archéologie du monde des morts était largement déficitaire pour l’âge du Fer auvergnat. Les nombreux travaux d’archéologie préventive conduits récemment dans le bassin clermontois, programmée dans le département du Cantal, ont permis d’étoffer considérablement le corpus disponible permettant d’aborder le thème des pratiques funéraires aux âges du Fer.

Les pratiques funéraires. Localisation des sites mentionnés dans le texte (Y. Deberge, ARAFA)
Localisation des sites mentionnés dans le texte (Y. Deberge, ARAFA)

I – Nécropoles tumulaires de Haute Auvergne et tombes en fosse de Limagne au premier âge du Fer

Les pratiques funéraires. Fouille d’un tertre (F. Delrieu)
Fouille d’un tertre (F. Delrieu)

Contrairement aux autres domaines de la recherche où la Limagne fait figure de pays de cocagne, la documentation permettant d’aborder la thématique des pratiques funéraires fait plutôt défaut, sur ce secteur, pour le début de l’âge du Fer.

Il faut tourner vers la Haute Auvergne, et plus particulièrement le Massif cantalien, pour avoir des témoignages représentés essentiellement sous la forme de nécropoles tumulaires (Allanche et Vèze, Laurie, Saint-Georges, Mauriac…).

Le début du premier âge du Fer voit l’édification de tumulus ainsi que la réutilisation de tertres plus anciens. Le traitement des défunts fait appel à la crémation (les os sont placés dans une céramique) ou à l’inhumation. Les tombes supposées masculines sont régulièrement accompagnées d’une épée en fer ou en bronze et d’un à trois récipients céramiques ou occasionnellement en bronze issus d’un service individuel à boisson (alcoolisée ?).

A l’image de ce que l’on observe dans la partie occidentale du domaine nord-alpin, le développement de la pratique de l’inhumation, entre 800 et 650 av. J.-C., paraît correspondre à un modèle funéraire adopté pour les sépultures des élites masculines. On note par ailleurs que les différences de statut entre les défunts, perçues au moyen du mobilier funéraire, n’apparaissent pas clairement dans l’investissement consacré à l’aménagement des tumulus.

L’étape suivante (vers 650-525 av. J.-C.) est également représentée par la pratique de la crémation et de l’inhumation. Les tombes se placent, à quelques exceptions près, en situation adventice à des tumulus plus anciens témoignant ainsi de la volonté de rattacher les défunts à des sépultures fondatrices ou bien à des monuments antiques (et illustres ?). Contrairement à l’étape précédente, on ne retrouve plus d’arme dans les tombes. Les sépultures supposées masculines deviennent difficiles à identifier en raison de la modestie des parures qui les accompagnent, lorsque l’estimation biologique du sexe n’est pas réalisée. Symétriquement, les tombes féminines s’enrichissent, considérablement parfois comme à Saint-Georges, de parures à l’aspect baroque qui mobilisent autant des matières précieuses ou semi-précieuses que des compétences artisanales spécialisées. L’importance prêtée aux atours féminins suppose, à l’image des constatations faites pour la région nord-alpine, que les groupes familiaux revendiquent désormais une filiation matrilinéaire, ou du moins qu’ils admettent la référence à un ancêtre commun de sexe féminin. Les fonctions militaires, assumées par les hommes, ne sont plus mises en avant dans l’espace funéraire, ce qui donne à voir là aussi une recomposition dans la représentation des rôles de chacun au sein de la société.

On arrive aux mêmes constatations, pour cette étape, en Basse-Auvergne. Dans le petit ensemble funéraire à tombes en fosse du Pâtural, où hommes et femmes se partagent l’espace funéraire, seules les sépultures de ces dernières livrent un mobilier métallique abondant (jusqu’à 19 bracelets et anneaux de cheville). Une tombe d’homme se distingue néanmoins des autres par l’architecture du monument funéraire qui le recouvre, un enclos quadrangulaire de faible dimension palissadé et/ou recouvert d’un tertre de faible hauteur.

La fin du premier âge du Fer voit l’introduction de mobiliers nouveaux dans les contextes funéraires. Les fibules apparaissent et les parures annulaires féminines se font beaucoup plus discrètes.

L’armement demeure absent des contextes funéraires mais la présence de dépôts mobiliers exceptionnels, tels le bassin étrusque en bronze et la fibule en fer incrustée d’or de Saint-Georges, la coupe et la fibule en bronze de Saint-Pierre-des-Landes, témoigne du maintien de sépultures remarquables en Haute-Auvergne. A la différence de la Basse-Auvergne, où l’inhumation domine comme dans le reste du domaine nord-Alpin, le sud du Massif central voit l’affirmation d’un particularisme régional puisque dans ce secteur c’est la pratique de la crémation qui est privilégiée. A côté de cela, la présence de vases complets laisse supposer la persistance de la pratique de dépôts alimentaires, solides ou liquides, selon un schéma bien connu en Gaule méridionale et occidentale, alors qu’il est exceptionnel en Gaule du centre-est et de l’est. La Haute-Auvergne semble réceptive à des influences tant occidentales que méridionales, perceptibles à la fois sur la base des associations de mobilier et sur leur typologie.

Dans l’ensemble de l’Auvergne, le passage au début du second âge du Fer, dans le courant du Ve s., voit la disparition de l’usage des tertres funéraires.

Les pratiques funéraires. Choix de parures de la tombe féminine de Mons à Saint-Georges dans le Cantal (P.-Y. Milcent)
Choix de parures de la tombe féminine de Mons à Saint-Georges dans le Cantal (P.-Y. Milcent)

II – Champ Lamet (Pont-du-Château), une nécropole adventice du début de La Tène (Ve-IVe s. av. J.-C.)

Les pratiques funéraires. Cimetière laténien de Champ Lamet (F. Blaizot, INRAP)
Cimetière laténien de Champ Lamet (F. Blaizot, INRAP)

Le début de la période laténienne voit la généralisation de la pratique de l’inhumation en fosse (« tombe plate ») sans tumulus. Le site de Champ Lamet, à Pont-du-Château, correspond au plus important ensemble funéraire de cette période découvert en Auvergne.

Celui-ci, situé hors de la zone d’habitat, s’installe en situation adventice d’un tumulus de l’âge du Bronze final. Les premières tombes se répartissent en couronnes périphériques par rapport au centre du monument tandis que les plus récentes sont plutôt disposées en lignes parallèles au-delà du tumulus. Un monument funéraire est aménagé au bénéfice d’une ou de quelques sépultures sous la forme d’un petit enclos fossoyé quadrilatéral muni d’une palissade ou peut-être pourvus d’un tertre de faible dimension. Le creusement des tombes est généralement sub-rectangulaire avec quelques pierres disposées dans ou sur le comblement. Cette caractéristique apparemment anodine a été révélée sur la majorité des cimetières à tombes en fosse du Centre-Est de la Gaule et constitue une spécificité en regard des régions plus septentrionales. La plupart des corps, enveloppés d’un « linceul » de cuir, furent installés dans des fosses relativement étroites surmontées d’un couvercle de bois. Quelques individus, inhumés au centre du tumulus, paraissent avoir été déposées dans des contenants de bois.

Les défunts sont inhumés, en décubitus dorsal avec les membres inférieurs en rectitude. Les exceptions sont observées avec des dépôts réalisés sur le ventre ou, plus rarement, sur le côté. De rares sépultures doubles sont relevées. Les hommes et les femmes sont présents en nombres équivalents. Comme dans la plupart des ensembles funéraires protohistoriques, les tombes d’enfants décédés avant l’âge de 5 ans sont anormalement peu nombreuses, ce qui peut traduire un accès au cimetière qui est, pour partie, fonction des classes d’âge. Il a été estimé que ce cimetière, occupé du Ve au IVe s., correspondait à une communauté d’environ 12 à 15 individus vivants, soit l’équivalent de la population d’un hameau ou de deux à trois fermes.

Conformément à la situation observée pour la Gaule du centre-est et de l’est, les tombes ne livrent aucun dépôt alimentaire ou de boisson. Le mobilier placé dans les sépultures est limité aux vêtements, à de rares parures et concerne un peu plus du tiers des sépultures ce qui correspond bien à la norme observée ailleurs. Les tombes à armes ne sont pas présentes dans cet ensemble et les indices d’une différenciation socio-économique entre les individus sont maigres. Le mobilier apparaît comme relativement modeste quel que soit la sépulture concernée. Ceci peut témoigner d’un tassement marqué de la hiérarchisation sociale au début de la période laténienne, ou tout au moins d’un gommage des écarts dans la représentation funéraire des statuts sociaux.

Les pratiques funéraires. Champ Lamet (F. Blaizot, INRAP)
Champ Lamet (F. Blaizot, INRAP)
Les pratiques funéraires. Champ Lamet (F. Blaizot, INRAP)
Champ Lamet (F. Blaizot, INRAP)
Les pratiques funéraires. Champ Lamet (F. Blaizot, INRAP)
Champ Lamet (F. Blaizot, INRAP)
Les pratiques funéraires. Champ Lamet (F. Blaizot, INRAP)
Champ Lamet (F. Blaizot, INRAP)

III – Les cimetières à guerriers de la fin de La Tène ancienne (seconde moitié du IVe-début IIIe s. av. J.-C.)

Les pratiques funéraires. Parure métallique de la nécropole de Diou (P. Pion)
Parure métallique de la nécropole de Diou (P. Pion)

Deux nécropoles (Diou dans l’Allier, Cournon dans le Puy-de-Dôme) constituent l’essentiel de la documentation pour la fin de La Tène ancienne. Fouillées anciennement, les sépultures n’ont fait l’objet d’aucune étude anthropologique et l’essentiel des interprétations reposent sur les relations des travaux anciens (parfois agrémentées de croquis ou photos) ainsi que sur les collections mobilières qui nous sont parvenues de façon plus ou moins complètes.

Ces deux ensembles, utilisés sur un laps de temps relativement court (une à deux générations), livrent chacun une vingtaine de sépultures et renvoient à des communautés vivantes relativement restreintes d’une dizaine de personnes (deux ou trois familles). L’architecture des tombes, toutes à inhumation, est mal connue. Elle semble relativement simple et uniquement constituée par des fosses de dimension relativement modérée sans aménagement de surface (« tombes plates »).

Les dépôts d’accompagnement consistent principalement en armes (épées, lances, boucliers) et en parures (fibules, bracelets, torque). L’absence de céramique dans les dépôts funéraires rattache culturellement ces nécropoles à la Gaule du centre-est et de l’est.

L’analyse des mobiliers permet de faire quelques hypothèses concernant le recrutement funéraire de ces ensembles. On obtient une composition sociologique moyenne en trois niveaux assez classique (des tombes de guerriers, des tombes à parures annulaires plutôt féminines et des tombes pauvres sans dépôt) ce qui renvoie à un petit groupe socialement stratifié et hiérarchisé avec au sommet des guerriers. La nécropole de Bonnabry à Cournon étonne par la forte proportion d’armes retrouvées. Ici, si l’on se base sur le mobilier inventorié lors de la fouille, l’ensemble ne compterait pas moins de sept tombes de guerrier, soit près de la moitié de la population inhumée, ce qui est loin d’être la norme dans les ensembles funéraires contemporains. Si l’hypothèse d’un recrutement funéraire particulier n’est pas à exclure, il est plus vraisemblable d’envisager que la mauvaise qualité des fouilles conduites sur ce site explique en grande partie la situation observée.

Toujours est-il que, pour cette période, ce sont donc les contextes virils et militaires qui sont valorisés. En Auvergne, comme ailleurs dans l’espace laténien, les nécropoles renvoient l’image d’une militarisation grandissante de la société.

La documentation est très lacunaire pour la fin du IIIe s. av. J.-C. Il semble toutefois que les armes ne participent alors plus à la valorisation individuelle des défunts masculins.

IV – L’inhumation et la crémation au IIe s. av. J.-C.

Les pratiques funéraires. Ensembles funéraires de IIIe-Ier s. av. dans le sud de la Limagne
Ensembles funéraires de IIIe-Ier s. av. dans le sud de la Limagne

Les informations sont nettement plus nombreuses pour le IIe s. av. J.-C., notamment pour la fin du siècle. Les ensembles funéraires sont multiples (environ une quinzaine) mais livrent un nombre très variable de sépultures. Une hiérarchisation à trois niveaux est nettement perceptible entre les cimetières : de petits ensembles ruraux, comprenant moins d’une dizaine de sépultures, peut-être à recrutement familial ; des ensembles d’une vingtaine d’individus correspondant à un groupe social élargi à deux ou trois familles (hameau) ; un vaste ensemble funéraire qui se superpose à la trame d’occupation domestique du site d’Aulnat-Gandaillat et qui regroupe probablement plusieurs milliers de tombes (environ 200 tombes repérées sur moins de 2 % de la surface supposée du site).

D’un site à l’autre, on relève une communauté de pratiques qui s’explique par la proximité géographique des ensembles funéraires (le bassin clermontois). Sur tous ces sites, même si le recours à la crémation se développe progressivement, l’inhumation reste le traitement le plus utilisé. Cette permanence du recours à l’ensevelissement des corps constitue un particularisme local puisque ailleurs en Gaule, la crémation devient majoritaire voire exclusive. Les raisons qui conduisent à de tels choix ne sont pas connues et on retrouve les deux rites au sein d’un même ensemble funéraire sans que la chronologie ou le statut défunt puisse expliquer cette différence.

L’importance des aménagements réalisés pour l’inhumation du défunt est un critère de différenciation sociale. Dans la très grande majorité des cas, les tombes sont modestes, et se résument à une simple fosse étroite. Seules les sépultures les plus richement dotées en mobilier se signalent par des structures funéraires de grandes dimensions. Le dépôt du corps à même la fosse est le plus largement attesté. Plusieurs d’entre elles semblent avoir été fermées d’un couvercle en matériau périssable. Quelques inhumations, celles qui paraissent les plus riches, se distinguent par l’utilisation de coffres ferrés aux extrémités. La position des corps est très variable (sur le côté, sur le ventre, en position fléchie) même si la position sur le dos domine.

à la crémation, se rapporte également une assez grande diversité typologique témoignant de la variété des pratiques. A l’exception de deux bûchers en fosse, repérés à Gerzat, toutes les incinérations correspondent à des dépôts secondaires pratiqués dans des fosses de forme et de taille diverses. Dans la plupart des cas, elles sont de petite dimension (une vingtaine de cm de diamètre). Certaines, qui ne sont pas nécessaires plus riches, sont plus grandes, jusqu’à adopter la forme des fosses utilisées pour les inhumations. Toujours est-il que le mobilier est systématiquement présent sur le bûcher (parure, faune et, plus rarement, la céramique). Il se retrouve de façon fragmentaire mêlé aux restes osseux déposés dans la fosse réceptrice, hors de tout conteneur.

Dans la majorité des cas, le recrutement des ensembles funéraires est équilibré entre hommes, femmes et enfants, qui comptent chacun pour un tiers des défunts environ. Le faible nombre de jeunes enfants, eu égard au schéma de mortalité des populations anciennes, est à souligner. Il peut témoigner d’une moins bonne conservation des ces sépultures ou d’un d’une sélection opérée sur le critère de l’âge des défunts.

La majorité des tombes, dépôts de crémation et inhumations, ne livre pas de mobilier. Seul un tiers comporte de la parure ou de la vaisselle, souvent en faible quantité. La réapparition de la vaisselle céramique dans les tombes illustre le retour des dépôts alimentaires, solides et liquides, dans le rituel funéraire. Il s’agit, dans la plupart, d’un ensemble relativement modeste qui évoque un rite de déposition centré sur l’individu (la part du défunt). La multiplication de ce service « standard », observée pour un petit nombre de tombes (moins de 10 % des sépultures), est à considérer comme signe de distinction sociale. Elle pourrait refléter la capacité de la famille du défunt, ou plutôt de sa famille, à mobiliser une grande quantité de denrées alimentaires pour la cérémonie funéraire. Les effets personnels sont généralement peu nombreux : une ou deux fibules, un bracelet (en fer pour les hommes, en verre ou en bronze pour les femmes) et parfois un collier (plutôt les enfants). Quelques instruments de soin du corps sont parfois présents : une paire de forces, un rasoir ou une pince à épiler…

Deux témoignages signalent toutefois la présence d’une classe privilégiée qui affiche à nouveau son statut par le port des armes. Sur le site de Gandaillat, c’est un homme qui est inhumé, accompagné de sa panoplie militaire complète (épée, lance, bouclier), dans un coffre ferré lui-même installé dans une vaste fosse avec des dépôts alimentaires, liquides et solides (jambon). A Pulvérière, dans les Combrailles, on retrouve cette association entre armement et grande quantité de nourriture. L’une de ces structures de crémation, datée de la fin du IIe s. av. J.-C., livre les restes d’un homme en arme, d’un char (et de son attelage ?), de viande consommée (porcs et volailles), de sept récipients céramique et d’une amphore vinaire.

A partir de l’étude des sépultures, la société arverne du IIe s. av. J.-C. paraît assez fortement stratifiée avec une classe privilégiée, très peu nombreuse (moins de 2 % des défunts), qui affiche aussi bien son caractère guerrier que son pouvoir économique, matérialisé par la mobilisation d’une grande quantité de denrées au cours de la cérémonie funéraire. Pour le reste, la population se répartit en plusieurs groupes qui se différencient sur la base d’un mobilier d’accompagnement (denrées alimentaires, objets de parure ou de toilette) plus ou moins abondamment représenté, voire absent.

Tombe féminine du Pâtural (J. Dunkley, ARAFA)
Tombe féminine du Pâtural (J. Dunkley, ARAFA)
Mobilier céramique d’une tombe de femme de Sarliève (Antoine Maillier © Bibracte)
Mobilier céramique d’une tombe de femme de Sarliève (Antoine Maillier © Bibracte)
Aulnat figure 20 ou 20a = sépulture de guerrier du milieu du IIe s. av. J.-C. (Antoine Maillier © Bibracte)
Aulnat figure 20 ou 20a = sépulture de guerrier du milieu du IIe s. av. J.-C. (Antoine Maillier © Bibracte)
Sépulture à inhumation de Gondole (Y. Deberge, ARAFA)
Sépulture à inhumation de Gondole (Y. Deberge, ARAFA)
Sépulture de guerrier du milieu du IIe s. av. J.-C.
Sépulture de guerrier du milieu du IIe s. av. J.-C.
Inhumation pratiquée dans le comblement médian d’un puits de Gondole
(Y. Deberge, ARAFA)
Inhumation pratiquée dans le comblement médian d’un puits de Gondole
(Y. Deberge, ARAFA)
Bague portée à l’annulaire de la main gauche, pour unique mobilier d’accompagnement (Y. Deberge, ARAFA)
Bague portée à l’annulaire de la main gauche, pour unique mobilier d’accompagnement (Y. Deberge, ARAFA)
Inhumation pratiquée dans le comblement médian d’un puits de Gondole (Y. Deberge, ARAFA)
Inhumation pratiquée dans le comblement médian d’un puits de Gondole (Y. Deberge, ARAFA)

V – Les pratiques funéraires. Les tombes aristocratiques du Ier s. av. J.-C.

Au Ier s. av. J.-C., le caractère ostentatoire des funérailles des élites est encore plus marqué. Sur le cimetière rural de Chaniat, les défunts brûlés sur le bûcher au cours de quatre cérémonies funéraires successives, se signalent par le port, non systématique, d’armes et surtout par la mise en œuvre d’une profusion de récipients (de 30 à 58 par dépôt). Ils supposent la mobilisation de quantités élevées de denrées alimentaires, solides et liquides (jusqu’à 300 litres de boisson alcoolisée pour chaque événement !), et renvoient à une consommation collective de type banquet où le vin semble avoir eu une place centrale. Même si la documentation disponible est encore trop peu abondante, les autres sépultures de cette période paraissent bien plus modestes. En effet, les inhumations dégagées, à Gondole et à Gergovie notamment, livrent peu ou pas de mobilier associé (un vase en céramique, un objet de parure). L’écart semble ainsi se creuser entre une classe dirigeante, très peu nombreuse et qui semble de plus en plus riche, et le reste de la société. A noter que celle-ci paraît, à partir de la fin du IIe s., choisir la crémation.

Évocation du cimetière rural de Chaniat. Illustration : M. Gontier
Évocation du cimetière rural de Chaniat. Illustration : M. Gontier

VI – Les pratiques funéraires. Bibliographie

G. Alfonso, Le site de Rochefort à Gerzat (Puy-de-Dôme), dans C. Mennessier-Jouannet, Y. Deberge, L’Archéologie de l’âge du Fer en Auvergne (actes du XXVIIe colloque international de l’AFEAF, Clermont-Ferrand, 29 mai-1er juin 2003), Monographies d’Archéologie Méditerranéenne, 2007, 305-312.

L. Augier, C. Mennessier-Jouannet, P.-Y. Milcent, L. Orengo, S. Riquier 2007, La France centrale aux IVe-IIIe s. av. n. ère (Auvergne, Berry, Orleanais), dans C. Mennessier-Jouannet, A.-M. Adam, P.-Y. Milcent, La Gaule dans son contexte européen aux IVe-IIIe s. av. n. è. (actes du XXVIIe colloque international de l’AFEAF, Clermont-Ferrand, 29 mai-1er juin 2003), Monographies d’Archéologie Méditerranéenne, 2007, p. 117-176.

F. Blaizot, P.-Y. Milcent 2002, L’ensemble funéraire Bronze final et La Tène ancienne de Champ-Lamet à Pont-du-Château (Puy-de-Dôme), Travaux de la Société Préhistorique Française, 3, 2002.

F. Blaizot, V. Bel, Chr. Bonnet, Y. Deberge, A. Wittmann, S. Barberan, L. Tranoy, 2007, Inhumation and cremation in Roman Gaul : continuity or discontinuity of the burial practices, in : A. Faber, P. Fasold, M. Struck, M. Witteyer (dir.), Körpergräber des 1. – 3. Jahrhunderts in der Römischen Welt, Actes du colloque des 19-20 novembre 2004, Dormitorium des Karmeliterklosters, Münzgasse 8, Frankfurt am Main, Schriften des Archäologischen Museums Frankfurt, 21, 305-321.

P.-Y. Milcent 2004, Le premier âge du Fer en France centrale, Société Préhistorique Française, mémoire XXXIV, 2 vol., 2004.

Deberge, Orengo 2007, Les mobiliers en contexte funéraire en Basse Auvergne, du IIIe au Ier s. av. n. è., dans C. Mennessier-Jouannet, Y. Deberge, L’Archéologie de l’âge du Fer en Auvergne (actes du XXVIIe colloque international de l’AFEAF, Clermont-Ferrand, 29 mai-1er juin 2003), Monographies d’Archéologie Méditerranéenne, 2007, 333-364.

P.-Y. Milcent, F. Delrieu 2007, Tertres et archéologie funéraire en Haute Auvergne dans le contexte du premier âge du Fer en Gaule Méridionale (VIIIe-Ve s. av. J.-C.), dans C. Mennessier-Jouannet, Y. Deberge, L’Archéologie de l’âge du Fer en Auvergne (actes du XXVIIe colloque international de l’AFEAF, Clermont-Ferrand, 29 mai-1er juin 2003), Monographies d’Archéologie Méditerranéenne, 2007, 43-70.

Pion 2007, Autopsie d’une découverte centenaire : la nécropole celtique de l’Odepierre à Diou (Allier), dans C. Mennessier-Jouannet, Y. Deberge, L’Archéologie de l’âge du Fer en Auvergne (actes du XXVIIe colloque international de l’AFEAF, Clermont-Ferrand, 29 mai-1er juin 2003), Monographies d’Archéologie Méditerranéenne, 2007, 313-332.

Pour en savoir plus : Les pratiques funéraires en Auvergne à la fin du second Age du Fer

Le site du Pâtural

Le site du Pâtural : article publié dans « L’Archéologue Archéologie Nouvelle n° 95 avril – mai 2008 » qui nous a aimablement autorisé à le reproduire. Titre original : La ferme indigène du Pâtural à Clermont-Ferrand : un établissement rural au statut particulier

Auteur : Y. Deberge et J. Collis

  • I – Présentation des vestiges
  • II – Enclos funéraire du premier âge du Fer

Le site laténien du Pâtural est localisée en périphérie est de l’agglomération clermontoise, dans la plaine marécageuse. Il a été fouillé de façon extensive (environ un hectare) entre 1987 et 1995 (J. Collis, J. Dunkley et M. Richardson). A ce jour, il s’agit de la seule « ferme indigène » de Limagne dégagée et étudiée de façon approfondie. Cet établissement agricole de la fin de l’âge du Fer, installé à quelques kilomètres au nord de l’agglomération protohistorique d’Aulnat, constitue donc un jalon important pour la connaissance de société arverne.

L’installation de la ferme gauloise succède à deux occupations plus anciennes. La première correspond à une petite nécropole à inhumation datée des VIIe-VIe s. av. J.-C. liée à un habitat localisé 200 m à l’est. La seconde correspond à l’extension maximale, vers l’ouest, d’un habitat daté du début de la période laténienne. Ces vestiges, qui n’entretiennent pas de liens directs avec l’établissement agricole gaulois, témoignent d’une anthropisation ancienne de cet espace sur lequel il s’installe. Du VIIe s. av. J.-C. au IIe s. ap. J.-C. (le site est également réoccupé aux Ier et IIe s. ap. J.-C.), ce secteur apparaît comme un point de fixation l’habitat au sein d’un terroir que l’on estime, si l’on se fie à la carte d’occupation des sols réalisées pour ce secteur de la Limagne, à quelques centaines d’hectares. Ainsi, la création de la ferme au IIIe s. av. J.-C., ne procède pas d’une phase de défrichement, hypothèse souvent avancée pour expliquer l’apparition des établissements ruraux en Gaule du Nord. Elle participe plutôt à cette vaste restructuration de l’espace rural bien attesté en Limagne pour les IIIe et IIe s. av. J.-C. (cf notice sur Les campagnes).

Le site du Pâtural. Plan toutes périodes d’occupation confondues (Y. Deberge, ARAFA)
plan toutes périodes d’occupation confondues (Y. Deberge, ARAFA)
Le site du Pâtural.

A la différence de la plupart des sites ruraux, où la période d’occupation dépasse rarement une ou deux générations, le Pâtural présente une évolution sur la longue durée qui apparaît, de plus, comme relativement atypique. Au départ, l’organisation générale du site permet de l’identifier au modèle classique de la ferme indigène que l’on retrouve de la plaine vendéenne au bassin parisien. Le cœur de l’exploitation rurale correspond à un enclos de forme quadrangulaire dans lequel sont regroupés les bâtiments d’habitation et les structures nécessaires à la bonne marche de la ferme (grenier, grange, bâtiments annexes). Les mobiliers présents témoignent de la présence d’une communauté humaine limitée (une à deux familles). Les principales activités sont d’ordre agricole, production céréalière et élevage. La quantité, la diversité et la qualité des objets, dont un grand nombre de parures et d’importations, distinguent le site du Pâtural des autres établissements ruraux contemporains. Il apparaît comme une ferme indigène au statut économique relativement élevé, siège d’une famille au statut particulier (aristocrates ?).

Le site du Pâtural. Cliché aérien du site au cours de sa dernière année de fouille (V. Guichard, ARAFA)
Cliché aérien du site au cours de sa dernière année de fouille (V. Guichard, ARAFA)
Le site du Pâtural. Tombe à inhumation du premier âge du Fer.
Tombe à inhumation du premier âge du Fer.
Le site du Pâtural. Fragment d’anneau passe-guide à décoration curviligne, La Tène ancienne (Y. Deberge, ARAFA).
Fragment d’anneau passe-guide à décoration curviligne, La Tène ancienne (Y. Deberge, ARAFA).

Dans la seconde moitié du IIe s. avant J.-C., le site connaît des bouleversements importants tant sur le plan structural que fonctionnel. L’enclos agricole disparaît alors même que les vestiges d’occupation se densifient. Le caractère ouvert du site et l’organisation de la zone d’habitat évoque les sites à occupation dense, de type habitats groupés, par exemple celui de Gandaillat. Cette modification dans la structure interne du site, s’accompagne d’un accroissement soudain et marqué des rejets mobiliers. La grande très quantité de mobilier présent (plusieurs milliers de vaisselles céramiques indigènes et importés, plus de cent objets de parure, une vingtaine de meules rotatives) traduit une augmentation de population, entre 10 et 20 fois plus nombreuse, que n’explique pas la démographie naturelle. Cet accroissement démographique va de pair avec une augmentation des capacités de production agricole du site : hausse des capacités de stockage et de la force de traction disponible. C’est dans le même temps, que s’installe, à demeure, un forgeron. Spécialisé dans la manufacture d’objets en fer, cet atelier génère une quantité de déchets qui témoigne d’une production soutenue. L’installation de cet atelier peut être perçue comme une tentative de diversification des activités de production au sein de cette nouvelle agglomération fraîchement constituée. Tout indique que la ferme indigène du Pâtural se mue, peu avant la fin du IIe s. av. J.-C., en hameau à vocation agricole et artisanale.

Déplacement de l’occupation au sein du terroir du Pâtural du VIe s. av. J.-C. au IIe s. apr. J.-C.
Déplacement de l’occupation au sein du terroir du Pâtural du VIe s. av. J.-C. au IIe s. apr. J.-C.

La localisation du site, à moins de 5 km de l’agglomération d’Aulnat, n’est probablement pas étrangère à l’évolution constatée. Ce site constitue le principal débouché des productions agricoles du Pâtural et un modèle en termes d’avantages procurés par la présence d’une activité manufacturière. Son développement a pu exercer une pression, en guise de demande, sur les sites agricoles voisins. Au Pâtural, la solution choisie pour répondre à cette demande croissante semble avoir été la mise en place d’une certaine forme de concentration foncière (extension du domaine cultivable, regroupement des moyens de production de plusieurs unités agricoles et des surplus…). Le développement d’une pratique artisanale relativement importante laisse également envisager la recherche, par les propriétaires du lieu, d’un profit supplémentaire par le contrôle d’une activité à forte valeur ajoutée qui trouve un débouché direct sur le site voisin.

La ferme indigène du IIe s. av. J.-C.
La ferme indigène du IIe s. av. J.-C.
Restitution de la ferme indigène du Pâtural : l’enclos domestique (L. Andrieu, ARAFA)
Restitution de la ferme indigène du Pâtural : l’enclos domestique (L. Andrieu, ARAFA)
Mobilier agricole et domestique. IIe s. av. J.- C. (meule, pot de stockage, pelle à feu) 
Cliché A. Mailler. Centre archéologique européen du Mont Beuvray, Bibracte
Mobilier agricole et domestique. IIe s. av. J.- C. (meule, pot de stockage, pelle à feu)
Cliché A. Mailler. Centre archéologique européen du Mont Beuvray, Bibracte
Mobilier agricole et domestique du IIe s. av. J.- C.
Cliché A. Mailler. Centre archéologique européen du Mont Beuvray, Bibracte
Mobilier agricole et domestique du IIe s. av. J.- C.
Cliché A. Mailler. Centre archéologique européen du Mont Beuvray, Bibracte
Bâtiment sur poteau du Pâtural (J. Dunkley, ARAFA)
Bâtiment sur poteau du Pâtural (J. Dunkley, ARAFA)
Le hameau de la fin du IIe s. av. J.-C. Restitution (L. Andrieu, ARAFA)
Le hameau de la fin du IIe s. av. J.-C. Restitution (L. Andrieu, ARAFA)
Le hameau de la fin du IIe s. av. J.-C. = plan (Y. Deberge, ARAFA)
Le hameau de la fin du IIe s. av. J.-C. = plan (Y. Deberge, ARAFA)

Pour en savoir plus

Deberge, Collis, Dunkley 2007: Le Pâtural à Clermont-Ferrand, Un établissement agricole gaulois en Limagne d’Auvergne, Document d’Archéologie en Rhône-Alpes et en Auvergne, 30, 2007

Deberge 2007 : Les établissements ruraux fossoyés en Basse Auvergne du IIIe au IIe s. av. n. è., dans C. Mennessier-Jouannet, Y. Deberge, L’Archéologie de l’âge du Fer en Auvergne (actes du XXVIIe colloque international de l’AFEAF, Clermont-Ferrand, 29 mai-1er juin 2003), Monographies d’Archéologie Méditerranéenne, 2007, 221-242

La céramique peinte

La céramique peinte : article publié dans « L’Archéologue Archéologie Nouvelle n° 95 avril – mai 2008″ qui nous a aimablement autorisé à le reproduire.

L’expression la plus spectaculaire des Arvernes de la fin de l’âge du Fer est leur céramique peinte. Encore que des découvertes ponctuelles dans d’autres régions suggèrent que la richesse de l’Auvergne dans ce domaine tient en bonne partie à l’importance et à la qualité des sites fouillés. Ce phénomène est strictement limité au IIe s. avant J.-C. Le répertoire comporte des décors géométriques, mais surtout d’extraordinaires compositions insérant d’étranges quadrupèdes aux pattes longilignes dans un foisonnement d’ornements curvilignes. Le recours à la technique de la réserve, analogue à celle de la céramique
grecque à figures rouges, est une autre caractéristique de ces décors qui utilisent un fragile pigment noir d’origine organique.

La céramique peinte. Vases de Gandaillat. Cliché A. Mailler, Centre archéologique européen du Mont Beuvray, Bibracte
Vases de Gandaillat
Cliché A. Mailler, Centre archéologique européen du Mont Beuvray, Bibracte
La céramique peinte. Vases de Gandaillat. Cliché A. Mailler, Centre archéologique européen du Mont Beuvray, Bibracte
Vases de Gandaillat
Cliché A. Mailler, Centre archéologique européen du Mont Beuvray, Bibracte

Les vases illustrés montrent la diversité des solutions décoratives, jamais reproduites à l’identique. Ils sont tous issus de fouilles successives effectuées sur le site d’Aulnat-Gandaillat. L’excellent état de conservation de leur décor s’explique par leur découverte dans les sédiments gorgés d’eau au fond de puits.

Vases de Gandaillat. Restitution 3D : L. Andrieu
La céramique peinte. Vases de Gandaillat. Restitution 3D : L. Andrieu
Vases de Gandaillat. Restitution 3D : L. Andrieu
Vases de Gandaillat
Vase de Gandaillat

Pour plus d’informations : Nouvel ensemble de vases à décors peints en territoire arverne

Toutatis chez les Arvernes !

Toutatis chez les Arvernes : une partie de cet article a été publiée dans « L’Archéologue Archéologie Nouvelle n° 95 avril – mai 2008 » qui nous a aimablement autorisé à le reproduire. L’autre partie est extraite d’un poster présenté au colloque “Ductus” à l’Université de Lausanne les 19 et 20 juin 2008.

Auteur de la notice : B. Clémençon, P. M. Ganne

I – Toutatis chez les Arvernes !

Toutatis est sans doute devenu le plus connu des noms de dieux gaulois, notamment en raison d’une célèbre bande dessinée. Mais, en réalité, quelles sont nos sources, tant littéraires qu’archéologiques ?

Parmi les auteurs antiques, seul le poète Lucain le mentionne dans son épopée La guerre civile (intitulée également La Pharsale). Cet ouvrage fera l’objet de commentaires et interprétations connues sous le nom de Scholies de Berne.

Toutatis chez les Arvernes

Dans ces documents, Toutatis est assimilé tour à tour à Mercure et à Mars. Les historiens qui ont traité de la religion gauloise s’accordent à le définir comme le dieu de la tribu ; Touta, Teuta signifiant en langue gauloise la tribu, voire par extension le peuple. Chaque peuple, voire chaque tribu, avait en quelque sorte le sien, dont on taisait le nom réel par une sorte d’interdit. Dans le texte de Lucain, il est cité avec deux autres dieux, Taranis et Esus, et il est évoqué à propos des sacrifices humains que pratiqueraient les Gaulois.

Toutatis chez les Arvernes

Sans doute existe-t-il une sixième inscription, plus longue, découverte au XIXe s. dans la nécropole.

Toutatis chez les Arvernes

Ce vase a été découvert en janvier 1882 par Ambroise Tardieu lors de ses fouilles dans la nécropole du site de Beauclair. L’inventeur le décrit ainsi : “J’ai recueilli un vase bien curieux et très-rare, dont je donne le dessin. Sa pâte est blanchâtre ; il est couvert en noir. Il a la forme d’une sphère et porte, en relief, des cerfs, des chiens de chasse, le dieu Mercure avec son pétase ou petit chapeau de voyage ; sur la panse de ce beau vase, au-dessus des dessins moulés en relief, le propriétaire de ce même vase a tracé, à la pointe, une inscription que l’on croit lire ainsi | TO TATEIVGO VRVRANA. […] Le précieux vase ci-dessus décrit a, de plus, deux estampilles sigillées, celles du potier : MINARIOF, placées près du dieu Mercure ; l’une, dans un encadrement rectiligne ; l’autre, dans une rosace”. Depuis le décès de Tardieu, en avril 1912, la trace de cet objet est perdue. Contrairement à une rumeur persistante sur le lieu de découverte, ce vase est absent des collections du Musée des Antiquités Nationales à Saint-Germain-en-Laye et du Musée Bargoin de Clermont-Ferrand.

Que nous dit l’archéologie à propos de Toutatis ? En fait, assez peu de chose. Par exemple, nous ne lui connaissons pas de représentation iconographique avec des attributs particuliers comme les autres divinités. Quant à l’épigraphie, elle nous livre une quinzaine de mentions, essentiellement localisées en Angleterre. Il existe aussi en Europe des variantes du thème Teuta dans des épiclèses à Jupiter, Apollon et Mercure. En tout cas, aucune indication n’avait à ce jour été signalée en France.

C’est maintenant chose faite avec la (re)découverte que nous venons de faire chez les Arvernes. En effet, cinq graffites sur céramique portant l’inscription Totates (graphie de Toutatis en gaulois tardif) étaient « en sommeil » dans deux réserves de musée. Ils proviennent tous du même site, celui dit de Beauclair, à cheval sur les communes de Giat et de Voingt (Puy-de-Dôme).

II – Toutatis chez les Arvernes. Le site de Beauclair

Toutatis chez les Arvernes

Le site de Beauclair est une agglomération secondaire antique aux confins des territoires arverne et lémovice, d’ une superficie d’environ 30 hectares, il s’organise autour de la voie aquitanique d’Agrippa qui reliait Lyon, capitale des trois Gaules à Saintes, capitale provinciale. Sa situation topographique le place sur un axe majeur de la romanisation. Son apparat monumental était important : peut-être un amphithéâtre, l’archéologie aérienne a identifié à proximité de la voie un ensemble constitué d’un temple et d’un établissement thermal. Mais c’est surtout la partie sommitale qui a le plus attirée l’attention des chercheurs, une vaste terrasse dominant le site est occupée par un sanctuaire. Pour l’heure, un temple y a été identifié (des temples géminés sont probables), déjà fouillé en 1882, il a surtout fait l’objet de recherches dans les années 1950 par un érudit local : Georges Charbonneau.

Un théonyme oublié

Les cinq graffiti présentés proviennent de ce travail. Ils ont été trouvés dans le temple ou dans son immédiate périphérie.
Les tessons A et B ont été publiés dans la revue Gallia en 1961 et sont conservés depuis au musée Bargoin de Clermont – Ferrand, les trois autres sont inédits, ils se trouvaient dans des caisses à la maison du Patrimoine de Voingt (village où se trouve le site).

L’interprétation théonymique ne sera envisagée par aucun auteur. Les fragments A, B, et E sont des céramiques commune. Le fragment C est une céramique à engobe blanche faisant partie d’un élément architectural. Le fragment D est une sigillée (rubéfiée) de la fin du IIeme, début du IIIeme s.

La graphie Totates correspond à une évolution tardive de la langue gauloise, déjà fortement latinisée.
Le culte de Toutatis n’était jusqu’à cette identification pas attesté archéologiquement en France.

Des marques de dévotion populaire

Les graffiti à Totates du sanctuaire de Beauclair témoignent de la dévotion populaire, tous écrits en lettres capitales, ils reproduisent vraisemblablement un modèle familier.

Cette pratique est bien attestée chez les Arvernes et si souvent elle révèlent des cultes anciens, elle indique également comment ces cultes ont conservés une place en se transformant dans le cadre du polythéisme romain et dans la nouvelle hiérarchie du panthéon de la Cité d’époque impériale.

Le culte de Toutatis en Europe

Les attestations du culte de Toutatis sont en fait assez rares, exception faite de l’Angleterre. Il est présent à Rome, à Seckau en Autriche où il est associé à Mars.

Des variantes sur le thème de la tribu : Touta, Teuta existent sous la forme Toutiorix associé à Apollon ou Teutanus associé à Mercure et à Jupiter, celles-ci particulièrement nombreuses dans la vallée Danubienne.

C’est en Angleterre que le corpus est le plus important. L’association à Mars y est bien attestée.

Mais ce sont surtout des bagues portant l’inscription TOT, au nombre de 51 qui apportent une connaissance nouvelle et convergente avec la nôtre. Elles ont été étudiées par Adam Daubney, parmi ces bagues, l’une d’entre elles, découverte par Greg Dyer présente la mention DEO TOTAT confirmant ainsi le caractère théonymique.

Toutatis existe donc bel et bien, et ce chez les Arvernes. Mieux, il continue même d’être honoré en pleine époque romaine !

Les fouilles des camps de César. 1995-1996

Type de projet : fouille programmée (« Les fouilles des camps de César »)

Conduite du projet : Association pour la Recherche sur l’âge du Fer en Auvergne

Date : 1995-1996

Responsable de l’opération : Vincent Guichard

Notice et documents : Vincent Guichard et Jean Sauvage

I – Les fouilles des camps de César. 1862

Les fouilles des camps de César. Borne au sud-ouest du grand camp. Cliché P.Breuil
Borne au sud-ouest du grand camp (P.Breuil / ARAFA)

C’est à Napoléon III, qui préparait alors son Histoire de Jules César, que l’on doit les premiers travaux de grande envergure pour tenter de localiser le lieu de la bataille de Gergovie. Informé par Marcelin Boudet (érudit local s’intéressant de près à la campagne de César en pays arverne ; sur le rôle de Boudet dans la préparation des campagnes de fouille de 1861 sur le plateau de Gergovie et de 1862 à ses abords, voir Boudet 1944 et dossier d’archive coté 3F161 aux archives départementales du Puy-de-Dôme) sur la localisation possible des fortifications, l’empereur, engagea par l’intermédiaire de son aide de camp le commandant Eugène Stoffel, des fouilles destinées à retrouver les traces du passage de l’armée romaine au pied de l’oppidum gaulois. En s’appuyant sur la description faite par César de la topographie des lieux ainsi que celle des retranchements romains, le commandant Stoffel, militaire de carrière rompu aux problèmes de castramétation, fit réaliser des tranchées destinées à recouper les lignes de fortification. Le commandant Stoffel, qui avait déjà œuvré sur le camp de Mauchamp à Berry-au-Bac (Aisne) en 1861, disposait de moyens financiers et humains importants. Les fouilles débutèrent après la visite de Napoléon III sur le site, le 9 juillet 1862, et s’achevèrent, semble-t-il, au mois de septembre de la même année. Une photographie conservée au musée des Antiquités nationales montre toutefois une tranchée ouverte sur la colline de la Roche Blanche alors que les arbres sont dépouillés de leurs feuilles : s’agit-il d’une tranchée restée ouverte pendant l’hiver 1862-1863 ?

Stoffel décrit dans une lettre à Rice Holmes la méthode employée (Rice Holmes 1899) : « Je plaçais les ouvriers, avec pelles et pioches, sur plusieurs files, dans une direction perpendiculaire à un des côtés supposés du camp, les ouvriers de chaque file à 20 ou 30 mètres les uns des autres. Chacun était chargé d’enlever la couche d’humus sur deux pieds de largeur (soit 0,60 m)… lorsqu’ils arrivaient sur le fossé… après avoir enlevé la terre végétale… ils ne trouvaient plus, comme précédemment, un sol vierge ; au contraire, ils rencontraient une terre meuble qui se détachait facilement, ce qui permettait de supposer qu’elle avait été autrefois remuée. Je faisais alors élargir la tranchée en lui donnant six pieds de largeur (soit environ 1,80 m)… afin que les ouvriers pussent travailler plus commodément ; et ils approfondissaient la tranchée jusqu’à ce qu’ils rencontrassent le sol naturel… si on y était réellement (sur le fossé), on distinguait sans peine sur les deux bords de la tranchée… le profil du fossé qui se détachait par la couleur de la terre mêlée sur la couleur de terre vierge qui l’encadrait. » Lorsqu’un sondage révélait effectivement la présence d’un fossé, d’autres tranchées étaient alors effectuées à quelques dizaines de mètres de part et d’autre de celui-ci dans le but de suivre son tracé. Plusieurs de ces sondages ont été retrouvés lors de nos recherches notamment sur le tracé du « petit camp » où l’on en a dégagé sept. Cette méthode, peu différente de celle que nous avons utilisé, permit, en deux mois de retrouver l’ensemble des fortifications mentionnées par César. Les fouilleurs localisèrent le « grand camp », un vaste quadrilatère, sur le plateau de la Serre d’Orcet et le « petit camp », de taille plus modeste sur la colline de La Roche Blanche à environ trois kilomètres à l’ouest du premier camp. Le « double fossé » décrit par César fut, semble-t-il, retrouvé de façon plus ponctuelle sur la ligne de crête reliant ces deux points hauts du relief.

Il ne nous reste que peu de documents pour apprécier l’ampleur réelle de ces recherches. Aucun compte rendu de fouille, relevés ou plans ne nous sont parvenus. Excepté les deux planches publiées dans l’ouvrage de Napoléon III et une autre planche inédite (et peu informative) conservée au musée des Antiquités nationales, l’ensemble de la documentation relative aux fouilles a disparu, probablement lors de l’incendie des Tuileries. Un compte rendu relate la venue de l’empereur au mois d’août 1862 pour vérifier l’état d’avancement des investigations. Il aurait été enthousiasmé par les résultats obtenus sur le « petit camp » où, selon les dires de Stoffel, les fossés « remplis d’une terre mélangée d’humus et de craie, présentaient des profils qui tranchaient sur la terre dont ils étaient entourés » et satisfait par les travaux entrepris sur le « grand camp », qui étaient cependant déjà rebouchés. Plusieurs témoins contemporains, dont certains, comme l’érudit Mathieu, farouchement opposé à l’identification de Gergovie au plateau de Merdogne, témoignèrent à l’époque de la réalité matérielle des vestiges découverts (Mathieu 1864). Les nombreuses bornes en basalte, qui furent alors implantées à l’emplacement des ouvrages dégagés, constituent encore aujourd’hui le principal indice permettant de guider les recherches.

Le problème de l’identification des lieux de la bataille de Gergovie fut considéré comme réglé. Le plan qui fut dressé à cette occasion constitue encore aujourd’hui la référence pour ce qui est de la description de l’ensemble du système défensif.

Déjà contestés à l’époque par certains, les résultats de ces recherches furent par tous remis en cause après la chute du régime et le discrédit qui en retomba sur le fouilleur de Gergovie et d’Alésia.

II – Les fouilles des camps de César. 1939

Le Révérend Père Gorce, professeur au Séminaire de Clermont-Ferrand, entreprit entre 1936 et 1939 de vérifier les travaux effectués par les fouilleurs du second Empire. Assisté de quelques séminaristes, il procéda à l’ouverture de 48 tranchées implantées perpendiculairement au tracé présumé du fossé en s’aidant du bornage mis en place par Stoffel. Ces travaux permirent rapidement de retrouver les vestiges attendus aux emplacements prévus.

Les recherches de Gorce confirmèrent l’exactitude des observations effectuées lors des fouilles antérieures. Cependant, en deux points du « grand camp », le tracé du fossé qu’il mit au jour différait nettement de celui issu des fouilles de 1862. Au milieu du flanc occidental du camp, Gorce retrouva l’interruption figurée sur le plan de Napoléon III mais il mit en évidence un système complexe de fossés participant, selon lui, au dispositif d’entrée. Pour ce qui est du flanc nord, il proposa un tracé beaucoup plus sinueux que celui mentionné par Stoffel. Les résultats obtenus sur le « double fossé » ne sont quant à eux absolument pas probants.

En dépit de quelques interprétations discutables, ces travaux prouvent, photos à l’appui, la matérialité des vestiges mentionnés par Stoffel. Ils sont cependant difficilement utilisables, les plans et relevés publiés dans son ouvrage César devant Gergovie (Gorce 1942) étant imprécis, parfois contradictoires, et les interprétations proposées parfois abusives. De plus, aucune place n’a été faite au mobilier découvert, que ce soit pour dater l’ouvrage ou pour essayer d’en déterminer la fonction précise.

III – Les fouilles des camps de César. Observations récentes

Les fouilles des camps de César. Le fossé de liaison de La Pialle. Cliché : Jean Sauvage
Le fossé de liaison de La Pialle. (J.Sauvage / ARAFA)

Des découvertes fortuites ont permis quelques observations.

Ainsi, en 1979, lors de la création de l’autoroute A 71, un fossé en forme de “V” fut observé (information orale J.-P. Daugas) à hauteur de la ligne de crête joignant la Serre d’Orcet à La Roche Blanche, à l’emplacement présumé du « double fossé ».

A la Serre d’Orcet, au Tourteix, une opération de sauvetage portant sur un habitat de l’âge du Bronze (Loison 1985) permit l’étude d’un tronçon de fossé rectiligne sur une longueur de 18 m environ. Ce fossé, attribué initialement à la protohistoire récente, présentait un profil régulier en forme de “V” et une largeur d’environ 0,50 m. Son tracé (orientation et localisation) correspond en fait très précisément celui du fossé déterminant le côté est du « grand camp » mis en évidence par les fouilles anciennes.

En 1994, c’est au pied de la colline de La Roche Blanche, au lotissement « Les Terrasses de La Pialle » qu’un fossé en “V”, large de 2,80 m et profond de 1,20 m, fut dégagé lors de la construction d’une maison individuelle. Ce fossé, dégagé sur environ 42 m, appartient vraisemblablement au dispositif de fortifications reliant les deux camps.

Mais c’est avec les fouilles récentes, que nos connaissances ont le plus évolué.

IV – Les fouilles des camps de César. Le grand camp

Le grand camp de César est situé sur le sommet et les pentes du plateau de la Serre d’Orcet. Quinze sondages ont été réalisés principalement aux angles nord-ouest et sud-ouest où subsistent les bornes implantées par Stoffel au XIXème siècle.

Les fouilles des camps de César. Reste du fossé au grand camp. Cliché : V. Guichard
Reste du fossé au grand camp (V. Guichard / ARAFA)
Les fouilles des camps de César. A l'arrière on distingue une borne de Stoffel. Cliché : V. Guichard
A l’arrière on distingue une borne de Stoffel (V. Guichard / ARAFA)

L’angle nord-ouest

Les deux branches rectilignes d’un même fossé ont été observées, la première a été suivie sur 118 m vers l’est en remontant le plateau, l’autre a été perdu après 17 m. Les deux branches sont raccordées par un tronçon arrondi de 16 m de rayon.
Ces fossés ont subi une forte érosion (en 60 ans depuis les observations de Gorse le fossé a été érodé de 0,20 m en moyenne).

L’angle sud-est

Le fossé a été retrouvé sur 29 m, il correspond exactement à celui proposé par Stoffel puis par Gorse.

V – Les fouilles des camps de César. La fortification intermédiaire

Quatre tranchées ont été réalisées en 1995 de part et d’autre de la ligne de crête qui relie les deux camps. Ces sondages ont permis de retrouver le fossé attendu mais de façon discontinue, l’érosion étant très importante.

VI -Les fouilles des camps de César. Le petit camp

Il est situé à 1,5 km au sud de l’oppidum sur une petite colline fortifiée naturellement sur ses flans sud et ouest. Il est délimité, au nord, par un fossé curviligne de 280m qui se poursuit ensuite vers le sud.
Dix huit des vingt-deux sondages réalisés ont permis de retrouver le fossé recherché. On a pu le suivre ainsi sur une longueur de 250m.

L’étude du comblement des fossés défensifs, mais également la typologie des objets recueillis en fouille en 1995 et 1996 (amphores Dressel 1B et pièces d’armement typiquement romaines), ont permis d’en déterminer la datation (Ier siècle av. J.-C.), et d’en attester la fonction militaire romaine.

Les fouilles des camps de César. La trace du fossé découvert par la pelle mécanique
La trace du fossé découvert par la pelle mécanique (V. Guichard / ARAFA)
Les fouilles des camps de César. Le fossé après dégagement
Le fossé après dégagement (V. Guichard / ARAFA)

On remarque que :
– le fossé a été recouvert très rapidement (il n’y a pas d’érosion des parois)
– le fossé a été rempli par le haut (position des pierres)
– la terre du fond est plus noire que le substrat actuel (le talus était certainement recouvert d’herbe…)

Le fossé après dégagement
 Dégagement d’une amphore brisée contre un rocher de la paroi du fossé. Sa position indique qu’elle a été jetée depuis le haut c’est à dire de l’intérieur du camp (V. Guichard / ARAFA)
Amphore en place, type Dressel 1B, utilisée entre 80 et 30 av. J.-C.
Amphore en place, type Dressel 1B, utilisée entre 80 et 30 av. J.-C. (V. Guichard / ARAFA)
Après remontage (les romains sabraient les amphores à la base du col pour les ouvrir)
Après remontage (les romains sabraient les amphores à la base du col pour les ouvrir) (V. Guichard / ARAFA)

Suite à des travaux de terrassement le fossé a encore été retrouvé à plusieurs endroits entre le petit camp et le grand camp.

Le petit camp est situé à 1,5 km au sud de l’oppidum sur une petite colline fortifiée naturellement sur ses flancs sud et ouest. Il est délimité, au nord, par un fossé curviligne de 280 m qui se poursuit ensuite vers le sud.
Dix-huit des vingt-deux sondages réalisés ont permis de retrouver le fossé recherché. On a pu le suivre ainsi sur une longueur de 250 m.
L’étude du comblement des fossés défensifs, mais également la typologie des objets recueillis en fouille en 1995 et 1996 (amphores Dressel 1B et pièces d’armement typiquement romaines), ont permis d’en déterminer la datation (Ier siècle av. J.-C.), et d’en attester la fonction militaire romaine.

Pointes de projectiles de catapulte trouvées collées contre la paroi du fossé, après restauration. Cliché : A. Maillier
Pointes de projectiles de catapulte trouvées collées contre la paroi du fossé, après restauration (A. Maillier / Bibracte)
Trois boulets trouvés dans le remplissage du fossé (deux sont en granite, l’autre en basalte)
Trois boulets trouvés dans le remplissage du fossé (deux sont en granite, l’autre en basalte) (V. Guichard / ARAFA)
Echelle des boulets
Echelle des boulets (V. Guichard / ARAFA)
Le fossé, le talus et la palissade de bois tels qu’on peut l’imaginer en 52 avant J.C
Le fossé, le talus et la palissade de bois tels qu’on peut l’imaginer en 52 avant J.C (L. Andrieu / ARAFA)

Pour en savoir plus

Sur le site de l’ARAFA :

Liens externes :

  • Gergovie à tout prix… Émission de France culture, daté du 17 avril 2021. Avec Vincent Guichard (Protohistorien, directeur général du centre archéologique Européen du Mont Beuvray) et Yann Deberge (Protohistorien, archéologue à l’Inrap)

Gergovie – 2001 – Fouille du rempart

Type de projet : fouille programmée (« Gergovie – 2001 – Fouille du rempart »)

Conduite du projet : Association pour la Recherche sur l’âge du Fer en Auvergne

Responsable de l’opération : Thomas Pertelwieser, assisté de Iris Ott

Notice et documents : Thomas Pertelwieser

Le programme « Gergovie – 2001 – Fouille du rempart » a consisté à dégager une ancienne tranchée de sondage fouillée entre 1933 et 1935 par le comité Pro Gergovia (1932-1937, fouilles du comité Pro Gergovia dirigées par Emile Desforges et Mme Brogan)

La terrasse située en contrebas du rempart a été creusée au plus tard à la fin de l’âge du Bronze.

Fouille du rempart - 2001. Juillet 2001, avant travaux
Juillet 2001, avant travaux (T.Pertelwieser / ARAFA)
Fouille du rempart - 2001. Septembre, le dégagement est terminé
Septembre, le dégagement est terminé (T.Pertelwieser / ARAFA)
Fouille du rempart - 2001. En coupe les éboulis
En coupe les éboulis (T.Pertelwieser / ARAFA)

L’à-pic basaltique taillé lors de la construction de la terrasse a été comblé par les éboulis du rempart.

Mur sur l'arête de l'extrémité sud de la terrasse
Mur sur l’arête de l’extrémité sud de la terrasse (T.Pertelwieser / ARAFA)
Coupe de la butte
Coupe de la butte (T.Pertelwieser / ARAFA)

Quatre états successifs de construction du rempart ont été mis au jour :

  • les deux premiers datés de l’Âge du Bronze (sans plus de précision).
  • les deux derniers de la fin de l’âge du Fer (période de La Tène), en l’occurrence du Ie siècle avant J.-C. (là aussi, sans plus de précisions). Ils correspondent aux parties de murs visibles de la route.

Pour en savoir plus

Sur le site de l’ARAFA :

Liens externes :

  • Gergovie à tout prix… Émission de France culture, daté du 17 avril 2021. Avec Vincent Guichard (Protohistorien, directeur général du centre archéologique Européen du Mont Beuvray) et Yann Deberge (Protohistorien, archéologue à l’Inrap)

Gergovie – 2002 – Fouille du rempart

Type de projet : fouille programmée (« Gergovie – 2002 – Fouille du rempart »)

Conduite du projet : Association pour la Recherche sur l’âge du Fer en Auvergne

Responsable de l’opération : Thomas Pertelwieser, assisté de Iris Ott et Lionel Orengo

Notice et documents : Lucien Andrieu et Thomas Pertelwieser

Rapport : La Roche-Blanche (63) – Oppidum de Gergovie 2002

C’est la première (« Gergovie – 2002 – Fouille du rempart ») d’une série de trois opérations de fouille programmée sur les fortifications de l’oppidum. L’objectif cette année était de fouiller une partie de rempart qui ne l’avait jamais été jusqu’ici.

Fouille du rempart - 2002. Reprise et fin de la coupe Est dégagée en 2001
Reprise et fin de la coupe Est dégagée en 2001 (T.Pertelwieser / ARAFA)
Fouille du rempart - 2002. Après enlèvement de la couche végétale et des basaltes dispersés au dessus du mur
Après enlèvement de la couche végétale et des basaltes dispersés au dessus du mur (T.Pertelwieser / ARAFA)
Fouille du rempart - 2002. Découverte du parement externe, conservé sur une seule assise
Découverte du parement externe, conservé sur une seule assise (T.Pertelwieser / ARAFA)

Après l’évacuation des couches de remplissage, le rempart apparaît maintenant très nettement. Sa largeur à la base est d’environ 2 m.

L’intérieur est fait d’un blocage compact de pierres de taille variable (5 – 20 cm) mélangées avec très peu de terre.

La couche noire organique (à gauche) est un sol de circulation il contient du mobilier daté du Ier siècle avant J.- C. et s’appuie contre la base du mur longitudinal.

L’ultime phase de construction datée, au plus tard, autour du Ier siècle avant J.- C.

Cette fortification semble avoir été en fonctionnement jusqu’au début de l’époque augustéenne puis abandonnée autour du changement d’ère.

Fouille du rempart - 2002. Évacuation des couches de remplissage
Évacuation des couches de remplissage (T.Pertelwieser / ARAFA)
Ouverture sur le rempart
Ouverture sur le rempart (T.Pertelwieser / ARAFA)

On peut remarquer la parfaite conservation du parement interne sur 75 cm de hauteur dans l’alvéole de droite

La couche constituant le talus sur lequel repose le mur a été fouillée, elle renfermait du mobilier (180 fragments de céramique et de nombreux clous) de la fin de l’âge du Fer (milieu du Ier siècle avant J.- C. au 3e quart de ce siècle).

Cette couche paraît être liée à la construction des murs, elle peut avoir constitué une sorte de remblai sur lequel ils auraient été édifiés.

Au fond de l’alvéole gauche on distingue une “ouverture”. Celle-ci a été pratiquée au moment de la construction du mur. Elle mesure 2 m de large vers l’intérieur et 1,70 m vers l’extérieur. Après une durée d’utilisation qu’il est impossible de déterminer, le passage a été condamné et l’ouverture comblée par un “bouchon” de pierres soigneusement parementé sur ses deux faces.

Ouverture sur le rempart
Ouverture sur le rempart (T.Pertelwieser / ARAFA)

La fonction de cette ouverture est limitée du fait de sa topographie (située au-dessus de l’aplomb rocheux taillé) et de sa petitesse. Elle pouvait faciliter d’éventuels travaux d’entretien le long de la muraille et/ou l’accès à la terrasse à l’aide d’une échelle.

Murs transversaux
Murs transversaux (T.Pertelwieser / ARAFA)

Les murs transversaux reposent sur la même couche archéologique que le mur longitudinal sur lequel ils s’appuient.

Leur base suit le pendage ancien du talus. Ceci permet de repousser l’hypothèse que ces murs aient été construits pour constituer des caissons internes ou celle de servir de contrefort au mur longitudinal.

Il pourrait s’agir, comme l’a suggéré Brogan en 1936, de rampes d’accès pour circuler sur le sommet du mur.

Au premier plan le niveau géologique est atteint. On distingue une rangée de pierres qui délimitait la première phase de construction visible en face de l’ouverture dans le mur. Cette dernière couche contenait du mobilier de l’âge du bronze final et de la fin du premier âge du fer. Elle a livré une fibule (Hallstatt D3)

Un des objectifs était aussi de savoir ce qu’il en était exactement du deuxième “mur” au bord de la terrasse. Il a été intégralement dégagé.

Deuxième “mur” au bord de la terrasse
Deuxième “mur” au bord de la terrasse (T.Pertelwieser / ARAFA)

Son épaisseur est de 0,90 m. Sa construction ressemble à celle du rempart mais aucun matériel archéologique ne permet de le dater. Le parement interne du mur situé en bas de la terrasse.
Il est conservé sur 3 assises. Le parement externe qui manquait en 2001 a été découvert. Il ne subsiste plus qu’une seule assise.

Deuxième “mur” au bord de la terrasse
Deuxième “mur” au bord de la terrasse (T.Pertelwieser / ARAFA)

Pour en savoir plus

Sur le site de l’ARAFA :

Liens externes :

  • Gergovie à tout prix… Émission de France culture, daté du 17 avril 2021. Avec Vincent Guichard (Protohistorien, directeur général du centre archéologique Européen du Mont Beuvray) et Yann Deberge (Protohistorien, archéologue à l’Inrap)
  • Site web du musée de Gergovie

Gergovie – 2003 – Fouille du rempart

Type de projet : fouille programmée (« Gergovie – 2003 – Fouille du rempart »)

Conduite du projet : Association pour la Recherche sur l’âge du Fer en Auvergne

Responsable de l’opération : Thomas Pertelwieser, assisté de Iris Ott et Damien Séris

Notice et documents : Lucien Andrieu et Thomas Pertelwieser

Rapport : La Roche-Blanche (63) – Oppidum de Gergovie 2003

I – Gergovie – 2003 – Fouille du rempart. Mur du fond de la terrasse

L’objectif principal de la fouille de 2003 est de comprendre les modes de construction et la datation des anciennes phases.

Aucune indication stratigraphique sur la datation de ce mur n’est présente.
Bien que plus étroit que le mur longitudinal du rempart, il est construit de la même façon. Il s’agit vraisemblablement de constructions contemporaines donneront des informations capitales sur la datation des phases anciennes.

Gergovie - 2003 - Fouille du rempart. Extrémité de la terrasse après enlèvement de la couche végétale
Extrémité de la terrasse après enlèvement de la couche végétale (T. Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie - 2003 - Fouille du rempart. Une semaine plus tard au même endroit. Le mur était bien caché dessous
Une semaine plus tard au même endroit. Le mur était bien caché dessous (T. Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie - 2003 - Fouille du rempart. Le mur de la terrasse est dégagé
Le mur de la terrasse est dégagé (T. Pertelwieser / ARAFA)

II – La terrasse

Une incinération romaine est dégagée sur la terrasse, dans la dernière couche d’éboulis du rempart.

Elle est datée entre 30 et 80 après J.-C. À ce moment-là, le dernier état du rempart est éboulé, son caractère défensif n’existe plus.

Gergovie - 2003 - Fouille du rempart. Éboulis au pied du rempart
Éboulis au pied du rempart (T. Pertelwieser / ARAFA)
Une incinération romaine est dégagée sur la terrasse dans la dernière couche d’éboulis du rempart
Une incinération romaine est dégagée sur la terrasse dans la dernière couche d’éboulis du rempart (T. Pertelwieser / ARAFA)
Urne funéraire datée entre 30 et 80 après J.-C.
Urne funéraire datée entre 30 et 80 après J.-C. (T. Pertelwieser / ARAFA)

Le parement interne du rempart est bien conservé, la couche archéologique a livré des clous de chaussures et des tessons identiques à ceux découverts en 2002 dans l’autre partie.
Les fragments les plus récents datent de la période 25 avant /15 après J.-C. Une bonne longueur du rempart est maintenant découverte

Les pierres sont numérotées et après un relevé très précis le démontage d’ une partie du rempart commence.

Le mobilier des murs transversaux permet de dater leur construction qui ne peut être antérieure au dernier quart du Ier siècle av. J.-C.

Une interprétation claire ne peut être faite de la fonction de ces murs, ils ne se justifient pas comme contrefort, car on n’a constaté aucune menace d’écroulement côté plateau. On a plutôt l’impression d’une construction en forme de rampe pour monter sur le rempart.

Le niveau de leur base et leur mode de construction permettent de penser qu’ils peuvent appartenir au même état stratigraphique que le mur longitudinal. Seul le dégagement complet de la couche passant sous ce mur permettra d’éclaircir la datation de la construction de cette dernière phase du rempart.

Les pierres ont été stockées pour une reconstruction future.

Gergovie - 2003 - Fouille du rempart. EPAD au cavalier Epasnactus
découvert en 2003 sur le terrasse
EPAD au cavalier Epasnactus
découvert en 2003 sur le terrasse (T. Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie - 2003 - Fouille du rempart. Fibule du Hallstatt D3 (-600 avant J.-C.) découverte 2002 côté Nord du talus du rempart sur une couche d’occupation ancienne qui repose immédiatement sur le sol géologique
Fibule du Hallstatt D3 (-600 avant J.-C.) découverte 2002 côté Nord du talus du rempart sur une couche d’occupation ancienne qui repose immédiatement sur le sol géologique (T. Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie - 2003 - Fouille du rempart. Orle de bouclier, découvert sur la terrasse
Orle de bouclier, découvert sur la terrasse (T. Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie - 2003 - Fouille du rempart. De nombreux clous de chaussures sont découverts en 2002 et 2003
De nombreux clous de chaussures sont découverts en 2002 et 2003 (T. Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie - 2003 - Fouille du rempart. Fourreau d’épée découverte 2001, dans les éboulis de la terrasse
Fourreau d’épée découverte 2001, dans les éboulis de la terrasse (T. Pertelwieser / ARAFA)


Gergovie - 2003 - Fouille du rempart. Le “contrefort” ou la « rampe d’accès » est complètement enlevée. À l’arrière le mur est parfaitement construit
Le “contrefort” ou la « rampe d’accès » est complètement enlevée. À l’arrière le mur est parfaitement construit (T. Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie - 2003 - Fouille du rempart. Vue panoramique à la fin des fouilles
Vue panoramique à la fin des fouilles (T. Pertelwieser / ARAFA)

Pour en savoir plus

Sur le site de l’ARAFA :

Liens externes :

  • Gergovie à tout prix… Émission de France culture, daté du 17 avril 2021. Avec Vincent Guichard (Protohistorien, directeur général du centre archéologique Européen du Mont Beuvray) et Yann Deberge (Protohistorien, archéologue à l’Inrap)
  • Site web du musée de Gergovie

Gergovie – 2004 – Fouille du rempart

Type de projet : fouille programmée (« Gergovie – 2004 – Fouille du rempart »)

Conduite du projet : Association pour la Recherche sur l’âge du Fer en Auvergne

Responsable de l’opération : Thomas Pertelwieser

Notice et documents : Lucien Andrieu et Thomas Pertelwieser

Rapport : La Roche-Blanche (63) – Oppidum de Gergovie 2004

  • I – Porte et Bassin ouest
  • II – La jonction entre la porte et le rempart à pierre sèche
  • III – Nouvel état des connaissances

La situation archéologique de la Porte Ouest (anciennement fouillée pendant les années 30) pose des questions irrésolues. Il s’agit d’une construction sûrement gallo-romaine, qui évidemment est connectée avec les structures d’un rempart plus ancien. Les vestiges de ce rempart semblent être comparables à ceux du rempart 2 au sud-est.

La documentation laissée par les anciennes fouilles se réduit à des commentaires minimaux et un plan général simplifié du secteur. En 2004, les fouilles (« Gergovie – 2004 – Fouille du rempart ») ont été limitées à un re-dégagement partiel des structures fouillées en 1937 à 38 et des relevés micro topographiques du secteur.

I – Gergovie – 2004 – Fouille du rempart. Porte et Bassin ouest

Gergovie - 2004 - Fouille du rempart. Avant le début des fouilles
Avant le début des fouilles (T. Pertelwieser / ARAFA)

L’enlèvement de la couche végétale a confirmé la supposition que, pendant les anciennes fouilles, le secteur de la porte a été complètement fouillé : en dessous des couches de déblais, la roche basaltique paraît dans presque tout le secteur. Il ne restait plus que très peu de couche archéologique en place. Une deuxième surprise négative s’est manifestée pendant le nettoyage de murs. Quasiment toutes les structures originales sont recouvertes par des réfections contemporaines en pierres basaltiques maçonnées en mortier ou ciment. La hauteur originale des murs fut augmentée parfois jusqu’à trois assises de pierres. Sur plusieurs endroits, ces réfections se référent peu à la position des murs originaux.

La largeur du couloir fut agrandie de plus de 40 cm ou des angles des murs furent ‘ optimisés ‘ et rendus pointus. Il est à supposer que ces travaux furent effectués pendant les fouilles clandestines des années 80.

Les murs originaux sont tous maçonnés en pierre locale (basalte) et mortier blanc. Certaines parties sont renforcées (angles et lieux de liaison) par des pierres importées et taillées. L’état de conservation varie d’une seule à quatre assises de pierres.

Gergovie - 2004 - Fouille du rempart. Entrée principale
Entrée principale (T. Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie - 2004 - Fouille du rempart.
(T. Pertelwieser / ARAFA)

Les bases des murs reposent partout directement sur la roche basaltique. A l’intérieur de la pièce ‘ B ‘ le rocher est complètement plat et horizontal. Il est vraisemblable qu’il fut taillé par les constructeurs et utilisé comme sol naturel. Dans l’angle des murs, le creusement d’un possible trou de poteau pouvait être observé. Ce creusement présente un diamètre de 35 cm et il était rempli par une couche de terre dure, qui peut correspondre à un remplissage en place. Quatre tessons de céramique ont été découverts dans ce remplissage : ils présentent un terminus post quem de 125 av. J.-C. Le couloir de la porte (secteur 2) ne fut pas complètement dégagé pendant les fouilles des années 30. D’un côté cela est démontré par la préservation d’une couche au-dessus du rocher, qui a livré un nombre des tessons protohistoriques et des silex.

Les traces de deux fosses ont été découvertes dans le couloir en 2004. L’une des fosses est située bien au bord du mur latéral du bastion Est. Certes son remplissage contenait des inclusions de mortier et un fragment de tegula, mais le mur est très clairement construit par-dessus la fosse et est donc postérieur. Le mobilier, par contre, peut être lié à la construction de ce mur. La fosse a un diamètre de 1,00 m environ et une profondeur de 35 cm.

Gergovie - 2004 - Fouille du rempart. Une des deux fosses
une des deux fosses (T. Pertelwieser / ARAFA)

La trace de la deuxième fosse est largement érodée. Elle est située plus vers le nord dans un alignement avec les autres fosses. Son diamètre est de 0,95 m, sa profondeur préservée de 25 cm. Ces structures sont à des distances régulières de 3,5 m les unes des autres.

Par leur régularité, ces fosses semblent être liées à une construction antérieure à la porte gallo-romaine. Il est possible que nous ayons découvert ici les vestiges, (des grands trous de poteau) d’une porte précédente.L’ouverture du secteur 10 avait pour objectif le contrôle d’un petit talus au sud du bastion ouest. Ce secteur n’a pas été touché par les anciennes fouilles, donc on pouvait espérer y rencontrer des vestiges vierges.

L’enlèvement de la couche végétale a livré un grand état de pierres basaltiques en position meuble et éboulée. Il est frappant qu’à ses extrémités nord et sud, la taille des pierres change en blocs de grand format (jusqu’au 60 cm), la partie intérieure par contre se compose de pierres plutôt petites de 20 à 25 cm.


On peut supposer qu’il s’agit là des parements (grands blocs) et du fourrage (petites pierres) d’un reliquat du rempart à pierres sèches qui fut démonté ou démoli à l’époque de la construction de la porte gallo-romaine

En effet, la suite du rempart, tel qu’il est préservé dans le sondage 2, projetée vers l’Est correspond parfaitement à l’emplacement du petit talus.

(T. Pertelwieser / ARAFA)

II – Gergovie – 2004 – Fouille du rempart. La jonction entre la porte et le rempart à pierre sèche

Jonction entre le rempart maçonné et celui en pierre sèche
Jonction entre le rempart maçonné et celui en pierre sèche (T. Pertelwieser / ARAFA)

Le mur longitudinal du rempart est relativement mal préservé.

Suite aux fouilles et travaux précédents, après lesquels le secteur fut laissé ouvert, son parement interne s’est éboulé ou est en train de s’ébouler. La jonction avec le mur de la porte montre que le parement externe fut complètement démonté et le fourrage du mur longitudinal fut en partie enlevé. Le mur fut construit directement le long de cette interface de démontage de façon que son parement interne s’appuie contre le reste du mur longitudinal sur une longueur de 8 m. Le mur longitudinal présente des traces de réfection ancienne, qui sont très vraisemblablement liées à la construction de la porte gallo-romaine.

D’un côté, il aurait été nécessaire de reconstruire en partie le fourrage du mur longitudinal et de remplir l’espace vers le parement interne du mur. En plus, il y a des réfections claires du parement interne du mur longitudinal. Un deuxième parement se trouve déplacé vers l’intérieur, sur le haut du mur longitudinal. Ce parement consiste en blocs de calcaire de plus grand format (jusqu’à 70 cm) que le parement original. Son tracé ne correspond pas exactement à celui du premier parement. En fait, il est légèrement arrondi en forme convexe et appliqué vers l’intérieur du mur.

III – Nouvel état des connaissances

Dans le secteur de la porte, la fouille « Gergovie – 2004 – Fouille du rempart » a livré des vestiges qui peuvent indiquer l’existence d’une construction précédente à la porte gallo-romaine.

A l’origine, le rempart en pierre sèche semble avoir continué à l’emplacement de la porte et un alignement des possibles creusements de poteaux verticaux pourrait correspondre à une telle construction.

Tous ces aménagements ne sont pas datables pour l’instant et restent difficiles à interpréter. L’étude du mobilier laténien et gallo-romain du secteur de la Porte Ouest démontre la provenance de la grande majorité des trouvailles dans la deuxième moitié du Ier siècle av. J.-C. Il est un peu surprenant de constater que les mobiliers du Ier siècle ap. J.-C. et postérieur sont quasiment inexistants.

Une fouille sur une grande surface pourra donner les informations nécessaires afin de pouvoir répondre à ces questions.

Pour en savoir plus

Sur le site de l’ARAFA :

Liens externes :

  • Gergovie à tout prix… Émission de France culture, daté du 17 avril 2021. Avec Vincent Guichard (Protohistorien, directeur général du centre archéologique Européen du Mont Beuvray) et Yann Deberge (Protohistorien, archéologue à l’Inrap)
  • Site web du musée de Gergovie

Gergovie – 2004 – L’histoire d’une portion du rempart

Type de projet : fouille programmée (« Gergovie – 2004 – L’histoire d’une portion du rempart »)

Conduite du projet : Association pour la Recherche sur l’âge du Fer en Auvergne

Responsable de l’opération : Thomas Pertelwieser, assisté de Iris Ott

Notice et documents : Lucien Andrieu et Thomas Pertelwieser

  • Phase I. (~3000 / 750 av. J.-C. Fin du Néolithique – fin de l’Âge du Bronze)
  • Phase II. Première étape de construction : 650/580 av. J.-C. (HA D1)
  • Phase II. Deuxième étape de construction : fortification 1 ; 650/580 av. J.-C. (HA D1)
  • Phase II. Troisième étape de construction : fortification 1 ; 650/510 av. J.-C. (HA D1)
  • Fonctionnement : fortification 1 ; 510/480 av. J.-C. (HA D3)
  • Destruction : fortification 1 : 500/375 av. J.-C. (HA D/LT A)
  • Phase III. Occupation et utilisation de la terrasse : 75/25 av. J.-C.
  • Phase IV. Construction du long mur de rempart et de celui de la terrasse : fortification 2 ; 60/15 av. J.-C.
    • Construction des murets transversaux : fortification 2 : 60/15 av. J.-C.
    • Utilisation et fonctionnement : fortification 2 : 60/15 av. J.-C.
    • Réfection et fermeture de la poterne : fortification 2 : 60/15 av. J.-C.
    • Utilisation et fonctionnement : fortification 2 ; 60/15 av. J.-C.
    • Destruction et abandon : fortification 2 ; 25 av. / 15 ap. J.-C.
  • Phase V. Incinération : 20/60 ap. J.-C.

Gergovie – 2004 – L’histoire d’une portion du rempart. Phase I. (~3000 / 750 av. J.-C. Fin du Néolithique – fin de l’Âge du Bronze)

Le remblai du rempart a permis la conservation d’une couche d’humus contenant du mobilier daté de la fin du Néolithique jusqu’à la fin de l’âge du Bronze.

Gergovie - 2004 - L’histoire d’une portion du rempart. Couche d'occupation avant le construction du premier rempart
Couche d’occupation avant le construction du premier rempart (T. Pertelwieser / ARAFA)

Gergovie – 2004 – L’histoire d’une portion du rempart. Phase II. Première étape de construction : 650/580 av. J.-C. (HA D1)

Gergovie - 2004 - L’histoire d’une portion du rempart. Falaise  taillé et construction de la terrasse
Falaise taillé et construction de la terrasse (T. Pertelwieser / ARAFA)

L’édification de la grande terrasse a sûrement marqué le début des travaux sur la première fortification.

La terrasse fut creusée profondément dans la pente naturelle de manière à former un replat horizontal d’une largeur maximale de 15 m et un escarpement rocheux qui est encore préservé sur 2,50 m de hauteur. La partie haute de ce front de taille est fortement érodée. La hauteur originale jusqu’au niveau du replat du plateau et de la base du rempart pouvait être élevée jusqu’à 4,40 m. Les déblais constituent la base de matériaux de construction du rempart.

À l’extrémité du bord du plateau des aménagements initiaux à la construction du rempart sont observables.

La couche d’occupation ancienne fut nivelée.

À environ 3 m de l’escarpement deux trous de poteau ont été observés. Ils sont parallèles à l’axe du rempart et distants de 1,10 m. Leurs creusements sont fortement érodés, leurs diamètres (40 et 35 cm) et leur profondeur (15 cm) ne sont donc que des indices. Surtout leur position proche à l’arête d’érosion du rempart ne permettait pas d’observer des régularités, car de possibles autres vestiges ont tout simplement été pulvérisés par l’érosion. Ces trous de poteau sont les seuls indices de l’emplacement du parement externe du rempart 1.

Gergovie - 2004 - L’histoire d’une portion du rempart
(T. Pertelwieser / ARAFA)

Sur le même niveau, à 1,5 m de l’emplacement du parement supposé, un dépôt de deux vases céramiques aux 2/3 conservés fut pratiqué. Cette trouvaille peut être interprétée comme sacrifice ou dépôt lié à la construction du rempart 1.

Gergovie - 2004 - L’histoire d’une portion du rempart. Grand vase écrasé sous le rempart
Grand vase écrasé sous le rempart (T. Pertelwieser / ARAFA)

Des faits similaires sont assez fréquents pour des fortifications, comme la découverte de 4(!) dépôts d’outils en fer à Linz-Gründberg (Autriche, fouille de O.H. Urban), deux dépôts (os d’animaux, meules) ont été dégagés cette année sur le Mont Lassois en Bourgogne (fouille T. Pertlwieser).

Directement au sud de ce dépôt se trouve un alignement de blocs de basalte sur 3,10 m de longueur dans l’axe du rempart. D’autres blocs sont aménagés sur le bord ouest du dépôt. Il pourra s’agir soit d’une sorte d’encadrement de la déposition soit – et c’est plus vraisemblable – d’un reste d’un renforcement interne du parement externe.

Deuxième étape de construction : fortification 1 ; 650/580 av. J.-C. (HA D1)

Gergovie - 2004 - L’histoire d’une portion du rempart. Reste du rempart 1
Reste du rempart 1 (T. Pertelwieser / ARAFA)

La deuxième étape est marquée par une première couche de déblai, qui se compose de la terre organique, similaire à la couche d’occupation. En effet il est vraisemblable qu’il s’agit de la même terre, qui était aplanie en dessous de la base du rempart et déversée dans la rampe. Au-dessus se trouve une deuxième couche de déblai.

La deuxième plate-forme de pierres est la mieux conservée de ces états. Son extrémité nord est délimitée par une face interne, qui est partiellement préservée sur deux assises de blocs
basaltiques. La distance entre cette face interne et la position supposée du parement externe est 7 m environ.

Deux possibles trous de poteau ont été observés. Ils sont parallèles à l’axe de la face interne. Il est remarquable que les positions des trous de poteau observés au niveau de la 1ere étape de construction et le poteau IF 10148 se trouvent dans un angle droit et que la distance entre ceux de la 2 ème étape (2,30 m) correspond quasiment au double de ceux de la 1ere étape (1,10 à 1,15 m).

Un socle de pierres situé sur la plate-forme à son extrémité nord délimite la 2ème étape et établit un contact direct avec la 3 ème.

Gergovie - 2004 - L’histoire d’une portion du rempart. Trou de poteau
Trou de poteau (T. Pertelwieser / ARAFA)

Troisième étape de construction : fortification 1 ; 650/510 av. J.-C. (HA D1)

Éboulis provenant de la destruction du rempart
Éboulis provenant de la destruction du rempart (T. Pertelwieser / ARAFA)

Au-dessus de la couche de remblai se trouve la troisième plate-forme en pierres. A sa base elle est en contact direct avec le socle basaltique. Les traces de trois possibles trous de poteau ont été observées. Leurs emplacements ne se trouvent pas en relation régulière avec ceux des étapes précédentes. Il est à noter qu’il s’agit dans ce cas plutôt d’espaces vides entre les blocs de basalte de la plate-forme, qui ne peuvent pas être attribués aux vestiges de construction avec certitude.

Au-dessus de ce niveau se trouvent les restes d’une autre couche de remblai d’une consistance plus organique par comparaison avec les autres. Il pourra s’agir dans ce cas-là d’un reste peu épais de la surface originale du rempart 1. L’inclinaison de cette couche peut servir à calculer la hauteur originale de la construction. Sa projection prolongée vers l’emplacement du parement externe démontre une hauteur minimale du rempart 1 de 2,30 m.

Fonctionnement : fortification 1 ; 510/480 av. J.-C. (HA D3)

La phase de fonctionnement du rempart 1 se présente à l’emplacement du talus par une couche d’occupation de consistance organique et située contre la face interne du rempart. En 2002 cette couche a livré une fibule du HA D3. La couche peut être interprétée comme sol de circulation contemporain au fonctionnement du rempart 1.

Sur la terrasse, une couche d’altération du substrat s’est formée postérieurement à son édification.
Sur ce niveau, préservé par les éboulis, se trouvent les restes d’une couche d’ancien humus. Sa surface correspond à un sol de circulation.

Destruction : fortification 1 : 500/375 av. J.-C. (HA D/LT A)


À l’emplacement du talus, la phase d’abandon ou respectivement de destruction du rempart 1 est uniquement observable par des structures qui sont liées à la construction du rempart 2.

Sur la terrasse, la couche d’éboulis est composée de blocs de basalte d’une taille identique à ceux des plates-formes du talus. Il est remarquable que la quantité de matériaux éboulés, qui se trouve sur la terrasse, correspond parfaitement au volume manquant sur le talus, entre la position supposée du parement externe et les structures conservées.


Gergovie – 2004 – L’histoire d’une portion du rempart. Phase III. Occupation et utilisation de la terrasse : 75/25 av. J.-C.

Sol d'occupation sur la terrasse
Sol d’occupation sur la terrasse (T. Pertelwieser / ARAFA)

Situés entre les éboulis du rempart 1 et de la deuxième fortification les seuls vestiges des interventions humaines datables autour de la Guerre des Gaules ont été observés sur la terrasse. Il s’agit d’un horizon de terre organique, contenant les restes d’une fosse avec un diamètre de 1 m environ. L’aspect du matériel, aux cassures par comparaisons fraîches, laisse supposer un horizon d’utilisation de la terrasse.

Gergovie – 2004 – L’histoire d’une portion du rempart. Phase IV. Construction du long mur de rempart et de celui de la terrasse : fortification 2 ; 60/15 av. J.-C.

À l’emplacement du talus, la construction du rempart 2 est marquée par l’interface de construction, qui recoupe les couches de remblai du rempart 1. Une perturbation du blocage de pierres est liée à cette intervention. Deux couches de remblai reposent sur ce niveau et servent comme aplanissement pour la construction des structures par-dessus.

La construction des vestiges structurels du rempart 2 semble avoir été effectuée en deux étapes. La première, correspondante à la phase IVa1, est l’édification du mur longitudinal. Il est maçonné en technique de pierre sèche, les parements sont construits avec des blocs de basalte non taillés, d’un diamètre variable de 15 à 50 cm au plus.

La grande majorité des pierres a un diamètre de 20 à 30 cm. Le fourrage consiste en un remplissage avec des pierres plutôt petites de 10 à 20 cm. L’état de conservation du mur longitudinal montre une dégradation de l’ouest à l’est.

Rempart 2
Rempart 2 (T. Pertelwieser / ARAFA)

A l’extrémité ouest, son parement interne est préservé sur 0,95 m de hauteur (8 – 10 assises de pierres), à l’Est sur seulement 0,30 à 0,40 m (2 – 3 assises). Dans la coupe Est du sondage 1 il ne reste aucune trace du mur longitudinal, ce que peut être une conséquence de la construction de la route ou respectivement du petit parking, qui se trouve dans l’angle sud-est du plateau. Le parement externe n’est que préservé sur une assise de pierres, et il se trouve en position d’écroulement. Le mur a une largeur de 2,10 à 2,20 m. Dans les carrés F à H, le mur est interrompu par une petite ouverture ou poterne. Elle mesure 2 m au nord et 1,7 m au sud et donc est légèrement tronconique. Comme sa position ne laisse aucun accès au contrebas du rempart sur la terrasse, il est à supposer qu’il s’agissait d’un accès au côté externe du mur longitudinal, afin de permettre de travaux de construction ou réparation.

Sur l’arrêt de la terrasse, un petit muret parallèle à l’axe du rempart a été édifié. Sa maçonnerie correspond à celle du mur longitudinal. Sa largeur est relativement irrégulière et varie de 0,90 à 1,40 m. Il est préservé sur 0,60 m de hauteur maximale (3 à 4 assises de pierres), le parement externe n’est préservé que sur une assise.

Construction des murets transversaux : fortification 2 : 60/15 av. J.-C.

Muret transversal appuyé contre le mur du rempart
Muret transversal appuyé contre le mur du rempart (T. Pertelwieser / ARAFA)

La deuxième étape de construction du rempart 2 correspond à l’édification de murets transversaux contre la face interne du mur longitudinal. Les vestiges de trois de ces murets furent dégagés pendent les fouilles. Ils sont distants les uns des autres de 4,10 m (muret K à L) et 4,90 m (muret L à M). Leur mode de construction correspond à celui du mur longitudinal et leurs bases reposent sur le même niveau de construction.

Le muret K est préservé sur 3,70 m de longueur et sur 0,95 m de hauteur, sa largeur maximale est 1,70 m.

Le muret L a des dimensions comparables : 3,00 m de longueur, 0,50 m de hauteur et 1,70 m de largeur.

Le muret M n’est qu’un reliquat de son parement ouest, il fut presque complètement détruit suite aux fouilles des années 30.

L’état de conservation commun de murets K et L montre une dégradation forte vers l’intérieur du plateau.

À l’extrémité sud les murs ne sont que préservés sur une seule assise de pierres.
C’est peut-être une conséquence de la destruction partielle du talus pendant la construction de la route du plateau.

Les bases des murets ainsi que les assises des pierres des parements présentent une légère inclinaison vers le nord, en suivant le pendage de la rampe du rempart 1 en dessus.

Utilisation et fonctionnement : fortification 2 : 60/15 av. J.-C.

Une fine couche de terre organique, située à la base de la poterne et contre les parements de ses angles peut correspondre à un sol de circulation de la phase IVb.
Elle peut présenter un fonctionnement relativement court de cet état.

Réfection et fermeture de la poterne : fortification 2 : 60/15 av. J.-C.

La poterne
La poterne (T. Pertelwieser / ARAFA)

La poterne fut refermée peut-être directement après l’achèvement de travaux de construction.

Le parement externe de cette fermeture est préservé sur une assise de pierres. Le parement interne est constitué en de grandes pierres plates, trouvées en position d’éboulement.

L’espace entre ces parements fut rempli avec un fourrage de pierres de plus grand volume comparé au mur longitudinal.

Utilisation et fonctionnement : fortification 2 ; 60/15 av. J.-C.

Situées dans les alvéoles des murets transversaux, des couches de terre organique sont posées contre leurs parements et contre celui du mur longitudinal. L’une se trouve à l’ouest du muret K, une autre entre les murets K et L et une troisième entre L et M. Ils correspondent à un niveau de circulation de la phase IVd. Cette interprétation est renforcée par la trouvaille de plusieurs clous de chaussures romaines, dont plusieurs exemplaires dites à la croix, et un nombre de clous de maçonnerie.

Destruction et abandon : fortification 2 ; 25 av. / 15ap. J.-C.

L’abandon du rempart 2 est marqué sur le talus par une interface de destruction, qui correspond au bord de démolition du mur longitudinal et des murets transversaux. Au côté externe du rempart se trouve une couche d’éboulis, constituée des pierres écroulées du mur longitudinal. Au côté interne le seul éboulis identifiable est une couche qui correspond au comblement écroulé de la fermeture de la poterne. Les alvéoles entre les murets transversaux sont remplies avec des couches mélangées de terre et des pierres. Ce niveau ensuite fut recouvert avec un dense blocage de grands blocs basaltiques, qui remplit complètement les alvéoles et se disperse aussi au-dessus des bords supérieurs des murs.

Sur la terrasse les couches d’éboulis correspondent à l’éboulement du rempart 2. La couche d’éboulis du mur sur l’arrêt de la terrasse est positionnée de façon équivalente.
Le mobilier de ces niveaux est relativement homogène, l’abandon du rempart 2 semble avoir été un processus intentionnel effectué rapidement.

Gergovie – 2004 – L’histoire d’une portion du rempart. Phase V. Incinération : 20/60 ap. J.-C.

Incinération
Incinération (T. Pertelwieser / ARAFA)

La trouvaille d’un reste d’au moins une incinération démontre une utilisation de la terrasse postérieure au fonctionnement des fortifications.

La tombe fut creusée dans la dernière couche d’éboulis du rempart. Elle est fortement érodée et bouleversée. Le fond d’un vase se trouve in situ. Il contient des fragments d’os humains brûlés et un petit objet en fer non identifiable. Dans les environs proches, il y avait de très nombreux fragments de céramiques appartenant à plusieurs vases ainsi que des os brûlés. Sa position stratigraphique prouve qu’à une date située entre 30 et 60 ap. J.-C., le rempart 2 était déjà éboulé. A ce moment, le caractère défensif de l’angle sud-est du plateau n’existe plus.

Pour en savoir plus

Sur le site de l’ARAFA :

Liens externes :

  • Gergovie à tout prix… Émission de France culture, daté du 17 avril 2021. Avec Vincent Guichard (Protohistorien, directeur général du centre archéologique Européen du Mont Beuvray) et Yann Deberge (Protohistorien, archéologue à l’Inrap)
  • Site web du musée de Gergovie

Gergovie – 2005 – Fouille du rempart

Type de projet : fouille programmée (« Gergovie – 2005 – Fouille du rempart »)

Conduite du projet : Association pour la Recherche sur l’âge du Fer en Auvergne

Responsable de l’opération : Thomas Pertelwieser, assisté de Iris Ott

Notice et documents : Lucien Andrieu et Thomas Pertelwieser

Rapport : La Roche-Blanche (63) – Oppidum de Gergovie 2005

  • I – Le bastion ouest
  • II – L’entrée et la porte
  • III – Sondage dans le rempart sud

La fouille de 2005 (« Gergovie – 2005 – Fouille du rempart ») a permis de dégager la porte Ouest dans son intégralité. Le résultat principal est que la quasi-totalité du site a été dégagé au cours des fouilles de Brogan et Desforges en 1937 à 1938, chose qui était impossible de prévoir avant les opérations de 2004 et 2005Afin de pouvoir documenter toutes les structures de la porte Ouest, les réfections modernes sur les parties hautes des murs ont été enlevées dans tous les secteurs de la fouille.

Gergovie - 2005 - Fouille du rempart. La fouille de 2005 a permis de dégager la porte ouest dans son intégralité
La fouille de 2005 a permis de dégager la porte ouest dans son intégralité (T. Pertelwieser / ARAFA)

I – Le bastion ouest

La partie ouest de la pièce du bastion Ouest est le seul secteur qui livre des niveaux archéologiques préservés, c’est la seule qui ne fut pas entièrement fouillée.

Ces niveaux comprennent essentiellement des couches de remblais qui ont servi au nivellement du substrat.

Gergovie - 2005 - Fouille du rempart. Bastion ouest
Bastion ouest (T. Pertelwieser / ARAFA)

Le mobilier collecté dans ces niveaux, relativement homogène bien que peu abondant, nous donne un terminus post quem pour la construction de cette porte. Même s’il n’est pas abondant, ce mobilier permet de donner de proposer une datation aux années 20-5 av. J.-C. pour la construction de la porte. Cette proposition de datation, que l’on pourra difficilement préciser, compte tenu du caractère ténu des niveaux archéologiques conservés, permet toutefois de repousser confirmer la datation ancienne du rempart antérieur en pierres sèches.

Le mur d’environ 90 cm de largeur est conservé sur 7 assises de pierres au maximum.

De gros blocs de basalte ont servi à remblayer la pièce jusqu’au niveau de la base des murs ouest et nord. Ces couches de remblai passent sous les murs ouest et nord mais s’appuient contre le parement interne du mur sud. Il semble toutefois que ces trois murs sont contemporains (comme en témoigne les chaînages d’angle observé) et résultent d’une même phase de construction.

Gergovie - 2005 - Fouille du rempart. Le puits situé sous le mur maçonné
Le puits situé sous le mur maçonné (T. Pertelwieser / ARAFA)

L’enlèvement de ce remblai a révélé la présence d’un muret en pierre sèche, orienté vers le nord-est et de son éboulis. Seul le parement Nord-Ouest de ce muret est conservé sur une seule assise de pierres. L’extrémité sud du mur est complètement détruite. À son autre extrémité, il passe sous le mur nord de la pièce.

Sous ce niveau une découverte inattendue a été faite à la fin de la campagne de fouille. En partie engagé sous les murs Sud et Ouest de la pièce, a été mis en évidence l’ouverture d’un puits ou d’une citerne. En plan, cette structure est de forme circulaire. Sa construction fait appel à la pierre pour la partie dégagée du cuvelage. Elle n’a fait l’objet, compte tenu de la date de sa découverte, que d’une fouille superficielle sur une hauteur de 90 cm.

Le mobilier céramique présent dans ces couches, notamment un petit lot homogène de vaisselle d’importation (sigillée italique et gobelet à parois fines), permet de donner un terminus post quem aux années 20 av. J.-C. pour cette phase de construction.

Le mobilier du remblai contient également plusieurs éléments métalliques qui peuvent appuyer cette identification à une phase de construction.

II – Gergovie – 2005 – Fouille du rempart. L’entrée et la porte

Dans le secteur de la porte, la fouille « Gergovie – 2005 – Fouille du rempart » a livré des vestiges qui peuvent indiquer l’existence d’une construction précédente à la porte gallo-romaine. À l’origine, le rempart en pierre sèche semble avoir continué à l’emplacement de la porte et un alignement des possibles creusements de poteaux verticaux pourrait correspondre à une telle construction. L’enlèvement de la couche végétale et des déblais des anciennes fouilles a révélé la présence d’un éboulis de blocs de basalte qui s’étend vers le Sud (en direction de la pente) et vers le Nord contre la base de la façade externe du bastion Ouest. Sous cet éboulis la structure en pierres se présente dans son état original.

Gergovie - 2005 - Fouille du rempart. Le puits situé sous le mur maçonné
Le puits situé sous le mur maçonné (T. Pertelwieser / ARAFA)


Il s’agit d’une structure irrégulière, sans organisation intérieure. Son bord Nord est complètement désorganisé alors que les faces Sud et Est possèdent un parement externe très irrégulier bâti en pierres sèches de taille variable. Ce parement est préservé sur jusqu’à 3 assises de pierres. L’axe du parement est parallèle à l’axe de l’ancien d’accès depuis le bas et tourne vers le nord-est en direction de la porte. L’ancien accès présente, comme cela avait été remarqué par nos prédécesseurs, une surface constituée d’une couche de petits galets basaltiques, dernier vestige d’un empierrement originellement plus conséquent. Une fine couche de terre végétale la sépare du rocher.

Gergovie - 2005 - Fouille du rempart.
(T. Pertelwieser / ARAFA)

Dans ce secteur de la pente, la roche présente plusieurs marches dont l’origine naturelle est probable. À l’extrême limite du plateau, à proximité du bord Ouest du chemin d’accès et à 0.90 m du parement de la structure massive en pierres, une petite structure en creux a été dégagée. Il peut s’agir d’un trou de poteau. Son remplissage a livré un clou enfer. Toutes les couches situées à cet emplacement (structure en pierres incluse) ont livré un mobilier très fragmenté et très érodé avec quelques contaminations par des éléments modernes (verre de bouteille, chaîne de tronçonneuse’). Sous la structure en pierre a été mis en évidence une fine couche de terre contenant un grand nombre de fines inclusions de mortier de chaux. Ce niveau, qui repose lui-même sur un paléosol surmontant le substrat, peut être interprété comme correspondant au niveau de construction de la porte maçonnée. Le mobilier, qui est très peu abondant, ne permet toutefois pas de proposer une datation pour la mise en place de ces couches Contrairement à nos espérances, il n’a pas été possible de constater si le rempart ancien possédait une entrée ou porte à cet emplacement. La découverte de trois fosses ou trous de poteaux alignés dans cet espace en 2004laissait pourtant espérer la mise en évidence d’une construction à poteaux porteurs. Aucune autre structure analogue n’a été découverte cette année. La structure massive en pierres sèches située en avant du bastion ouest ne peut être identifiée aux restes d’un rempart ruiné. Il s’agit probablement du stockage des pierres résultant du démontage du rempart protohistorique au moment de l’édification de la porte maçonnée. Son parement externe résulte probablement d’une activité d’épierrage. Le chemin qui traverse cet espace et passe en partie sur les vestiges de la porte ouest a été utilisé jusqu’au début du 20e siècle. Cette porte correspond donc à un ré habillage d’une partie du rempart probablement au cours de la période augustéenne

Deux creusements de forme rectangulaire de 80 cm sur 40 cm ont étés dégagés (Est) et de 100 cm sur 40 cm (Ouest).

Leur position correspond aux extrémités de la base du seuil découverte en 2004. Il pourra donc s’agir des empreints de grands poteaux en bois disposés verticalement et aux angles extérieurs de l’entrée : dispositif de porterie en bois.

Il y a deux creusements de chaque coté du seuil
Il y a deux creusements de chaque coté du seuil (T. Pertelwieser / ARAFA)

Deux autres creusements ont aussi été dégagés à l’extrémité de la sortie de la porte.
Ces vestiges sont toutefois très clairement moins bien préservés. À l’Est, il correspond à un emplacement vide de forme carrée de 75 cm par 65 cm, qui a dû à l’origine servir à l’installation soit d’un poteau soit d’un élément architectural en pierre. La structure Ouest est dans un état de conservation encore plus médiocre. On peut toutefois observer l’empreinte sur un côté soit d’un poteau ou soit d’une pierre taillée ;

À partir de ces éléments, une construction à double porte (externe et interne) peut être restituée. Tous ces aménagements ne sont pas datables pour l’instant et restent difficiles à interpréter. L’étude du mobilier laténien et gallo-romain du secteur de la Porte Ouest démontre la provenance de la grande majorité des trouvailles dans la deuxième moitié du Ier siècle av. J.-C. Il est un peu surprenant de constater que les mobiliers du Ier siècle ap. J.-C. et postérieur sont quasiment inexistants. Une fouille sur une grande surface pourra donner les informations nécessaires afin de pouvoir répondre à ces questions.

III – Gergovie – 2005 – Fouille du rempart. Sondage dans le rempart sud

Ce sondage pratiqué en bordure sud plateau a révélé une importante stratigraphie qui valide, au moins d’un point de vue formel, les observations faites sur le talus sud-est.

Sondage du rempart sud
Sondage du rempart sud (T. Pertelwieser / ARAFA)

Toutefois le mobilier collecté dans les niveaux correspondant lors de « Gergovie – 2005 – Fouille du rempart » donne une datation très surprenante comprise, selon le cas, entre les années 50av. J.-C. et le plein Ier siècle ap. J.-C.

Description des niveaux archéologiques, par ordre stratigraphique.

  • Fine couche de terre avec des petites inclusions de basalte, d’environ 15 cm d’épaisseur, située directement au-dessus du substrat géologique. Cette couche a livré un mobilier homogène, datable vers le milieu du Ier av. J.-C.
  • Couche de terre mélangée avec des pierres basaltiques de tailles allant jusqu’à 10 cm. Épaisseur : environ 25 cm. La couche contient du mobilier homogène, datable au début du Ier siècle. ap. J.-C. Par rapport sa structure inhomogène la couche doit être interprétée comme correspondant à un remblai.
  • Blocage de pierres en basalte ayant des diamètres allant jusqu’au 40 cm avec de cassures fraîches et étroites. La couche possède une épaisseur maximale de 70 cm, et elle se décline vers le sud en forme d’une ‘ rampe ‘.
  • Ce niveau a livré du mobilier datable du dernier quart du Ier siècle av. J.-C.
  • Remblais de terre et de pierres basaltiques, composé de terre végétale relativement homogène. Épaisseur de la couche : 40 cm maximum. Elle est inclinée vers le sud de 30° environ. Le mobilier nous donne un terminus post quem à la transition du Ier/IIème siècle ap. J.-C.
  • Parement interne (sud) d’un mur en pierres sèches orienté Est – Ouest, situé sur le bord du plateau. Le mur est préservé sur 60 cm de hauteur. Le parement est bâti très irrégulièrement en pierres de basalte de différent volume. En comparaison avec les parements du rempart en pierres sèches, il donne une impression relativement chaotique.
  • Éboulis du mur, constitué de pierres de même module.
  • Remblais de terre et des pierres de 50 cm d’épaisseur, s’appuyant contre le parement interne du mur
  • Remblais de terre et de pierres de 60 cm d’épaisseur.
  • Terre végétale.
  • Surface actuelle.

L’interprétation de cette stratigraphie, et surtout de son association avec des éléments mobiliers très tardifs, est à ce stade de l’analyse difficile à faire. Il semble que ce secteur a connu des transformations importantes à la période gallo-romaine.

Nous proposons pour les campagnes à venir d’étendre le décapage sur ce secteur pour essayer de comprendre quelle est l’origine à ce phénomène : reconstruction du mur à la période gallo – romaine, perturbation antique’

La découverte d’éléments postérieurs au début du Ier siècle ap. J.-C. en position primaire sous ce qui est censé correspondre au mur qui borde le plateau pose problème. Peut-être faut-il mettre en relation ce phénomène avec l’utilisation de la terrasse (et d’une partie du rempart) comme lieu de sépultures pour la période du milieu du Ier siècle ap. J.-C. C’est en tout cas ce que semble indiquer la découverte fait en 2003 sur la partie sud-est du rempart.

Pour en savoir plus

Sur le site de l’ARAFA :

Liens externes :

  • Gergovie à tout prix… Émission de France culture, daté du 17 avril 2021. Avec Vincent Guichard (Protohistorien, directeur général du centre archéologique Européen du Mont Beuvray) et Yann Deberge (Protohistorien, archéologue à l’Inrap)
  • Site web du musée de Gergovie

Gergovie – 2006 – Fouille du rempart

Type de projet : fouille programmée (« Gergovie – 2006 – Fouille du rempart »)

Conduite du projet : Association pour la Recherche sur l’âge du Fer en Auvergne

Responsable de l’opération : Thomas Pertelwieser, assisté de Yann Deberge

Notice et documents : Lucien Andrieu, Thomas Pertelwieser, Yann Deberge et Emilie Andrieu

Rapport : La Roche-Blanche (63) – Oppidum de Gergovie 2006

  • I – Rempart sud-ouest
  • II – La porte Ouest
    • Phase1 : Implantation d’une carrière
    • Phase 2 : Occupation domestique et artisanale
    • Phase 3 : Zone dépotoir, nivellement de la carrière, installation du mur
    • Phase 4 : Formation d’une couche d’humus
    • Phase 5 : Installation de la porte gallo-romaine

I – Gergovie – 2006 – Fouille du rempart. Rempart sud-ouest

La structure la plus ancienne mise en évidence dans ce secteur correspond à une vaste carrière qui a entaillé profondément le rocher basaltique.

Cette structure s’étend, du sud au nord, sur 13,5 m de largeur, depuis la base du parement interne du rempart vers l’intérieur du plateau. La dimension est-ouest est inconnue ; les limites de ce creusement se trouvent à l’extérieur du chantier. La profondeur maximale du creusement est de 2,7 m depuis la surface du sol actuel.
Le fond de cet aménagement est parfaitement plat et semble correspondre à un plan de faille naturelle dans le rocher. Ses parois sont plus irrégulières et présentent fréquemment un profil en escalier qui résulte d’une extraction pratiquée en suivant les failles verticales et horizontales apparues dans la coulée de basalte au moment de son refroidissement.

Le comblement de la structure est constitué, en très grande majorité, de couches chargées en débris et éclats de basalte produits lors de l’utilisation de la carrière. Il s’agit d’une succession de strates de faible épaisseur, souvent très homogènes, qui se distinguent les unes des autres par la seule orientation et la taille des éclats et plaquettes de basalte qu’elles contiennent.

On a récolté peu de mobilier dans ce comblement : quelques tessons protohistoriques et quelques tessons de la Tène finale (c’est à dire entre -120 et – 70) (terminus post quem).

Gergovie - 2006 - Fouille du rempart. Pichet de Gergovie (La Tène D2b à période augustéenne) déposé à la tête de la défunte
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart. Pichet de Gergovie (La Tène D2b à période augustéenne) déposé à la tête de la défunte (T. Pertelwieser / ARAFA)

Une tombe a été creusée jusqu’au niveau géologique dans ce comblement. Au fond se trouvait un squelette, le seul mobilier qui l’accompagnait était un pot décoré en céramique fine tournée. Ce pot semble dater de la la seconde moitié du Ier s. av. J.-C. et probablement dans la période augustéenne. Le mobilier du comblement de la fosse donne un terminus post quem LTD2b (c’est à dire entre -50 et -30 anavant J.-C.) pour l’installation de la tombe.


On note aussi, au fond de la carrière le dépôt intentionnel d’un cadavre de chien et d’un jeune ovin.

Gergovie - 2006 - Fouille du rempart. Mur du rempart avec sa rampe massive
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart. Mur du rempart avec sa rampe massive (T. Pertelwieser / ARAFA)

Le rempart a été dégagé sur 18 m de long. Son mode de construction est semblable à celui déjà observé les années précédentes au sud-est du plateau.

L’état originel du rempart a une largeur de 2,5 m est est conservé sur une hauteur de 70 cm . Il est fait de pierres de basalte roulés récoltées en surface.

Au dessus une phase de renforcement du rempart avec des pierres formées de grandes dalles de basalte aux arrêtes vives qui proviennent très certainement de la carrière adjacente( US 21045 de couleur rouge sur la photo). Une partie est tombée (US 21006 de couleur verte sur la photo)
La construction n’est pas soignée et a l’air de s’être faite dans la précipitation

« C’est surtout la structure même du mur, découvert sur une vingtaine de mètres, qui nous renseigne le plus. Il a visiblement été construit dans l’urgence. »

Le rempart semble avoir été prolongé vers l’ouest dans la partie qui correspond à une fouille ancienne (US 21075 couleur jaune sur la photo). Le mur est ici conservé sur une hauteur de 1,5 m et sa construction est beaucoup plus soignée.

Par la suite un blocage de gros cailloux de basalte s’appuie contre le parement interne du rempart qui est alors presque entièrement recouvert. Il constitue ainsi une rampe massive.

Aucun tesson ne permet de dater les premiers états de construction mais 96 fragments de céramiques et une fibule permettent de dater les derniers états de fonctionnement à l’époque Augustéenne (terminus post quem).

Gergovie - 2006 - Fouille du rempart. Détail du parement
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart. Détail du parement (T. Pertelwieser / ARAFA)

On peut remarquer que les pierres sont empilées sans aucune recherche (certaines sont verticales, d’autres obliques).
On distingue aussi des joints verticaux séparés par environ 1m, c’est la largeur de travail d’un homme. Chacun devait travailler individuellement sans se préoccuper, certainement par manque de temps, d’une bonne jonction avec la partie construite par son voisin.

Ceci corrobore parfaitement le texte de César (Guerre des Gaules-livre VII – chapitre 48) :
« … Cependant, ceux des Gaulois qui s’étaient assemblés de l’autre côté de la ville, ainsi que nous l’avons expliqué plus haut, pour y faire des travaux de défense, … »

Ainsi, la date de construction du rempart sud-est en pierre sèches qui, après les fouilles 2003, nous semblait plutôt se situer aux environs de -30 avant J.-C. doit être rectifiée. Elle est bien contemporaine de la guerre des Gaules. Nous ne saurons jamais si elle avait commencé en -54 ou un peu avant, ou même en -52 dès que l’on a su que César se dirigeait vers Gergovie.


Le travail nous semble colossal aujourd’hui mais la motivation aidant et la main d’œuvre étant nombreuse, un rempart de plus de 2m de haut peut être construit dans la journée.

Gergovie - 2006 - Fouille du rempart.
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart (T. Pertelwieser / ARAFA)

II – Gergovie – 2006 – Fouille du rempart. La porte Ouest

Phase1 : Implantation d’une carrière

Le premier événement important survenu dans ce secteur du site est l’implantation d’une vaste carrière qui a servi à l’extraction de blocs de basalte de grandes dimensions.

Gergovie - 2006 - Fouille du rempart. La carrière de basalte
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart. La carrière de basalte (T. Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie - 2006 - Fouille du rempart. La carrière de basalte
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart. La carrière de basalte (T. Pertelwieser / ARAFA)

Cette structure correspond à creusement pour lequel on a pu suivre l’extension sur une dizaine de mètres du nord au sud et environ 11 mètres d’ouest en est. Si le bord nord et une partie du bord est ont pu être dégagés, les limites ouest et sud sont situées hors de l’emprise de la fouille de 2006. On ne connaît donc pas l’extension totale de cet aménagement qui peut, si l’on se base sur les observations faites dans le sondage sud-ouest où une structure du même type a été dégagée, se développer sur près de 20 m de largeur.

Le comblement s’est fait au fur et à mesure de l’avancée du front de taille avec les déchets d’exploitation.

Gergovie - 2006 - Fouille du rempart. Blocs de basalte abandonnés au fond de la carrière
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart. Blocs de basalte abandonnés au fond de la carrière (T. Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie - 2006 - Fouille du rempart. Remplissage de la carrière avec les déchets de taille
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart. Remplissage de la carrière avec les déchets de taille (T. Pertelwieser / ARAFA)

Le mobilier récolté permet de proposer une datation du comblement à la Tène D2 (soit environ 55-30 avant J.-C) .

Gergovie – 2006 – Fouille du rempart. Phase 2 : Occupation domestique et artisanale

C’est à un stade relativement avancé du comblement de la carrière (la dépression est comblée sur la moitié de sa hauteur), que sont installées plusieurs structures qui témoignent d’une occupation à vocation domestique et artisanale. Une citerne, un bâtiment ainsi que plusieurs murs en pierres sèches sont implantés dans ou en bordure de cette dépression encore nettement perceptible dans la topographie.

Gergovie - 2006 - Fouille du rempart.
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart (T. Pertelwieser / ARAFA)

Les constructeurs ont aménagé une terrasse pour niveler la partie sud de la construction. Cet aménagement se présente sous la forme d’un amas de blocs de basalte retenu par deux lignes parementées sur ses côtés sud-ouest et sud-est, la construction n’étant pas alignée sur le nord.

Cet aménagement repose directement sur le remblais de carrière qui a été ponctuellement recreusé pour permettre son installation. Le côté nord-ouest de cette construction est matérialisé par une tranchée de palissade creusée dans le substrat basaltique.

Gergovie - 2006 - Fouille du rempart.
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart (T. Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie - 2006 - Fouille du rempart.
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart (T. Pertelwieser / ARAFA)

A environ 1 m à l’est du parement sud-est du bâtiment ont été dégagés les restes d’un autre mur en pierre sèche assez fortement endommagé par les aménagements postérieurs (les fouilles récentes notamment). Cette construction relative massive (1,4 m de largeur) se développe vers le nord parallèlement à la ligne de parement du bâtiment.

L’espace laissé libre entre le mur et le parement sud-est du bâtiment nous paraît avoir servi d’accès depuis le nord vers la citerne. A cet emplacement, la carrière présente un creusement en pente douce vers le sud qui aboutit juste à hauteur des arases du puits telles qu’elles étaient conservées. Contre la parois nord de la carrière ont été mis en place quelques de blocs de basalte qui semblent avoir eu pour fonction de constituer un emmarchement.

Mur qui pourrait être un reliquat de l'ancienne aile rentrante de la porte gauloise
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart. Mur qui pourrait être un reliquat de l’ancienne aile rentrante de la porte gauloise (T. Pertelwieser / ARAFA)
Habitat à l’arrière des bastions
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart. Habitat à l’arrière des bastions (T. Pertelwieser / ARAFA)

Par la suite cet accès a été fermé d’un blocage de blocs de basalte parementés au sud. Cela peut indiquer l’abandon de la structure de puisage.

La datation de ces aménagements est surtout faite par le mobilier de comblement de la citerne. Pas de sigillée et parois fines augustéennes. On peut proposer une datation antérieure à la période augustéenne (55-30 av J.-C.) avec abandon à la fin de la Tène D2b.

Gergovie – 2006 – Fouille du rempart. Phase 3 : Zone dépotoir, nivellement de la carrière, installation du mur

Cette phase correspond à une occupation de l’espace qui voit successivement l’utilisation de la dépression de la carrière comme zone dépotoir, le nivellement de la carrière pour l’installation d’un mur en pierres sèches puis sa destruction.

Un comblement d’une couche de 50 cm riche en mobilier est déposée au sommet de la carrière encore assez nettement marquée.

Dans un second temps, le reste de la dépression de la carrière fait l’objet d’un comblement massif sur lequel est construit un mur de basalte d’une largeur supérieure à l m qui vient s’appuyer sur ce qui peut correspondre aux restes de la fortification protohistorique, ou du moins d’un état tardif de celle-ci.

Le mobilier recueilli permet de dater cette phase à la période augustéenne.

Gergovie – 2006 – Fouille du rempart (T. Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart (T. Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart (T. Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart (T. Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie - 2006 - Fouille du rempart.
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart (T. Pertelwieser / ARAFA)

Le niveau dépotoir appartient plutôt au début du règne d’Auguste (gobelets d’Aco, faible fréquence des sigillées, absence des productions de Lezoux, fibule à disque médian) et peut être mis en regard du dernier état de la phase 2. Les couches sommitales s’accorderaient plus avec une datation à la fin du règne d’Auguste ou au début de la période tibérienne mais qui ne dépasserait pas la deuxième décennie du Ier s. ap. J.-C., compte tenu de l’absence de nombreux marqueurs céramologiques.

Epad
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart. Epad (T. Pertelwieser / ARAFA)
Monnaie les sabines 89 av. J.-C.
Gergovie – 2006 – Fouille du rempart. Monnaie les sabines 89 av. J.-C. (T. Pertelwieser / ARAFA)

Phase 4 : Formation d’une couche d’humus

Nous proposons de l’identifier à un niveau d’abandon postérieur à la destruction et au remblaiement des aménagements en pierres sèches.

Phase 5 : Installation de la porte gallo-romaine

Cette phase correspond à l’installation de l’ensemble de maçonneries constituant le dispositif d’entrée gallo-romain. Nous ne présenterons pas de façon détaillée, dans ce rapport, cet ensemble maçonné et nous renvoyons le lecteur aux rapports des années 2004 et 2005.

Aucune couche d’occupation n’a pu être associée à cet état maçonné. Il est probable qu’une grande partie des élévations conservées ne correspondent, en réalité, qu’aux fondations des bâtiments. En témoigne l’aspect extérieur de ces murs qui présentent, en partie basse, de larges « bourrelets » de mortier et un appareillage peu soigné ainsi que le manque de seuils d’entrées.

Sur l’ensemble du mobilier collecté depuis 2004 (tous contextes confondus) sur ce secteur on notera l’absence d’éléments très tardifs, puisque seul un tesson appartient aux productions de la Graufesenque datées des années 10/20 ap. J.-C. à la fin du Ier s. ap. J.-C., 20 tessons appartiennent aux phases anciennes de Lezoux (fin Auguste-Tibère) alors que la majorité des éléments correspond aux productions arétines (110 restes) et ne sont pas postérieures au règne d’Auguste ou de Tibère.

Compte tenu du phasage proposé et de l’absence d’éléments mobiliers gallo-romains réellement tardifs, la construction de cet aménagement est probablement à situer entre la fin de la période augustéenne et le milieu du Ier s. ap. J.-C.

Pour en savoir plus

Sur le site de l’ARAFA :

Liens externes :

  • Gergovie à tout prix… Émission de France culture, daté du 17 avril 2021. Avec Vincent Guichard (Protohistorien, directeur général du centre archéologique Européen du Mont Beuvray) et Yann Deberge (Protohistorien, archéologue à l’Inrap)
  • Site web du musée de Gergovie

Gergovie – 2007 – Fouille du rempart

Type de projet : fouille programmée (« Gergovie – 2007 – Fouille du rempart »)

Conduite du projet : Association pour la Recherche sur l’âge du Fer en Auvergne

Responsable de l’opération : Thomas Pertelwieser

Notice et documents : Lucien Andrieu, Thomas Pertelwieser

  • I – La porte ouest
  • II – Rempart sud-ouest

I – La porte ouest

Gergovie - 2007 - Fouille du rempart. Tranchée de palissade du coté nord-est
Tranchée de palissade du coté nord-est (Thomas Pertelwieser / ARAFA)

Le but de la fouille « Gergovie – 2007 – Fouille du rempart » était de mieux caractériser l’environnement de la fortification.

Le bâtiment partiellement dégagé en 2006, a été perçu dans sa totalité cette année. Son côté sud-est est implanté juste en limite nord de la carrière.

Le côté nord-est est matérialisé par une tranchée de palissade creusée dans le substrat basaltique, suivie par plusieurs trous de poteau.

Sur le côté sud-est le bâtiment s’appuie directement sur le gros mur de pierre sèche qui pourrait être le reste de l’ancienne porte avec un dispositif à « ailes rentrantes » connus ailleurs en gaule.
Au nord de cet ensemble plusieurs autres structures peuvent témoigner de l’existence d’un aménagement bâti.

On note la présence d’une citerne rectangulaire d’une contenance de 4,5 m3 qui n’a été comblée qu’à l’époque augustéenne en une seule fois. On a découvert au fond trois fibules.

Quatre fosses ont été dégagées lors de la fouille « Gergovie – 2007 – Fouille du rempart » :

  • la première a livré une table basaltique et des micro-déchets, des battitures qui caractérisent le forgeage à chaud du fer. On a découvert des blocs de tuyères à proximité. On peut en déduire que cette fosse a accueilli un forgeron.
  • la plus grande des fosses a une fonction indéterminée, ce peut être une fosse d’extraction ou un atelier semi-enterré.
  • la troisième fosse peu profonde (0.3 m au maximum et de 4 m de diamètre) a un comblement constitué d’un sédiment limono-argileux brun sombre.
Gergovie - 2007 - Fouille du rempart. Citerne
Citerne (Thomas Pertelwieser / ARAFA)

Cette couche est perforée par une pointe de trait de catapulte, fichée en terre selon un angle de 70° et orienté au sud.. Cet objet s’est enfoncé de tout son long dans ce sédiment meuble et s’est arrêté sur le niveau empierré sous-jacent. Sa position, au moment de la découverte, est strictement identique à celles des pointes de traits retrouvées sur le site de la fontaine Loulié, au Puy d’Issolu, lieu intensément bombardé par l’armée de César en 51 av. J.-C. (Girault 2007). Prise d’ information faite auprès de diverses troupes de reconstitution utilisant fréquemment ce type d’armement, l’angle de la pointe ainsi que la profondeur d’enfouissement, correspondent très précisément à ceux que l’on obtient en réalisant un tir parabolique, méthode qui permet d’atteindre la portée maximale qui est comprise, d’après les essais effectués, entre 400 et 500 m.

Gergovie - 2007 - Fouille du rempart. Trait de catapulte
Trait de catapulte (Thomas Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie - 2007 - Fouille du rempart. Trait de catapulte
Trait de catapulte (Thomas Pertelwieser / ARAFA)

Cet objet, qui s’intègre parfaitement dans la série de ceux retrouvés sur les sites de la Guerre des Gaule, signale une position bombardée par l’artillerie romaine probablement au moment du siège de 52 av. J.-C. au pied de Gergovie. Si cette hypothèse se trouve confirmée (par la mise au jour d’autres objets du même type), cet objet retrouvé en position primaire fournit un terminus ante quem pour les vestiges sous-jacents. Dans tous les cas, sa découverte conforte l’attribution à La Tène D2 des vestiges associés à la phase 2.

Gergovie - 2007 - Fouille du rempart.
(Thomas Pertelwieser / ARAFA)

Un radier de sol constitué par un niveau à plat de petits blocs de basalte est présent à l’est de l’ensemble bâti précédemment décrit. Cet aménagement, relativement peu épais (5 cm), occupe une emprise d’environ 80 m². Il est limité : au sud, par une ligne de trous de poteaux ; à l’ouest, par l’ensemble bâti associé à la tranchée de palissade. La limite est n’est pas établie de façon certaine. Le sondage pratiqué dans la partie sud de l’aménagement, montre que ce sol, repose soit le substrat basaltique, soit les remblais installés au cours de la phase 1. Ce sol est recoupé par des fosses. Une concentration de torchis ou terre cuite écrasé in situ mêlée à plusieurs éléments métalliques (fer) a été dégagé à la surface de ce radier. Elle correspond soit aux restes d’un foyer très mal préservé, soit à ceux d’une paroi de construction effondrée. Le mobilier présent à la surface de ce sol est assez peu abondant et relativement usé, ce qui confirme l’identification à un espace de circulation. La présence d’une monnaie appartenant au type EPAD au guerrier à la surface de cet aménagement et l’absence de mobilier augustéen confirme l’hypothèse d’une utilisation autour dans le troisième quart du Ier s. av. J.-C.


L’interprétation de cet aménagement amène plusieurs interrogations. S’il correspond à l’évidence à un espace de circulation, la question de savoir s’il s’agit d’un sol extérieur ou d’un sol de bâtiment. La première hypothèse s’accorde avec celle d’une porte à cet emplacement déduite de la présence du mur massif 20157. S’oppose à cela la présence de plusieurs fosses (dont un atelier de forge) et d’une palissade qui se développe perpendiculairement à ce même mur 20157. Ces éléments indiqueraient plutôt un espace couvert de type atelier (présence de la forge). Ces deux interprétations ne s’excluent pas totalement puisqu’il est assez fréquemment, sur les oppida, de voir des constructions privées (habitations, ateliers) empiéter sur des espaces publics de type voie ou place (Condé-sur-Suippe, Corent…) ou encore sur des ouvrages défensifs (Bibracte). On peut envisager que l’installation de cet atelier de forge ait été effectuée sur un espace initialement destiné à la voierie. Cette proposition, très provisoire, reste à vérifier par les travaux à venir.

Vient ensuite la fermeture vers l’accès à la citerne circulaire et le nivellement du sol. Peuvent également être rattachés à cette phase plusieurs aménagements qui attestent définitivement de la présence d’un bâtiment immédiatement à l’est de l’ensemble construit mis en évidence pour l’état précédent. Cette construction s’appuie partiellement sur les aménagements plus anciens. Cet ensemble détermine une construction rectangulaire large de 7 m et longue de 12 m, ce qui correspond assez précisément à la taille de la construction dégagé pour le premier état.
Ce bâtiment est associé, dans sa partie interne, à une couche d’occupation d’une dizaine de centimètres d’épaisseur qui livre un mobilier relativement abondant mais fragmenté (environ 1 500 fragments pour 18 kg) où figurent en bonne place les éléments en fer (335 fragments pour 2 kg) ainsi que les scories (384 fragments pour 7,4 kg). La présence de ces vestiges mobiliers permet d’envisager que la fonction de cet espace reste inchangée (atelier de forge). La présence d’une monnaie à la légende VERCA immédiatement à la base du mur permet de fixer un TPQ pour l’installation de ce bâtiment. Ce type de monnaie est considéré comme datant du début de la période augustéenne. La présence d’un radier de sol (une voie ?) à l’est du bâtiment est fortement probable mais reste à démontrer par le démontage plus systématique de l’aménagement supérieur, à entreprendre en 2008. La datation tardive proposée pour cet aménagement (période augustéenne) repose sur la collecte des éléments mobiliers présents en surface (juste sous le niveau de décapage). Le nettoyage de cet aménagement a clairement montré la présence de recharges avec l’existence d’au moins un état antérieur à celui le plus largement dégagé en 2007. Ce niveau plus ancien, se présente sous la forme d’un radier, nettement plus structuré que celui dégagé en partie supérieure, fait d’éclats de basalte et d’éléments mobiliers (amphores, scories, faunes) disposés à plat. L’installation du bâtiment, entérine de façon définitive le glissement de l’accès au plateau vers l’est. Cette hypothèse s’accorde avec le décalage net vers l’est observé entre le mur appartenant au premier dispositif d’entrée et la porte maçonnée gallo-romaine.

La citerne rectangulaire est ensuite comblée en une seule fois et viens ensuite l’installation de la porte gallo-romaine maçonnée.


II – Gergovie – 2007 – Fouille du rempart. Rempart sud-ouest

La fouille « Gergovie – 2007 – Fouille du rempart » a permis d’établir un premier phasage des structures du secteur.

Gergovie - 2007 - Fouille du rempart. Vue externe du rempart
Vue externe du rempart (Thomas Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie - 2007 - Fouille du rempart. Le rempart comporte deux parements
Le rempart comporte deux parements (Thomas Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie - 2007 - Fouille du rempart. Le comblement à l'arrière du rempart par de grosses pierre forme une sorte de rampe
Le comblement à l’arrière du rempart par de grosses pierre forme une sorte de rampe (Thomas Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie - 2007 - Fouille du rempart. comblement à l'arrière avec de grosses pierres
comblement à l’arrière avec de grosses pierres (Thomas Pertelwieser / ARAFA)

phase 1a : Installation d’une carrière au bord sud-ouest du plateau. Cette carrière a profondément entaillé le rocher basaltique (2.7 m de profondeur et 8.5 m de largeur)

phase 1b : Abandon et remplissage assez rapide de la carrière

phase 2a : Construction du rempart de 2.5 m de largeur en pierres sèches, le bord extérieur repose sur le rocher tandis que le bord intérieur semble installé en partie sur des remblais. La fouille « Gergovie – 2007 – Fouille du rempart » a permis de dégager complètement le rempart sur une longueur de 18 m.

phase 2b : Niveau d’utilisation du rempart matérialisé par une couche de terre humique (non encore fouillée).

phase 3a et 3b : Réactivation de la carrière.

phase 3c : Inhumation humaine et dépôts d’animaux (un agneau complet, un jeune bovin et un pied de canidé) au fond de la carrière.

phase 3d : Abandon et remplissage très rapide de la carrière.

phase 3e : Le deuxième état de la fortification correspond à une phase de renforcement du rempart qui passe par un rehaussement ou reconstruction partielle du mur en pierres sèches.

Cette réfection consiste principalement en l’installation d’un nouveau parement interne réalisés à l’aide de blocs de grande dimension (jusqu’à plus de 60 cm de long). Ces pierres présentent des arêtes vives ce qui indique qu’il s’agit de blocs frais probablement directement issus de l’exploitation de la carrière située aux pieds du rempart.

Si le parement interne est installé à l’aplomb du mur préexistant, le parement externe est placé en retrait du parement de l’ état précédent et repose, pour toute sa longueur dégagée, sur le fourrage du premier état. Il n’est aujourd’hui préservé que sur 2 assises. Il est possible qu’avant cette réfection, le mur d’origine ait été démonté partiellement et aplani pour pouvoir recevoir la nouvelle construction.

Gergovie - 2007 - Fouille du rempart. Grosses pierres qui empêchent le mur de s’effondrer
Grosses pierres qui empêchent le mur de s’effondrer (Thomas Pertelwieser / ARAFA)

Le parement interne n’est préservé que dans la partie est de la fouille, sur 6 m de longueur. Cette face interne déborde du parement le plus ancien, vers l’intérieur, et forme un surplomb de 30 cm maximum.

Il est ponctuellement préservé jusqu’à 4 assises.

Cette réfection conduit à la constitution d’un mur nettement plus modeste qu’antérieurement puisque la distance de parement à parement n’est plus que de 2 m au lieu des 2,5 m de largeur observés pour le premier état. Pour soutenir certains blocs qui paraissent avoir eu tendance à basculer vers l’intérieur du site, de grandes dalles rocheuses ont été posées en position inclinée contre la face interne de la première construction. Ce blocage a été repéré jusqu’à la tranchée pratiquée dans les années 1930 qui a complètement détruit cet aménagement.

En fait, ce soubassement de dalles fait partie d’une construction en pierres massives beaucoup plus importante, qui s’étend en arrière de ce deuxième état de la fortification. Là, une vaste rampe constituée d’un blocage massif, dense et compact de blocs de basalte, vient s’appuyer sur toute la hauteur du parement interne de l’état 1 du rempart. Cette rampe est inclinée vers le nord et s’étend, depuis le parement interne, sur 6 m de profondeur. Aux emplacements où elle est la mieux préservée, on voit nettement une organisation des blocs disposés de façon à ménager une surface assez nette et homogène.

Pierres avec trace d'outils
(Thomas Pertelwieser / ARAFA)
Pierres avec trace d'outils
(Thomas Pertelwieser / ARAFA)

Pierres avec trace d'outils
Pierres avec trace d’outils (Thomas Pertelwieser / ARAFA)

La taille des pierres varie de 25 à 90 cm de diamètre. Ces pierres montrent fréquemment les indices d’une extraction directe depuis la carrière, comme par exemple des arêtes vives ou des surfaces « fraîches » non oxydées. Elles correspondent, de par leur taille et leur forme, aux traces d’exploitation visibles dans la carrière. Le démontage de la rampe a permis d’observer sur un bon nombre de pierres des traces d’outils qu’on retrouve également au fond de la carrière. Il s’agit d’impacts circulaires de 2 à 3 cm de diamètre, qui se trouvent le plus souvent à l’emplacement des failles verticales ou horizontales du rocher basaltique. Ces traces évoquent un outil de type pic ou burin.

Gergovie - 2007 - Fouille du rempart. Deuxième mur à l’extérieur du mur existant
Deuxième mur à l’extérieur du mur existant (Thomas Pertelwieser / ARAFA)
Gergovie - 2007 - Fouille du rempart. Deuxième mur à l’extérieur du mur existant
Deuxième mur à l’extérieur du mur existant (Thomas Pertelwieser / ARAFA)

L’ensemble des structures appartenant à la phase 3 peut témoigner d’une réalisation faite dans l’urgence. L’installation d’une carrière directement contre la partie interne du rempart est un cas de figure unique qui ne connaît pas de comparaison en Europe. Généralement, les terrasses ou les fossés qui sont mis à profit pour récupérer des matériaux nécessaires à la construction de la fortification sont situés à l’extérieur des remparts.

Gergovie - 2007 - Fouille du rempart. Deuxième mur à l’extérieur du mur existant
Deuxième mur à l’extérieur du mur existant (Thomas Pertelwieser / ARAFA)

De plus, le deuxième état du rempart présente un aspect beaucoup moins soigné que le premier état de la fortification avec un parement interne maintenu par des blocs placés obliquement et l’installation d’une rampe massive. La construction du parement externe en retrait du parement d’origine est également atypique et témoigne d’un souci d’économiser du temps et des matériaux. Sur la très grande majorité des fortifications protohistoriques, les réfections les plus récentes englobent les états les plus anciens et réutilisent ainsi la masse initiale. Tous ces indices tendent à montrer que cette réfection, qui comprend l’installation d’un mur aux dimensions plus réduites qui rehausse toutefois la fortification et la mise en place d’une rampe massive immédiatement en arrière du rempart, a été réalisée dans l’urgence. Elle a nécessité la réactivation de la carrière anciennement comblée et située immédiatement en arrière du rempart. La limite nord de la rampe correspond assez précisément à la limite sud du recreusement visible dans le comblement de la carrière. Si on imagine un travail réalisé par une équipe assez nombreuse, l’extraction puis la
construction de l’ensemble a pu être réalisé dans un laps de temps relativement court.

phase 3f : Niveau d’utilisation du rempart.

phase 4 : Abandon de la fortification.

phase 5 : Fouilles anciennes et modernes.

Gergovie - 2007 - Fouille du rempart. Le parement interne est très bien conservé
Le parement interne est très bien conservé (Thomas Pertelwieser / ARAFA)

Pour en savoir plus

Sur le site de l’ARAFA :

Liens externes :

  • Gergovie à tout prix… Émission de France culture, daté du 17 avril 2021. Avec Vincent Guichard (Protohistorien, directeur général du centre archéologique Européen du Mont Beuvray) et Yann Deberge (Protohistorien, archéologue à l’Inrap)

2015 – 2021 – Les fouilles de P. Jud

Type de projet : fouille programmée (« 2015 – 2021 – Les fouilles de P. Jud »)

Conduite du projet : ASG (association du site de gergovie)

Responsable de l’opération : Peter Jud

Notice et documents : Lucien Andrieu, Peter Jud et Xavier Lauer

Les fouilles « 2015 – 2021 – Les fouilles de P. Jud » ont permis de découvrir un ensemble urbain très cohérent.

Infographie de Peter Jud
(Peter Jud / ASG)

Dès le début de l’occupation, vers 70 avant notre ère, un fossé de drainage traverse le secteur (n° 3 du plan). Il s’agit de la structure la plus ancienne reconnue à ce jour.

Puis, un mur de fortification formé de grands blocs basaltiques et large de 2,70 m est construit (5). Ce mur est orienté perpendiculairement au rempart, qui borde le plateau. Il appartient à l’aménagement de la porte principale de la ville.

Dans le corridor formé par les deux ailes rentrantes du rempart, une tour massive en bois à plusieurs étages bloque l’entrée, surplombant la chaussée et les portes (6). Cette voie, large de plusieurs mètres, se dirige vers le centre de la ville (4). Elle est encore par endroit recouverte d’un dallage à la romaine. Immédiatement derrière la porte, une plateforme rectangulaire constituée de larges dalles supporte un vaste bâtiment sur poteaux, identifié comme une halle publique (7).

Cet ensemble urbain d’une qualité surprenante, construit essentiellement en pierre sèche, se développe entre les années 60 et 20 avant notre ère. Dans la phase terminale de l’occupation du secteur, marquée déjà par l’abandon progressif de la ville, un quartier artisanal s’installe. Un ensemble de bâtiments légers construits en bois, s’organise autour d’une petite cour. Pour cette dernière phase, ont été reconnu des ateliers métallurgiques, un puits et une citerne.

L’équipe des fouilleurs dirigée par Peter Jud est composée d’étudiants en archéologie des universités de Paris Sorbonne, de Clermont-Ferrand et Montpellier, ainsi que de bénévoles français et étrangers.

2015 à 2021 - Les fouilles de P. Jud. Parement du rempart
(Peter Jud / ASG)
2015 à 2021 - Les fouilles de P. Jud. Parement du rempart
Parement du rempart (Peter Jud / ASG)
2015 à 2021 - Les fouilles de P. Jud. Trous de poteaux partie sud
Trous de poteaux partie sud (Peter Jud / ASG)
2015 à 2021 - Les fouilles de P. Jud. Reste de foyer sous la tour
Reste de foyer sous la tour (Peter Jud / ASG)

2015 à 2021 - Les fouilles de P. Jud. Fossé parallèle au rempart découvert en 2021
Fossé parallèle au rempart découvert en 2021 (Peter Jud / ASG)

2015 à 2021 - Les fouilles de P. Jud. Un fossé sous le grand dallage. Il a été recouvert par le dallage
Un fossé sous le grand dallage. Il a été recouvert par le dallage (Peter Jud / ASG)
2015 à 2021 - Les fouilles de P. Jud. Le grand dallage
Le grand dallage (Peter Jud / ASG)

Les fouilles de P. Jud. A l'arrière du grand dallage
A l’arrière du grand dallage (Peter Jud / ASG)
Fossé porte sud
Fossé porte sud (Peter Jud / ASG)

Au centre du plateau un immense dallage a été découvert il mesure au moins 125m de long pour 25m de large !

Cela donne une surface de plus de 3000 mètres carrés. Cette place pouvait dont contenir environ 3000 personnes (en comptant comme la police 1 personne par mètre carré) ou 9000 personnes ( en comptant 3 individus au mettre carré) et même 20000 personnes (à la Mecque il y a 7 pèlerins par mettre carré).

Le travail colossal qu’il a fallu fournir pour l’établir démontre l’importance du site.
C’est pourrait être un espace public, la suite des fouilles permettra de mieux comprendre

Pour en savoir plus

Sur le site de l’ARAFA :

Liens externes :

  • Gergovie à tout prix… Émission de France culture, daté du 17 avril 2021. Avec Vincent Guichard (Protohistorien, directeur général du centre archéologique Européen du Mont Beuvray) et Yann Deberge (Protohistorien, archéologue à l’Inrap)





Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole

pour voir

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole : chapitres I à V issus de l’Article publié dans “L’Archéologue Archéologie Nouvelle n° 95 avril – mai 2008″ qui nous a aimablement autorisé à le reproduire. Les données présentée à partir du chapitre VI correspondent à des synthèses par année de fouille

I – Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Présentation

Le site de Gondole (commune du Cendre) est, des trois oppida arvernes localisés au sud du grand bassin clermontois, celui qui reste le plus mal connu du grand public et de la communauté des chercheurs.

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. L’oppidum de Gondole à la confluence de l’Allier et l’Auzon (S. Foucras / ARAFA)

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. L’oppidum de Gondole à la confluence de l’Allier et l’Auzon (S. Foucras / ARAFA)

Pourtant, dès le XIXe siècle, il y est fait mention de découvertes surprenantes qui étaient considérées, jusqu’à la reprise récente des recherches, avec beaucoup circonspection. Ainsi, P.-P. Mathieu, érudit local qui suivait de près les travaux liés à la voie de chemin de fer construite à proximité immédiate du site, dit avoir vu « un squelette humain, la tête coiffée d’un casque d’airain », d’un « puits de 2 m de diamètre remplis de pierres mêlées à des ossements de chrétiens » ou encore d’une « fosse de 12 par 12 pieds remplis d’ossements de chrétiens mêlés à quelques os de cheval ».

II – Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. La redécouverte du site

L’identification du site à un oppidum gaulois est finalement récente puisqu’on la doit à une prospection réalisée dans les années 1980 à l’intérieur du site (J. Collis). C’est également à cette époque que l’attribution à la période protohistorique a été proposée pour l’imposante fortification qui protège le site.

Les premiers travaux d’envergure n’ont été réalisés qu’au début du XXIe siècle, à l’occasion d’un projet routier et urbain. Une opération de diagnostic archéologique, conduite entre 2002 et 2005 (U. Cabezuelo, INRAP), a concerné toutes les parcelles situées en avant de la fortification et se trouvant à l’ouest de la voie de chemin de fer, soit un espace d’environ 45 hectares. Ces sondages systématiques ont révélé que, loin d’être fantaisistes, les descriptions faites au XIXe s. relatant la découverte de vestiges funéraires quelque peu inhabituels, renvoyaient bien à une réalité archéologique. Cette opération a également montré, que loin de se limiter au seul espace fortifié, l’occupation laténienne débordait très largement à l’extérieur de l’oppidum.

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Rempart et talus. Soit 4a : la voie de chemin de fer passe sur le bord du fossé ; 4b : sondage dans le fossé, le rempart est à droite, la pelle fait plus 8 m de long (Y. Deberge, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Rempart et talus. Soit 4a : la voie de chemin de fer passe sur le bord du fossé ; 4b : sondage dans le fossé, le rempart est à droite, la pelle fait plus 8 m de long (Y. Deberge / ARAFA)

Depuis 2005, une opération de fouille programmée est conduite, plus à l’est, immédiatement aux abords du fossé défensif de l’oppidum (Y. Deberge, ARAFA). Débutée par une campagne de reconnaissance archéologique portant sur 3 hectares, la zone de fouille se concentre finalement sur un secteur de 5 000 m² à forte densité de vestiges, l’objectif étant de compléter les informations apportées par les travaux préventifs notamment en caractérisant le mode d’occupation de cet espace situé en dehors de l’espace fortifié.

Ces observations de terrain, cumulées à celles obtenues par prospection aérienne, méthode de repérage des vestiges particulièrement efficiente sur ces terrains alluviaux, attestent, chose rarement observée sur les oppida de Gaule interne, d’une occupation qui déborde largement de la seule zone fortifiée. Au total, la surface occupée par l’oppidum et ses abords à la période gauloise est de 70 ha, soit une surface équivalente à celle des proches voisins de Corent et de Gergovie.

III – Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Organisation de l’occupation laténienne

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Étendue de l’occupation laténienne et fonctionnalisation des espaces 
(Y. Deberge, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Étendue de l’occupation laténienne et fonctionnalisation des espaces
(Y. Deberge / ARAFA)

L’oppidum est implanté à la confluence de l’Allier et de l’un de ses affluents, l’Auzon. Ces deux rivières ont dégagé un éperon qui surplombe d’une vingtaine de mètres leurs lits majeurs. Cette position, naturellement fortifiée, a été renforcée par l’installation d’un ouvrage massif, un large fossé suivie d’un haut talus, qui barre sur 600 m de long ce site de confluence.

Ainsi délimité, l’oppidum même occupe une surface d’environ 28 ha. En avant de cet ouvrage, la topographie est nettement plus plane et se présente sous la forme d’un vaste versant qui s’élève selon une pente très douce vers l’ouest. Les terrains situés au sud et à l’est correspondent aux terrasses hautes et basses de l’Allier. C’est sur cet espace non fortifié que se développe, sur environ 40 ha, l’occupation extensive mise en évidence récemment.

Dans la partie nord-ouest, les vestiges renvoient préférentiellement aux domaines religieux et funéraires. Dans la partie sud-est, l’occupation est plus tournée vers les domaines domestiques et artisanaux

IV – Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. L’ouvrage défensif

La fortification se présente aujourd’hui sous la forme d’une vaste dépression, large de 70 m et profonde de 4 m, suivie d’un talus, ponctuellement conservé sur 8 m de hauteur, qui s’étale sur près de 80 m de profondeur.

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Profil actuel et restitué de l’ouvrage défensif (Y. Deberge, V. Guichard, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Profil actuel et restitué de l’ouvrage défensif
(Y. Deberge, V. Guichard / ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Sondage dans la moitié sud du fossé (Y. Deberge, ARAFA)

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Sondage dans la moitié sud du fossé (Y. Deberge / ARAFA)

Un sondage, réalisé sur la moitié de sa largeur (l’autre moitié est située sur des terrains privés non accessibles), a révélé un creusement aux parois abruptes et un fond plat marqué par la présence d’un aménagement dans la partie centrale du fossé (palissade, douve ?). La présence de quelques restes organiques à la base du creusement, dont quelques lentilles d’eau, indique que la partie basse du fossé pouvait être en eau.

Ces observations permettent de tenter une restitution de la forme initiale de l’ouvrage : ce vaste fossé devait, à l’origine, avoisiner les 8 m de profondeur et approcher 30 m de largeur à l’ouverture. Son creusement a permis le dégagement d’une masse de terre considérable (environ 135 000 m³) qui a servi à l’édification du rempart. L’architecture interne du rempart n’est pas connue. Cependant, la découverte de gros blocs calcaires présentant une face de parement, en plusieurs points du site (y compris en remploi dans certaines structures laténiennes fouillées récemment), indique que cet ouvrage a pu avoir un habillage de pierres.

Le seul accès visible à la zone fortifiée correspond à une interruption marquée dans le tracé de l’ouvrage, approximativement au deux tiers sud. Cette entrée, encore utilisée aujourd’hui, est traversée par un chemin vicinal qui se prolonge, en ligne droite, à l’intérieur du site. Il est très probable qu’il reprenne le tracé d’une ancienne voie comme en témoigne l’orientation des vestiges laténiens qui se distribuent, de façon cohérente, perpendiculairement et parallèlement à cet ouvrage, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du site. Une autre voie empierrée, beaucoup plus monumentale, a été récemment mise en évidence en avant l’oppidum. Constituée d’une voie de roulement empierrée de 6 m de large, elle est bordée de part et d’autre de profonds fossés ou tranchées de palissades. Son tracé, repéré sur 400 m de longueur, part en direction de l’oppidum voisin de Gergovie.

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. La voie monumentale découverte en avant de l’oppidum (J. Dunkley, INRAP)

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. La voie monumentale découverte en avant de l’oppidum (J. Dunkley / INRAP)

V – Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. La zone interne de l’oppidum

L’espace fortifié n’est connu que par l’intermédiaire de quelques sondages, de taille très réduite, et de prospections au sol. Ces observations confirment la présence de niveaux archéologiques (sols construits et structures en creux) conservés ainsi que leur datation au Ier s. av. J.-C. Les photographies aériennes sont d’un apport bien plus déterminant pour ce qui est de la perception de l’organisation générale des vestiges. Elles mettent en évidence, aux emplacements où la végétation de surface n’empêche pas les observations, une occupation très structurée. Le long de la voie centrale, des axes de circulation installés orthogonalement déterminent des îlots de quelques milliers de mètres carré chacun. Au sein de ces espaces, se distinguent de grandes structures quadrangulaires, d’environ 40 m² au sol, et des vestiges plus ponctuels, généralement circulaires et d’un diamètre limité (1 à 2 m). La fouille conduite à l’extérieur du site permet d’interpréter ces aménagements visibles, de façon spectaculaire, depuis les airs. Palissades, caves et puits semblent consteller la zone interne de l’oppidum.

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Vestiges archéologiques perçus par photographie aérienne dans la zone interne de l’oppidum 
(Y. Deberge, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Vestiges archéologiques dans la zone interne de l’oppidum
(Y. Deberge / ARAFA)

VI – Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Un espace à vocation funéraire et religieuse

C’est dans la partie ouest de l’espace « extra-muros », et au nord de la grande voie, qu’a été découvert au cours de l’année 2002, le spectaculaire ensevelissement d’hommes et de chevaux. Dans une fosse rectangulaire, ont été dégagés huit hommes et huit chevaux, identifiés à des cavaliers et leurs montures. Le soin apporté à la mise en place des défunts (sept hommes et un adolescent) et à celles des animaux (tous des mâles adultes) permet d’écarter l’hypothèse d’une sépulture de catastrophe, ce que le nombre pourrait laisser suggérer. Une mise en scène précise a été recherchée. Les chevaux sont installés sur deux rangées dans la partie ouest de la fosse, tête au sud. Les hommes sont disposés, sur deux rangées, dans la partie est de la fosse, tête au sud. Les défunts sont placés sur le côté droit, le bras gauche reposant sur l’épaule du voisin. Aucune trace témoignant d’une mort violente n’a été mise en évidence sur les squelettes. Aucun élément mobilier (pièce de harnachement ou armement) ne vient nous éclairer sur la signification de cet ensemble funéraire particulier.

La découverte de Gondole renvoie à un type de pratiques, situées à la limite du funéraire et du religieux, qui sont assez largement documentées en Gaule interne, bien que sous des formes très différentes. Sur le sanctuaire de Ribemont-sur-Ancre (Somme), ce sont des éléments désarticulés d’hommes et de chevaux qui ont été regroupés, bien après la mort, dans un vaste ossuaire. Sur le site de Vertault (Côte d’Or), on retrouve cette association d’hommes et d’animaux, et notamment de chevaux. Toutefois, jamais le lien entre les hommes et les chevaux n’est aussi étroit et évident qu’à Gondole.

Dans les champs du possible, l’hypothèse d’une mise à mort collective de clients au décès du puissant qu’ils servaient, pratiques décrites par César dans ses commentaires, peut également être envisagée. « Tout ce qu’on croit avoir été cher au défunt pendant sa vie, on le jette dans le bûcher, même les animaux ; et il y a peu de temps encore, on brûlait avec lui les esclaves et les clients qu’on savait qu’il avait aimé, pour complément des honneurs qu’on lui rendait » (César, Guerre de Gaules, 6, 19). Une dernière hypothèse, serait de voir dans cette sépulture particulière un témoignage des événements qui ont agités la région en 52 av. J.-C. Les fortifications césariennes liées au siège de Gergovie ne se situent qu’à quelques milliers de mètres du site de Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole…

Depuis, la mise en contexte fourni par l’extension des travaux de diagnostic nous éclaire un peu plus sur la nature de cette découverte exceptionnelle. La datation à la fin de l’âge du Fer, déjà proposée à partir d’une analyse 14C, est confirmée par la collecte d’éléments mobiliers (céramique, amphore, monnaie, fibule…). D’autres fosses du même type ont été repérés en plusieurs emplacements (au moins 19 dans les sondages réalisés). Toutes ne présentent pas cette association particulière d’hommes et de chevaux. Certaines contiennent des bovins, d’autres des caprins. Enfin, des sépultures à inhumation et des enclos fossoyés rectangulaires renvoient à des pratiques funéraires plus classiques.

L’association de ces différents types de vestiges témoigne d’une utilisation mixte de cet espace à la fois dans le cadre de pratiques religieuses et funéraires.

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Sépulture d’hommes et de chevaux découverts en avant de l’oppidum
(U. Cabezuelo, INRAP)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Sépulture d’hommes et de chevaux découverts en avant de l’oppidum
(U. Cabezuelo / INRAP)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Sépulture d’hommes et de chevaux découverts en avant de l’oppidum
(U. Cabezuelo, INRAP)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Sépulture d’hommes et de chevaux découverts en avant de l’oppidum
(U. Cabezuelo / INRAP)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Vestiges funéraires découverts dans le même secteur ; enclos quadrangulaires funéraires (?)
(U. Cabezuelo, INRAP)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Vestiges funéraires découverts dans le même secteur ; enclos quadrangulaires funéraires (?)
(U. Cabezuelo / INRAP)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Sépulture à inhumation
(U. Cabezuelo, INRAP)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Sépulture à inhumation
(U. Cabezuelo / INRAP)

VII – Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Un « faubourg » artisanal

Au sud de la grande voie, l’occupation est de nature domestique et artisanale.

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. La zone artisanale dégagée aux abords de l’oppidum (Y. Deberge, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. La zone artisanale dégagée aux abords de l’oppidum (Y. Deberge / ARAFA)

Toujours situé à l’extérieur de l’enceinte de l’oppidum, ce « faubourg » de la ville gauloise s’étend jusqu’à la basse terrasse de l’Allier située plus à l’est.

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Voie comprenant deux états distincts (Y. Deberge, ARAFA)
 Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Voie comprenant deux états distincts (Y. Deberge / ARAFA)

Même si ponctuellement on rencontre quelques sépultures réparties de façon éparse sur le secteur, la très grande majorité des structures correspondent à des caves, des puits, des fosses et vestiges artisanaux. La fouille programmée conduite, depuis 2005, sur un peu plus de 3 000 m² au cœur de cet espace, permet une première caractérisation de cette occupation.

A l’image de ce qui est perçu pour la zone interne de l’oppidum, ce secteur apparaît fortement structuré. Les vestiges s’organisent de part et d’autre d’une longue voie empierrée qui se développe perpendiculaire au chemin vicinal actuel qui pérennise très certainement un axe de circulation ancien.

Plusieurs grandes caves, initialement surmontées de bâtiments de bois, sont présentes de part et d’autre de cette voie. Elles occupent une emprise au sol comprise entre 16 et 40 m² et sont toutes pourvues d’une descente d’escalier taillée dans le substrat avec, pour certaine, un emmarchement en pierres. Ces caves comportent un cuvelage en bois destiné à prévenir les éboulements des parois. Leur sol, très plan, est constitué une couche de limon marneux.

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Plan d'une cave
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Plan d’une cave (Y. Deberge / ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Cave avec descente d’escalier (Y. Deberge / ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Cave avec descente d’escalier (Y. Deberge / ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Cave avec descente d’escalier (S. Foucras / ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Cave avec descente d’escalier (S. Foucras / ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Reconstitution de la cave
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Reconstitution de la cave (Y. Deberge / ARAFA)

Les puits sont également très présents. Leur nombre s’élève à 25 sur les 3 000 m² décapés. Certains d’entre eux comportent les traces d’un cuvelage de bois, dispositif indispensable en raison du caractère meuble du substrat superficiel (sable et grave). Ces structures livrent un abondant mobilier détritique parmi lequel les amphores vinaires, conteneurs encombrant et difficilement réutilisables, figurent en bonne place. Ils livrent ponctuellement des restes organiques conservés (semelle en bois, fragment de seau, spatule en bois, macro-restes végétaux…) qui documentent un aspect de la vie quotidienne généralement peu connue, faute de vestiges conservés.

Quelques trous de poteau, malheureusement mal conservés, marquent l’emplacement de constructions au plan difficilement déterminable.

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Rejet mobilier effectué dans un puits (Y. Deberge, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Rejet mobilier effectué dans un puits (Y. Deberge / ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Rejet mobilier effectué dans un puits (Y. Deberge, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Rejet mobilier effectué dans un puits (Y. Deberge / ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Rejet mobilier effectué dans un puits (Y. Deberge, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Rejet mobilier effectué dans un puits (Y. Deberge / ARAFA)

Les vestiges artisanaux sont, quant à eux, omniprésents avec notamment de très nombreuses fosses destinées à la préparation des argiles. Autres structures emblématiques de la production potière, huit fours ont été mis au jour. Ils sont de plan très standardisé avec deux laboratoires de cuisson circulaires de petite dimension (1 m de diamètre environ) associés à un seul laboratoire de chauffe. Ces fours sont simplement aménagés par creusement dans le substrat graveleux, la paroi interne étant simplement recouverte d’une couche d’argile. Les mieux préservées montre un conduit de chauffe voûté, un laboratoire de cuisson muni d’un ressaut périphérique et une languette destinés à supporter une sole amovible constitué de gros fragments de récipients réutilisés. Les ratés de cuisson compte pour près de la moitié des rejets céramiques collectés sur le site. Les ateliers sont localisés dans certaines des plus grandes caves. L’une d’elle a livré plusieurs outils de potier (des lissoirs en pierre), une autre contenait un récipient céramique, retrouvé en position primaire, rempli d’une préparation rouge destinée à l’enduction des céramiques. Le sol de cette cave était d’ailleurs recouvert de large étendue de ce pigment rouge, indice que cette étape de la production se faisait à cet emplacement. Ces découvertes font échos à celle d’un outil caractéristique du potier, une molette utilisée pour décorer les céramiques avant cuisson, retrouvée lors du diagnostic archéologique conduit par l’INRAP.

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Fours de potier (Y. Deberge, ARAFA)
Fours de potier (Y. Deberge / ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Détail de l'intérieur d'un four; La languette sert au maintien de la sole
 (Y. Deberge, ARAFA)
Détail de l’intérieur d’un four; La languette sert au maintien de la sole
(Y. Deberge / ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Reconstitution des deux fours. Document : L. Andrieu
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Reconstitution des deux fours (L. Andrieu / ARAFA)

Le mobilier collecté, particulièrement abondant (plus de 120 000 restes pour une masse totale supérieure 4 tonnes), est diversifié (céramique, amphore, faune, quincaillerie, parure, monnaies…). Il permet à la fois de préciser la chronologie de l’occupation, centrée sur les deuxième et troisième quarts du Ier s. av. J.-C. (La Tène D2a, D2b), et de dresser un panorama des activités pratiquées sur le site. À la fois lieu d’habitation et de consommation (en témoigne l’abondant mobilier détritique), ce secteur est surtout marqué par une très forte implication dans la production artisanale Les vestiges mobiliers, outre la production potière, témoigne d’une pratique artisanale diversifiée : manufacture d’objets en fer (scories, chutes et barres de fer, bloc tuyère en pierre), métallurgie des alliages cuivreux (creuset, moules et chutes métalliques) et tabletterie.

La production métallurgique développée à « Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole » reste difficilement déterminable (clouterie, tôle en alliage cuivreux ?) à l’inverse de celle de l’atelier de potiers. La céramique produite correspond uniquement à la vaisselle fine, assimilable à la vaisselle de table. L’atelier semble tout particulièrement spécialisé dans les productions engobées, rouges ou blanches. Le répertoire des formes produites dérive en droite ligne des productions indigènes connues aux périodes antérieures (jattes à bord rentrant, formes hautes de forme ovoïde ou carénée, bol à panse carénée…). Suivant un processus engagé au IIe s. av. J.-C., un large emprunt est également fait aux répertoires méditerranéens. Sont reproduites des formes de la campanienne (A et B), des cruches et pichets dérivés de modèles méridionaux et catalans, et, fait nouveau, des récipients qui copient la céramique culinaire italique. Ainsi, à côté des imitations d’assiettes Lamb. 5 ou 6, de bols Lamb. 1, 8, 31/33 sont produites, à Gondole, les premières imitations connues en territoire arverne de plats à enduit rouge interne. Toutefois, ces copies ne sont jamais des retranscriptions fidèles de la forme originale. Elles comportent fréquemment des décors typiquement indigènes faits de lignes lissées (curvilignes, rectilignes, chevrons…) ou d’impressions réalisées à la molette. Ce détournement décoratif et morphologique va de pair avec celui de l’usage de ces céramiques. C’est notamment vrai pour les plats à enduit rouge interne qui, s’ils ont une fonction culinaire certaine dans le monde italique, sont ici destinés aux usages de la table.

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Molette de potier 
(U. Cabezuelo, INRAP) 
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Molette de potier
(U. Cabezuelo / INRAP)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Molette de potier 
(U. Cabezuelo, INRAP) 
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Molette de potier
(U. Cabezuelo / INRAP) 
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Pigments rouge destinés à l’enduction des céramiques (Y. Deberge, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Pigments rouge destinés à l’enduction des céramiques (Y. Deberge / ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Lissoirs et polissoirs confectionnés à partir de haches polies réutilisées (Y. Deberge, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Lissoirs et polissoirs confectionnés à partir de haches polies réutilisées (Y. Deberge / ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Ratés de cuisson (Y. Deberge, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Ratés de cuisson (Y. Deberge / ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Pot contenant du pigment (Y. Deberge, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Pot contenant du pigment (Y. Deberge / ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Productions céramiques de Gondole (3D L. Andrieu, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Productions céramiques (L. Andrieu / ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Productions céramiques de Gondole (3D L. Andrieu, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Productions céramiques (L. Andrieu / ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Productions céramiques de Gondole (3D L. Andrieu, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Productions céramiques (L. Andrieu / ARAFA)

VIII – …lieu de résidence d’une population privilégiée

L’écrasante majorité du mobilier découvert sur le site est de facture indigène et renvoie aux activités domestiques et artisanales.

Instruments de toilette italiques (Y. Deberge, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Instruments de toilette italiques (Y. Deberge / ARAFA)
Fibules (Y. Deberge, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Fibules (Y. Deberge / ARAFA)
Intaille (Y. Deberge, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Intaille (Y. Deberge / ARAFA)
Parure annulaire et boucles de ceinture (Y. Deberge, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Parure annulaire et boucles de ceinture (Y. Deberge / ARAFA)

Toutefois, certains objets « détonnent » par rapport à ce que l’on pourrait s’attendre à trouver sur un site artisanal gaulois. Il s’agit en premier lieu de plusieurs instruments de toilette (palette à fard, spatules en fer, sondes en alliage cuivreux, cure-oreille, cure-ongle…), qui sont des objets typiquement romains.

Ces ustensiles, présents à « Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole » aussi bien dans les ensembles de La Tène D2a (vers 80-50 av. J.-C.) que dans ceux de La Tène D2b (vers 50-30 av. J.-C.), sont généralement rares avant la conquête même si on les rencontre ponctuellement sur certains oppida. La vaisselle d’importation et les amphores vinaires figurent également en nombre à Gondole, avec respectivement 170 et 460 récipients identifiés, sur seulement 3 000 m2 fouillés. Les armes, souvent attestées à l’état de fragments sur les sites d’habitat laténiens, sont également bien représentées. A côté d’éléments fragmentaires (deux épées incomplètes, des éléments de bouclier) ont été découverts un casque en fer, quasiment complet, appartenant au type dit de Port, un fer de lance, une possible pointe d’épieu et un gladius. it

Casque en fer pourvu de couvres joues et d’un protège nuque (type Port ; S. Foucras, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Casque en fer pourvu de couvres joues et d’un protège nuque (type Port ; S. Foucras / ARAFA)

Toutefois, certains objets « détonent » par rapport à ce que l’on pourrait s’attendre à trouver sur un site artisanal gaulois. Il s’agit en premier lieu de plusieurs instruments de toilette (palette à fard, spatules en fer, sondes en alliage cuivreux, cure-oreille, cure-ongle…) qui sont des objets typiquement romains. Ces ustensiles, présents à Gondole aussi bien dans les ensembles de La Tène D2a (vers 80-50 av. J.-C.) que dans ceux de La Tène D2b (vers 50-30 av. J.-C.), sont généralement rares avant la Conquête même si on les rencontre ponctuellement sur certains oppida. La vaisselle d’importation et les amphores vinaires figurent également en nombre à Gondole, avec respectivement 170 et 460 récipients identifiés, sur seulement 3 000 m² fouillés. Les armes, souvent attestées à l’état de fragments sur les sites d’habitat laténiens, sont également bien représentées. A côté d’éléments fragmentaires (deux épées incomplètes, des éléments de bouclier) ont été découverts un casque en fer, quasiment complet, appartenant au type dit de Port, un fer de lance, une possible pointe d’épieu et un gladius. Cet ensemble évoque très fortement une panoplie militaire romanisée comparable à celles connues pour certaines sépultures aristocratiques de Gaule du Centre et en Gaule Belgique. L’association avec quelques éléments liés au joug et au char (anneau passe-guide, renfort de caisse de char, bandage de roue) finit de souligner le caractère particulier de cette occupation installée hors de l’oppidum. Trois bagues en fer initialement pourvues d’un chaton décoré et dorées à la feuille trouvent également leur place dans ce contexte privilégié fortement romanisé.

La présence de ce mobilier, relativement exceptionnel, associée à celle des éléments importés abondants et diversifiés permet de poser la question du statut des occupants de ce secteur du site. En se basant sur ces vestiges matériels, on peut supposer que cet ensemble, pourtant situé à l’extérieur de l’oppidum, a été le lieu de résidence d’une population privilégiée, portant les armes, ayant des contacts étroits avec le monde romain : des membres d’une élite guerrière ayant servi dans les troupes auxiliaires probablement au moment de la Guerre de Gaules. L’association de ces vestiges aux témoins d’une pratique artisanale développée montre que cette population privilégiée exerce un contrôle direct sur les activités à forte implication économique. On soulignera que les productions céramiques de Gondole, qui peuvent être associées chronologiquement à cet ensemble particulier de mobilier, comportent, à côté d’un fond indigène très présent, une proportion importante de formes directement issues du monde romain.

Gladius en fer retrouvé sur le sol de l’une des caves (Y. Deberge, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Gladius en fer retrouvé sur le sol de l’une des caves (Y. Deberge / ARAFA)
Pendeloque en bronze à figuration zoomorphe (Y. Deberge, ARAFA)

Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Pendeloque en bronze à figuration zoomorphe
(Y. Deberge / ARAFA)
Fibule en bronze à décoration zoomorphe (Y. Deberge, ARAFA)
Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Fibule en bronze à décoration zoomorphe
(Y. Deberge / ARAFA)

Les différents travaux conduits, aussi bien dans un cadre préventif que programmé, depuis ces cinq dernières années renouvellent profondément la connaissance que nous avions de l’occupation laténienne de Gondole. Les vestiges découverts témoignent de l’extraordinaire potentiel de ce site parfois considéré comme « secondaire » en regard de ses deux proches voisins que sont Gergovie et Corent.

VI – Campagne de fouilles 2005-2006

Le site de « Gondole », localisé sur la commune du Cendre, est l’un des trois oppida (ville gauloise), avec Corent et Gergovie, identifiés à ce jour dans le bassin clermontois. Il est notamment connu pour son imposante fortification (la ligne de chemin de fer Clermont-Issoire passe dans son fossé) et les découvertes exceptionnelles faites lors d’opérations préventives entre 2002 et 2005 (« tombes aux cavaliers »).

En 2005, une opération de fouille archéologique programmée a été conduite sur une parcelle (propriété du Conseil général du Puy-de-Dôme) immédiatement située en avant du rempart. Elle a permis l’étude du fossé défensif de l’oppidum et la mise en évidence d’une importante occupation à caractère domestique et artisanal.

2006, correspond à la première année de la fouille trisannuelle (2006-2008) qui a pour objectif l’étude, sur environ 5 000 m², de ce faubourg artisanal situé aux portes de l’oppidum gaulois.

Vue générale des travaux de 2006
Vue générale des travaux de 2006

1- Historique du projet

L’oppidum de Gondole est, des trois oppida arvernes localisés au sud du grand bassin clermontois, celui qui reste le plus mal connu du grand public mais aussi de la communauté des chercheurs. Identifié assez récemment à un oppidum gaulois à la suite de premiers travaux exploratoires (Collis 1989), il n’a pas encore fait l’objet d’une étude d’envergure comme cela est le cas depuis ces dernières années pour les sites de Corent (M. Poux) et de Gergovie (T. Pertlwieser).

Les découvertes faites dans le cadre de l’archéologie préventive (diagnostic INRAP sous la direction de U. Cabezuelo de 2002 à 2005) sur les parcelles situées en avant de la fortification (l’une des plus imposantes du monde celtique) montrent pourtant que loin d’être un site secondaire en regard de ces deux voisins, il correspond à un site majeur occupé sur une surface sensiblement équivalente à ces derniers.

Après une campagne de reconnaissance archéologique aux abords même de la fortification conduite en 2005, nous avons entamé en 2006 une campagne de fouille dans un cadre triennal qui a pour objectif l’étude, sur une superficie d’environ 5 000 m², de l’occupation domestique et artisanale mise en évidence sur ce secteur du site. Parallèlement aux fouilles menées sur Gergovie (étude de la fortification gauloise – depuis 2001 – et du sanctuaire gallo-romain – depuis 2006-) et Corent (étude du sanctuaire gaulois et ses abords – depuis 2001), le projet de recherche conduit à Gondole permet de documenter des aspects encore méconnus de la société arverne du Ier s. av. J.-C. ; celles de la forme et de l’organisation de l’habitat, de l’artisanat, de la culture matérielle et des paléoenvironnements. Il a également pour objectif d’apporter des informations supplémentaires (chronologique notamment) pour expliquer la présence de ces trois grands oppida sur un si petit territoire, chose quasi unique à l’échelle de la Gaule.

2 – Moyens et déroulement de l’opération

Ce projet de recherche est autorisé par l’État. Il reçoit le soutien du Ministère de la Culture (DRAC Auvergne), de la Région Auvergne, du Conseil général du Puy de Dôme, de la communauté d’agglomération Clermont Communauté (en 2005) et de la commune du Cendre. Placée sous la direction scientifique de Y. Deberge (Association pour la Recherche sur l’âge du Fer en Auvergne), épaulé de J. Dunkley et S. Foucras, la fouille repose très largement sur la participation de bénévoles, amateurs locaux et étudiants en archéologie (universités de Clermont-Ferrand, Nantes, Lyon, Tours, Strasbourg, Moscou…). En échange de leur participation, les bénévoles reçoivent une initiation aux méthodes de l’archéologie ce qui rentre, pour certains, dans le cadre de leur cursus universitaire. Ils sont hébergés et nourris.

Une partie du personnel d’encadrement est salarié : responsable de la fouille et de secteur, spécialistes… La fouille se déroule au rythme d’un mois à un mois et demi de fouille en période estivale. Les moyens alloués en 2005-2006, sont suffisants pour réaliser la fouille dans des conditions relativement satisfaisantes. Ils sont nettement insuffisants pour pourvoir aux études qui suivent la période de fouille proprement dite (analyse des mobiliers, stabilisation et restauration des objets…).

3 – Résultats de la campagne de 2006

Cette année, 1 800 m² ont été fouillés dans la partie qui avait livré la plus forte densité de vestiges l’an passé. Les structures archéologiques sont nombreuses (puits, fosses, celliers, trous de poteau, caves, fours de potier), de même que les vestiges mobiliers (environ 42 000 objets). C’est surtout sur les aspects concernant l’organisation et la datation de l’occupation que cette campagne apporte des éléments nouveaux.

Organisation générale du site

La fouille montre que la structuration de l’espace repose en grande partie sur la voie dont le tracé a pu être suivi, d’ouest en est, sur environ 60 m. Celle-ci, pour laquelle deux phases d’aménagements ont pu être mises en évidence, détermine l’orientation de tous les autres vestiges (caves, fossés, palissades…). Certaines structures sont implantées en bordure immédiate de cet aménagement ce qui témoigne probablement de l’existence de certaines contraintes (de place ?). Deux autres axes structurants sont révélés par la présence d’alignements de puits aux extrémités est et ouest de la zone décapée. Ils traduisent l’existence de délimitations (limite foncière ou axe de circulation secondaire) qui n’ont pas été matérialisées dans le sous-sol. Les caves mises au jour apparaissent regroupées dans la partie nord de l’espace étudié. Cette organisation, avec trois caves implantées à peu de distance les unes des autres, rappelle le plan en « îlots » observé pour la zone interne de l’oppidum de Gondole : quelques caves sont installées au sein d’un enclos de quelques dizaines de mètres de côté, le même module se répétant plusieurs fois.

Dynamique de l’occupation

Conformément à ce qui avait été proposé à l’issue de la précédente campagne, les deux phases d’occupation comptent un nombre inégal de vestiges mobiliers et immobiliers, la phase la plus récente étant de loin la mieux représentée. On notera toutefois que l’achèvement de la fouille de plusieurs structures a permis de mettre en évidence des utilisations longues, l’état le plus récent masquant ou ayant détruit en grande partie les aménagements plus anciens. La répartition chronologique du mobilier suit la même logique avec une phase récente qui compte un nombre d’objets quatre fois plus important que pour la première phase. On note néanmoins que cette répartition vaut surtout pour la céramique. Si l’on exclue les éléments directement liés à l’activité de production potière, les deux phases d’occupation sont représentées par une masse sensiblement équivalente de vestiges mobiliers. Il faut en déduire que l’activité domestique du site, par ailleurs attestée par le cortège des éléments mobiliers renvoyant à ce domaine, reste constante alors que l’activité artisanale se développe fortement, notamment avec l’installation de l’atelier de potier.

Vestiges immobiliers particuliers

La fouille de cette année confirme l’utilisation majoritaire de la construction sur cave. Trois grandes caves, d’une emprise au sol d’environ 35 m² chacune, ont ainsi pu être dégagées en 2005-2006. Ces vastes aménagements ne trouvent de parallèles qu’au sein des plus grands oppida de Gaule interne (Bibracte, Villeneuve-Saint-Germain…). L’achèvement de la fouille de l’une de ces structures a été l’occasion de proposer, pour le grand public, une première reconstitution architecturale in situ de l’un de ces aménagements.

Les celliers sont également nombreux de même que les puits à eau. Ces derniers offrent l’opportunité, par les conditions de préservation favorables qu’ils présentent (milieu humide), de collecter des vestiges en matière organique : objets en bois, tissus, cordages, graines, pollens… La fouille de 2006 a d’ailleurs permis la découverte d’un seau bois, malheureusement très mal préservé.

Activités mises en évidence

Les mobiliers nous permettent de dresser sommairement le panel des activités pratiquées sur le site. L’écrasante majorité du mobilier renvoie à la sphère domestique : céramique de stockage, culinaire et de table, rejets de faune consommée, plaques de foyer et soles démantelées ou en place, torchis, petit outillage domestique (pelle à feu, seau en bois, couteau, rasoir, force…), objets de parure usagés, navette en os (tissage) et meules rotatives… Les éléments attestant la présence de constructions sont également très nombreux (clous, rivets, crampons, clé…).

Les vestiges liés à l’artisanat sont diversifiés mais très variablement représentés d’un point à l’autre du site. Une activité de forgeage du fer est attestée par la présence d’outil, de chutes de fer et de déchets. L’artisanat potier est signalé par la présence de fours de potiers (7 laboratoires de cuisson), de très abondants ratés de cuisson rejetés dans des tessonières (22 823 restes) et de quelques outils. Une activité de tabletterie est attestée par la découverte de quelques déchets liés à la fabrication d’anneaux en os et de fragments de bois de cervidés sciés. La métallurgie des métaux fusibles (bronze et plomb) est signalée par la présence de chutes et déchets (gouttes de bronze, tôles découpées et martelées, jets de coulée…) retrouvés en position secondaire. L’atelier associé à ces déchets n’a pas été localisé.

Découvertes particulières

Enfin, certains d’objets « détonnent » par rapport à ce que l’on pourrait s’attendre à trouver sur un site artisanal gaulois. Il s’agit en premier lieu de plusieurs instruments de toilette –palette et spatules à fard, miroir…- que l’on associe à plusieurs nodules de pigments ocre, rouge et rose – cosmétiques-. Les armes sont également bien représentées mais souvent présents à l’état de fragments à l’image de ce que l’on a coutume de rencontrer sur les sites d’habitat. À noter toutefois la découverte d’un casque en fer, quasiment complet, appartenant au type Port (6 de casques de ce type sont connus en Europe). Sa mise au jour, dans un secteur du site qui a par ailleurs livré deux fragments d’épée, un fer de lance et une hache-herminette (plus proche du piochon), évoque très fortement une panoplie militaire comparable à celle connues dans certaines sépultures aristocratiques de Gaule interne. Les pièces d’armement (toujours très fragmentées à l’image de ce que l’on observe sur les habitats) et quelques éléments liés au harnachement, au char et au joug (boucle de sous-ventrière, anneau passe-guide, renfort de caisse, bandage de roue) sont également présents dans d’autres secteurs du site. Pour finir, on notera la découverte de trois bagues en fer (toujours incomplètes) pourvues initialement d’un chaton décoré (conservé pour deux d’entres-elles) et dans deux cas partiellement (totalement ?) dorées à la feuille.

La présence d’un mobilier relativement exceptionnel associée à celle d’un mobilier d’importation abondant et diversifié permet de poser la question du statut des occupants de ce secteur du site. En se basant sur ces vestiges matériels, on peut supposer que cet ensemble, pourtant situé à l’extérieur du site, a accueilli une population relativement privilégiée (un aristocrate guerrier ayant servi comme auxiliaire dans l’armée romaine ?). L’association de ces vestiges aux témoins d’une pratique artisanale développée souligne le contrôle exercé par les élites sur ces activités à forte implication économique.

Synthèse provisoire

Cette première année de fouille de ce programme triennal permet de confirmer la mobilisation importante des abords de l’oppidum qui apparaissent, au moins pour la partie explorée, comme très structurés. La forme de l’occupation mise en évidence semble peu différer de celle perçue, essentiellement à partir des clichés aériens, pour la zone interne de l’oppidum. La typologie des vestiges présents (caves surmontées de construction, bâtiment sur poteaux, puits, fosses, sol construit, voie…) renvoie à un mode d’occupation que l’on a coutume de rencontrer sur les sites proto-urbains de type agglomération ouverte ou oppidum. Ici, ce « quartier » de la ville gauloise semble plus particulièrement tourné vers la production artisanale, faisant de ce secteur un véritable faubourg artisanal du site de Gondole. Sa présence hors de l’espace fortifié permet de poser la question de la définition même des limites de l’oppidum.

Concernant la chronologie de l’occupation, sa durée limitée dans le temps, de même que son attribution à La Tène D2 (entre 80 et 30 av. J.-C.), se trouvent renforcée par les mobiliers mis au jour au cours de la campagne 2006. L’analyse, qui repose sur un échantillon qui s’étoffe progressivement (47 monnaies, 289 amphores, 117 récipients d’importation, 19 fibules…), nous permet de proposer un terminus post quem aux années 80/70 av. J.-C. pour le début de l’occupation (présence de Dressel 1B, d’un as républicain frappé en 86 av. J.-C., de fibules attribuables à La Tène D2…) et un terminus ante quem aux années 30/20 av. J.-C. pour l’abandon du site (absence d’amphores, d’objets de parure, de vaisselle d’importation et de monnaies attribuables à la période augustéenne…) avec deux phases d’occupation qui se signalent par des mobiliers indigènes très distincts (La Tène D2a et La Tène D2b).

Valorisation et diffusion des résultats

Comme en 2005 (journées portes ouvertes, conférence publique au Cendre…), les résultats de la campagne de fouille de 2006 ont fait l’objet d’une diffusion auprès du grand public. Initialement, il avait été prévu d’effectuer des visites commentées à cadence hebdomadaire. Cela n’a pas été possible faute de moyens pour mettre en place un balisage et une signalétique sur le site.

Les principales actions en direction du grand public en 2006 ont été :

  • la mise en place de panneaux explicatifs sur les objectifs et résultats de la fouille conduite à « Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole » ;
  • des visites guidées sur rendez-vous ;
  • une journée portes ouvertes réalisée en fin de fouille : environ 500 visiteurs ;
  • la reconstitution in situ de l’une des caves ;
  • la mise en ligne des résultats sur internet ;
  • trois présentations publiques en mars 2007 (environ 250 auditeurs).

4 – Le Cendre (63) – Oppidum de Gondole. Projet 2007

Le projet engagé en 2006 va se poursuivre en 2007 sans grand changement de méthode ; l’objectif reste de pouvoir disposer, à terme, d’un espace étudié suffisamment grand (5000 à 6000 m²) pour tenter une analyse spatiale des vestiges mobiliers et immobiliers. Les moyens humains consacrés à la fouille vont être accru avec un allongement de deux semaines de la période de fouille et un recrutement plus large des bénévoles.

Nous proposons également, si les moyens sont suffisants, de procéder à la fouille complète de certains puits dégagés en 2005-2006. Ce type de fouille, qui nécessite des terrassements importants pour la mise en sécurité, sera conduite aux emplacements déjà fouillé en 2005-2006. La fouille de ces structures devrait permettre la découverte d’objets en matériaux périssables (bois, cuir, tissu…).

Les résultats de l’opération archéologique feront l’objet d’une présentation au public :

  • sur site : par des visites commentées à cadence hebdomadaire ; par l’accueil de groupes sur rendez-vous (y compris scolaires, d’où l’allongement de la période de fouille sur le mois de septembre) ; par l’organisation d’une journée portes ouvertes (en fin de campagne) ;
  • après la période de fouille : lors de conférences grand public ; site web…
Quelques découvertes faites en 2006
Quelques découvertes faites en 2006